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Sondage, les Français ont une bonne image des agriculteurs

Les Français ont une bonne image de l’agriculture et des agriculteurs, ce que ces derniers tendent à sous-estimer. C’est ce qu’explique Pierre Pinault, qui a piloté l’étude d’opinion à la direction de la communication d’InVivo, dans un entretien exclusif accordé à WikiAgri.

Une enquête d’opinion réalisée récemment par l’institut Ipsos pour l’Alliance des coopératives agricoles (ACOOA) était consacrée en particulier à l’image des coopératives agricoles. Elle présente aussi l’intérêt de comporter à la fois un volet grand public, avec un échantillon représentatif de Français interrogés, selon le jargon des sondeurs, et un volet agriculteurs, sur la base d’un échantillon représentatif des agriculteurs français de moins de 60 ans. Elle permet donc de pouvoir comparer la perception des Français et celle des agriculteurs. Or, les résultats de ce baromètre sont clairs, entretien avec Pierre Pinault.

Quelle image les Français ont-ils de l’agriculture et des agriculteurs dans ce sondage, alors qu’une enquête publiée en décembre 2013 (commandée par le Conseil régional de Midi-Pyrénées et réalisée par Harris Interactive) indiquait que, pour deux tiers des agriculteurs, leur métier n’était pas suffisamment valorisé dans la société actuelle ?

P.P. : Les Français, toutes catégories confondues, sont une large majorité à avoir à la fois une bonne image de l’agriculture (77%) et une bonne opinion des agriculteurs (83%). L’agriculture se positionne au deuxième rang d’image positive auprès des Français juste derrière l’aéronautique, Les agriculteurs n’ont pas tous conscience de leur bonne image dans l’opinion, puisqu’ils ne sont que 64 % à estimer que les Français ont une bonne image d’eux (contre 32 % une mauvaise image). Les producteurs de volailles / porcs ainsi que les responsables des plus grosses exploitations sont plus nombreux que les autres à penser avoir une mauvaise image auprès des Français.

Il semble que les Français ont une perception différente de l’agriculture et de l’industrie agroalimentaire. Confirmez-vous cette analyse au vu des résultats du sondage que vous avez commandé ?

P.P. : En effet, les Français ont une moins bonne image du secteur agroalimentaire (48 % de bonne image contre 46 % de mauvaise image), qu’ils dissocient du secteur agricole et associent généralement davantage à des grands groupes industriels et à un secteur fort et puissant économiquement.

Comment les Français voient-ils la situation actuelle de l’agriculture et son avenir ? Sont-ils plutôt pessimistes ?

P.P. : Les Français en général comme les agriculteurs considèrent l’agriculture comme un secteur fragile. Chez les agriculteurs, l’avenir est très faiblement optimiste sur le plan individuel : 54 % sont optimistes pour l’avenir de leur exploitation. Cet optimisme est légèrement plus marqué chez les viticulteurs (59 %) alors que le pessimisme est plus important auprès des éleveurs de volailles et porcs (55 % contre 42 % au global). On observe une légère différence entre adhérents (56 %) et non adhérents (49 %) de coopératives, les adhérents étant plus optimistes. En revanche, les agriculteurs sont majoritairement pessimistes sur le plan collectif (56 % sont pessimistes sur l’avenir des agriculteurs en France). Ce pessimisme est plus marqué chez les viticulteurs (67 %), dans la polyculture – élevage (62 %) et auprès des non adhérents (63 %). Les responsables des plus grosses exploitations (plus de 150 hectares) sont les plus optimistes (50 %, contre 40 % pour l’ensemble des agriculteurs), sans doute mieux armés et plus à même d’adapter leur production à l’évolution de l’agriculture. Chez les Français, si le secteur agricole est considéré comme stratégique concernant l’aménagement du territoire, le commerce et l’emploi, il est aussi jugé économiquement en recul par près de la moitié des Français (44 %), ou en stagnation pour 32 % d’entre eux.

Les Français ont-ils une bonne opinion des coopératives agricoles ?

