La ré-industrialisation de l’économie française dans un objectif de neutralité carbone impose de valoriser l’ensemble des ressources naturelles et renouvelables produites en France.
La laine et les peaux lainées produites par les sept millions d’ovins détenus dans les 35 000 élevages en font partie. Mais notre pays ne dispose plus de l’outil industriel approprié pour laver la laine, pour la transformer prête à être filée ou encore pour délainer les peaux avant que ces matières premières ne soient employées dans la fabrication de matériaux et de produits plus complexes.
A l’aval de cette industrie de première transformation, les débouchés de la laine et des peaux sont nombreux : textile, engrais, cosmétique, mégisserie, maroquinerie, matériaux isolants etc.
« Certaines filières industrielles très anciennes ont perduré, notamment au travers des productions de luxe et des métiers d’art. Et elles pourraient connaitre de nouveaux débouchés – des vêtements de sport respirant à base de laine par exemple – mentionnent les auteurs de l’étude intitulée « Valorisation de la laine et des peaux lainées », réalisée par le CGAAER (conseil général de la l’agriculture de l’alimentation et des espaces ruraux.
« Des valorisations tombées dans l’oubli (usage en fertilisation, en isolation) pourraient retrouver leur importance tandis que d’autres, fondées sur les technologies modernes de raffinage des molécules, sont totalement novatrices », ajoute le Conseil.
A cet effet, le CGAAER souhaite que « l’agence de l’environnement et de la maitrise de l’énergie (ADEME) et le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) coordonnent des travaux de recherche permettant de qualifier la laine de mouton française comme isolant et de développer des procédés de fabrication ».
Mais l’essor du « Made in France » dans l’industrie textile, du cuir et des matériaux impose la création d’un nouveau réseau de collecte de peaux lainées et de laine de mouton.
Or au cours des 50-60 dernières années, le délitement de l’industrie textile lainière spécialisée dans le traitement industriel et dans la fabrication de produits de première transformation (lavage, délainage des peaux, dépeignage) a conduit à la disparition d’une profession, celle des négociants. Ils collectaient peaux et laines pour les revendre à l’industrie.
Mais remettre sur pied ces unités de lavage, de délainage et de cargage/dépeinage impose la création simultanée d’un nouveau réseau de collecte de laine et de peaux lainées.
« Il serait de nature à remotiver les éleveurs ovins pour la production de laine, les efforts qu’ils fourniraient en termes de pratiques d’élevage et d’organisation du chantier de tonte étant récompensés par une meilleure valorisation », défend le CGAAER.
Pour recréer ce réseau de collecte, l’organisation britannique mérite d’être prise en exemple, selon le CGAAER.
« En effet, le Royaume-Uni a su maintenir au fil des ans son tissu industriel grâce à une organisation coopérative des éleveurs : le British Wool Marketing Board,», rapporte le CGAAER
Créé en 1950, le BWMB organise la collecte de laine, son stockage, son tri, sa vente aux enchères, son markéting et le support industriel pour les éleveurs qui y ont rejoint l’organisation.
L’adhésion des éleveurs à la coopérative n’est pas obligatoire mais celle-ci est obligée de collecter la laine des membres qui possèdent au moins quatre moutons.
Le BWMB n’a pas pour objectif de faire des bénéfices pour son propre compte, selon l’étude du CGAAER, mais de valoriser au mieux la laine pour le compte des éleveurs. Toutes les laines sont collectées quelles que soient leur qualité, leur valeur ou encore le lieu de collecte.
« Les plus-values sont redistribuées aux éleveurs, déduction faite du coût des services rendus. Le paiement est réalisé selon le poids et la qualité de la laine, un système de traçabilité permettant ainsi de pouvoir identifier la provenance de chaque toison triée au centre de collecte, précise le CGAAER.
Comme la qualité de la laine collectée repose sur les pratiques d’élevage adoptées par les producteurs d’ovins, « le BMWB promeut le bien-être animal et offre à ses adhérents toute une gamme de formations pour améliorer les conditions d’élevage des moutons mais aussi la qualité de la laine, explique encore le CGAAER. Il a notamment beaucoup travaillé sur le marquage des moutons afin de faire disparaitre les problèmes de peinture sur les toisons. Ainsi, une liste de produits à utiliser pour marquer les moutons qui disparaissent au lavage a été élaborée ».
Une alternative à la collecte de peaux et de laine est leur transformation en compost et la fabrication de fertilisants organiques. Les éleveurs intéressés pourraient s’y lancer individuellement ou dans un cadre coopératif.
A cette fin, les services de l’Etat devront « autoriser la création et le fonctionnement « d’unités de compostage à la ferme dans le respect des réglementations sous-produits animaux (SPAN) et installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) », recommande le CGAAER.
Par ailleurs, « l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) identifiera et évaluera aussi les risques sanitaires et environnementaux que représente l’utilisation comme fertilisant de la laine de mouton en suint ».
Historiquement, les moutons étaient d’abord élevés pour leur laine. Leur viande était un sous-produit. La production de laine perdant son intérêt au cours du 20ème siècle, les éleveurs se sont tournés vers des races produisant principalement de la viande ou du lait.
Pour en savoir plus: file: https://agriculture.gouv.fr/la-valorisation-de-la-laine-et-des-peaux-lainees