capture ecran champignon poussant entre herbe

Gérer la tempête « Vuca »

Vuca pourrait être le prénom d’une des nombreuses tempêtes que les services météorologiques ont pris coutume de baptiser, en commençant par les premières lettres de l’alphabet au cours de chaque année civile. Pourtant, Vuca n’est pas une tempête au sens météorologique du terme. C’est l’acronyme anglais pour Volatility (Volatilité), Uncertainty (Incertitude), Complexity (complexité), Ambiguity (ambiguïté). À ces quatre lettres, on serait tenté d’ajouter le « S » – autant pour le pluriel que pour l’initiale de Shortage (pénurie en anglais). Quoi qu’il en soit, le terme Vuca – emprunté au milieu militaire américain depuis 1987, est devenu le terme consacré pour désigner le contexte économique post-covid que nous vivons actuellement.

Pour de nombreuses entreprises, ce contexte signifie notamment que les fondements de la stratégie sont à revoir. La stratégie basée de façon centrale sur la notion de coût doit désormais se déplacer sur des enjeux dominants de pérennité des activités. Pour s’adapter à l’incertitude, les grandes sociétés misent notamment sur le concept d’antifragilité*. Cette forme d’organisation s’oppose aux systèmes fragiles et aux systèmes robustes par le fait qu’elle tire parti de l’incertitude. « Une stratégie antifragile « est basée sur l’essai-erreur et permet d’évoluer avec des pertes limitées, ce qui au final réduit son risque », appuie Silberzahn, professeur spécialiste de la stratégie, de l’entrepreneuriat et de l’innovation. L’antifragilité est un mode de fonctionnement inspiré par la nature où il est omniprésent. Une plante qui s’associe à un champignon se rend vulnérable, car elle ouvre ses racines aux champignons et doit ensuite le nourrir en y consacrant jusqu’à la moitié de sa production. Cependant, dès lors que le contexte devient difficile, la plante profitera de l’eau et des nutriments apportés par le partenaire. 
Dans les contextes Vuca, les sociétés devraient sortir d’une posture visant à vouloir, prédire, contrôler et maîtriser, car c’est tout simplement illusoire et coûteux. Il faudrait au contraire briser l’armure, « laisser entrer l’air et la lumière et accepter une part de vulnérabilité. Remettre en question les modèles établis en prenant des risques mesurés, analyse Philippe Silberzahn. Un grand problème ne nécessite pas forcément une grande solution, ou prise de risques. Ce qui doit être radical, c’est le résultat et pas forcément les moyens ». 
 
Alexis Dufumier
 
* Nassim Nicholas Taleb, Antifragile : les bienfaits du désordre (Les Belles Lettres, 2013)
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