P. P. : Les coopératives agricoles bénéficient d’un a priori général positif auprès des Français et satisfont très majoritairement les agriculteurs qui en sont membres. La quasi-totalité des Français (93%) déclare avoir une idée de ce qu’est une coopérative agricole, même si seulement 29% en ont une idée précise. Les moins de 25 ans sont peu nombreux à connaître précisément (13%) ce qu’elles sont, contrairement aux plus de 65 ans (43%). Surtout, 8 Français sur 10 (78%) ont une bonne image des coopératives agricoles, toutes catégories confondues. Là encore, les agriculteurs n’en ont pas conscience et portent un regard plus négatif que la réalité, puisque seuls 50 % s’imaginent que les Français en ont une bonne image. Les résultats sont également très positifs chez les agriculteurs, puisque parmi ceux qui sont membres d’une coopérative, plus de 8 sur 10 (83 %) en sont satisfaits et seuls 16% ne sont pas satisfaits. Les adhérents les moins impliqués (24%) sont un peu plus insatisfaits, la satisfaction étant plus forte que la moyenne chez les plus impliqués (89% de satisfaction). Les coopératives agricoles donnent également le signe d’une dynamique économique positive (contrairement au secteur agricole dans son ensemble comme on l’a vu) : 33 % des Français (36 % des agriculteurs) pensent que leur poids est en expansion contre seulement 9 % (13 % des agriculteurs) qui les pensent en recul. Leur poids économique est également perçu comme important aussi bien par les Français que par les agriculteurs, que ce soit au niveau national (respectivement 64 % et 87 %) ou dans les régions (61 % et 87 %). Au final, les Français font davantage confiance aux coopératives agricoles (à 34 %) qu’aux entreprises agricoles classiques. Dans le grand public, le modèle coopératif est spontanément associé à un faisceau de connotations positives (74 % d’entre eux citent un « groupement/ association/partenariat de personnes ») et largement associé à l’agriculture (40 % de citations). Mais ceux qui parviennent à citer les bienfaits concrets de ce modèle sont en revanche moins nombreux, seulement un quart (« la mutualisation, l’aide à la distribution… »). De même, s’ils soulignent de manière massive les avantages multiples du système coopératif, les Français semblent avoir en même temps du mal à les départager et à livrer une image précise du modèle : « mieux défendre les revenus des agriculteurs » (80 %), « renforcer leurs compétences » (77 %), « échanger et acquérir de nouveaux savoir-faire » (77 %), etc.

Dans ce sondage, avez-vous observé des différences significatives entre le point de vue exprimé par les Français et celui des agriculteurs ? Sur quels points en particulier ?

P.P. : Les principaux points de décalage observés sont les suivants : une sous-estimation par les agriculteurs de leur très bonne image dans l’opinion ; une moindre priorisation par les agriculteurs de plusieurs enjeux majeurs assignés par les Français à l’agriculture (nourrir les Français, proposer des produits sains et bon marché, préserver les exploitations familiales qui font vivre les exploitations françaises, privilégier la production bio) ; une sous-estimation par les agriculteurs de la très bonne image des coopératives dans l’opinion, alors que la grande majorité d’entre eux en sont satisfaits ; une moindre proportion de Français vs les agriculteurs qui pensent que les coopératives sont capables de faire face à la concurrence internationale et qu’elles exportent à l’étranger ; une moindre proportion de Français vs les agriculteurs qui ont conscience des efforts entrepris par les agriculteurs en faveur de l’environnement … Mais aussi de nombreux points de convergence entre Français et agriculteurs sur : la perception d’une dynamique positive des coopératives ; l’importance du poids économique des coopératives ; les valeurs humaines, démocratiques, solidaires, responsables, durables, honnêtes des coopératives ; la maitrise de la traçabilité et la sécurité sanitaire des produits proposés par les coopératives ; l’insuffisance de communication des coopératives ; un système coopératif qui a du sens et de l’avenir, en particulier dans la période actuelle.

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