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Céréales, attendre les pluies pour évaluer les impacts du déficit en précipitations

Ce début de campagne est marqué par un déficit de précipitations. Il est encore un peu tôt pour en tirer des conclusions définitives sur les conséquences.

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Ce début de campagne se caractérise par un déficit de précipitations qui est toujours présent et ce, pour le quatrième mois consécutif. La sécheresse marquée a eu entre autre, des conséquences sur les modes d’implantation des céréales d’automne ainsi qu’en tendance un décalage de leur date de semis.

Certains secteurs de la région tout particulièrement la façade Atlantique (figure 4) ont reçu des précipitations extrêmement faibles au cours des dernières semaines ayant pour conséquence des levées très retardées et hétérogènes dans les parcelles de céréales semées les plus précocement en octobre. Le tout s’effectuant dans des sols très secs, compte tenu des faibles pluviométries de septembre également.

Figure 1 : climat observé sur la station du Magneraud depuis le 1/09/2016

Figures 2 à 4 : cartes régionales de précipitations ces 3 derniers mois

Des conséquences sur les levées des céréales ?

Il est un peu tôt pour s’inquiéter des faibles peuplements. Il reste souvent des grains dans le sec depuis le semis et qui n’ont pas commencé à germer. Il faudra attendre le retour de pluies significatives pour qu’ils lèvent enfin, l’épisode pluvieux du 4/5 novembre devrait suffire le plus souvent pour assurer des levées correctes (épisode de 10 à 20 mm en tendance).

Les grains inertes peuvent séjourner longtemps dans le sol sans perdre leur capacité à germer. Ces situations sont souvent vécues dans le sud-est de la France : un grain non germé a pu tenir jusqu’à 3 mois (vécu en 2011-2012 dans le sud-est). C’est lorsque le germe est émis mais n’a pas encore émergé à la surface que la plante est la plus vulnérable à la sécheresse. Un blé pointant peut environ tenir 3-4 semaines, sous dépendance de l’humidité de l’air et de la rosée du matin qui maintient les plantes en vie. A de rares exceptions, les semis précoces réalisés dans la région ne sont pas encore dans une telle situation.

Les prévisions météo annoncent également quelques pluies éparses pour cette semaine (du 7 novembre). Il faudra toutefois compter sur des temps de levée plus conséquents également avec la baisse des températures.

Rappelons par ailleurs que les céréales présentent de bonnes capacités de compensation en cas de peuplement faible. Les seuils de peuplement en dessous desquels un retournement peut s’envisager sont aux environs de 80 à 100 plantes/m² réparties de façon homogène selon les espèces.

Dans tous les cas, il est conseillé d’attendre au moins 7 à 8 jours après le retour des pluies pour évaluer la situation de la parcelle, d’autant plus que l’abaissement des températures ralentira les levées.

Et sur le désherbage ?

Le déficit hydrique en cours sur la région entraîne aussi un risque accru de persistance d’herbicides de la culture précédente. Les situations les plus exposées sont les précédents comme le tournesol ou le soja désherbés avec de l’imazamox (Pulsar…), d’autant plus si le traitement a été tardif en fin de printemps. Le risque est jugé significatif si la pluviométrie entre le traitement et le semis de la culture suivante est inférieure à 200 mm, le travail profond (> 15 cm ou labour) permet de réduire ce risque mais là aussi, compte tenu des conditions sèches, des parcelles de céréales peuvent être confrontées à cette problématique. Observez les parcelles et des éventuelles phytotoxicités !

La sécheresse a aussi eu pour conséquence des modifications du mode d’implantation des céréales (suppression d’un travail profond) alors que beaucoup de parcelles étaient très sales en fin de cycle au printemps (relevées tardives notamment de graminées).

Les très faibles pluies de l’été et la persistance du temps sec cet automne n’ont pas permis aux adventices et aux repousses de lever correctement. Certes, on peut constater un décalage général de la date de semis des céréales, ce qui permet en soi de limiter les levées de graminées automnales mais l’efficacité de cette technique est d’autant plus importante qu’elle est couplée à plusieurs faux-semis. Or, faute de pluies suffisantes, les faux-semis, qui consistent en une préparation fine du sol et à un rappuyage pour faire germer les graines d’adventices, n’ont pas pu être correctement mis en œuvre. Les stocks de graines viables sont à ce jour toujours importants dans les premiers centimètres du sol.

Sur certains secteurs, les pluies de fin septembre ont permis de réhumecter le sol en surface. Un travail très superficiel suite à cet épisode pluvieux était judicieux pour faire lever les graminées (ray-grass, vulpins, bromes, pâturins) et certaines dicotylédones. Mais souvent, ce sont les situations où les semis ont été réalisés et les parcelles approchent dans ce cas le stade 1 feuille.

Compte tenu de ces différentes remarques, il faudra être très attentif avec le retour des pluies aux levées d’adventices dans les céréales et tout particulièrement les ray-grass, vulpins… et être très réactif pour un désherbage précoce : soit de prélevée en la positionnant au plus près des pluies annoncées soit sur le créneau 1 à 2 feuilles.

Enfin, on peut souligner que jusqu’à fin octobre, les conditions climatiques (sol sec, souvent motteux et pluie non significative) étaient peu propices à l’efficacité des herbicides racinaires de prélevée. Attendre 3 semaines si un désherbage de prélevée a été réalisé dans le sec pour en mesurer l’efficacité.

A retenir : Des levées d’adventices concomitantes aux levées des céréales seront probablement abondantes et difficiles à maîtriser par le désherbage chimique dans la culture. Pour les parcelles où les graminées sont régulièrement un problème, le désherbage précoce s’impose.

Figure 5 : clés de décision pour le désherbage d’automne

Pas de perturbations pour les pucerons…

Il faut enfin noter que, malgré la sécheresse, les pucerons vecteurs de la jaunisse nanisante de l’orge (JNO) sont très présents dès la levée : les observations faites dans nos essais en semis très précoces montrent que leur présence est déjà significative. Des pucerons ont aussi été observés sur repousses de céréales dans les colzas. Sur semis précoce, leur présence peut justifier des interventions dans les parcelles non protégées par un traitement de semences qui atteignent le stade 1 à 2 feuilles (cas peu fréquents) : soit la population est suffisamment élevée pour justifier l’intervention, soit le nombre de pucerons est modéré mais leur présence persistante peut également justifier le traitement.

 

Thibaud Deschamps, Céline Drillaud, Jean-Louis Moynier (Arvalis – Institut du végétal)

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