Dans la Nièvre, Thierry Beauvais pratique le semis direct de colza. Il sème sa culture avec un easy-drill et joue la carte des plantes compagnes, notamment du radis chinois et du lotier.
Depuis 2015, Thierry Beauvais pratique le semis direct sur son exploitation située à Pougny dans la Nièvre. Bien présent dans sa rotation avec 55 ha chaque année, le colza n’échappe pas à la règle. Au sein du GIEE Magellan dont il fait partie, cet agriculteur échange avec ses confrères sur son itinéraire cultural concernant cette culture pour l’améliorer d’année en année. Une démarche qui porte ses fruits. Début mars, il était particulièrement satisfait de l’état de son colza semé pour la campagne 2022/2023. « J’ai réalisé des pesées en entrée d’hiver à 2,5 kg, voir 3 kg. Sur mes parcelles limoneuses, je réfléchis à une impasse sur l’apport d’azote suite à des pesées à plus de 4 kg. Ça ne présage pas du rendement à la récolte, mais c’est encourageant » se réjouit l’exploitant. D’autant plus qu’en sortie d’hiver, il n’a pas constaté de dégâts particuliers sur ses colzas bien développés suite aux épisodes de gel important des mois de décembre et janvier.
Réussir son colza pour la campagne 2024
Pour assurer la levée, Thierry Beauvais ne se fixe pas de dates arrêtées pour le semis. « Je suis prêt à semer dès que la moissonneuse-batteuse est passée. Cette année, j’ai attendu le dernier moment pour avoir de l’eau. Les semis se sont déroulés le 11 août et il est tombé 18 mm trois jours plus tard » se souvient-il.
Au-delà de l’importance des précipitations suite à l’implantation, il estime que tout se joue sur le bon contact terre/graine. « Je sème très superficiellement avec l’Easy-Dril de Sky. Il me permet d’obtenir ce contact terre/graine de manière satisfaisante » affirme l’agriculteur.
Il se dit également satisfait de cet outil à disques plutôt qu’un semoir à dent. Celui-ci lui permet de semer sans problème dans les débris de la culture précédente. « J’ai des terres caillouteuses. Je n’ai pas envie d’utiliser une dent qui me remonterait tous les cailloux que j’ai mis des années à enterrer avec le semis direct » précise-t-il.
Pour la préparation du lit de semence, le nivernais reconnaît lui-même ne pas être complètement en semis direct au sens strict du terme. « En général, je réalise un passage avec un outil à disques alvéolés et indépendants sur 1 à 2 cm de profondeur. Mais l’an dernier, j’ai semé en direct sans aucun travail et le résultat était très bon aussi » détaille-t-il. Ce passage de déchaumeur lui permet de gérer les plantes de couverture à l’image de la phacélie, ainsi que les repousses de la culture précédente.
Sur l’exploitation de Thierry Beauvais, la rotation est opportuniste pour s’adapter à l’évolution des conditions agronomiques de la parcelle. Le colza 2023 se positionne ainsi après une céréale, elle-même déjà précédée d’un colza. « Le premier colza n’est pas très beau. J’en ai donc remis cette année pour gérer l’enherbement des graminées » souligne-t-il.
Suite à son passage en semis direct, l’exploitant a installé un couvert permanent de lotier dans ses parcelles. Le colza est implanté en direct dans ce couvert. Chaque année, Thierry Beauvais sème également des plantes compagnes avec son colza. Le principal objectif est de générer un effet parapluie pour désorienter les insectes ravageurs afin qu’ils ne ciblent pas que le colza. « Mais les plantes compagnes ont aussi un effet sur la structure du sol. Elles permettent d’aller chercher en profondeur des éléments tels que le souffre, le phosphore et le cuivre » ajoute l’exploitant.
Parmi les semences utilisées, il cite notamment le radis chinois. Cette plante a l’avantage de geler l’hiver et de ne pas générer de concurrence au printemps. « Je l’utilise à raison de 1 kg/ha. Cette année, elle a encore parfaitement rempli son rôle. En entrée d’hiver, j’ai compté jusqu’à 85 larves d’altises par pied de radis chinois, contre 35 larves/pied de colza. Ce qui n’est pas gênant sur des colzas bien développés » analyse le producteur nivernais.
Au-delà du radis chinois, le colza est généralement accompagné de féverole, de vesces velues et communes, de trèfles d’Alexandrie, ou encore de caméline. « Je m’y retrouve en termes de coût, car la plupart des semences sont auto-produites. Le radis chinois représente une charge assez faible de 5€/ha. D’autant plus que certaines années, les plantes compagnes permettent d’éviter un insecticide » assure Thierry Beauvais. Il se dit cependant vigilant sur la vesce ou la féverole lorsque les gelées ne sont pas assez fortes pour les détruire. « Je n’ai jamais eu de soucis de concurrence à l’automne. L’avoine brésilienne, par exemple, forme un épais tapis qui protège le colza. Au printemps en revanche, la culture doit pouvoir redémarrer rapidement sans être gênée par le couvert. Si fin décembre, il n’y a pas de froid annoncé, je régule les plantes compagnes » explique-t-il.
Timothée Legrand
Les conseils de Terres Inovia
Dans un article publié en août 2019 sur le site de l’institut technique, les ingénieurs Terres Inovia Gilles Sauzet et Stéphane Cadoux reviennent sur les clés de réussite d’un colza en semis direct. La première d’entre elles étant la structure du sol. Cette dernière doit être poreuse sur les 20 premiers centimètres pour garantir un bon enracinement du pivot. Les deux auteurs préconisent un test bêche dans la culture précédente pour s’en assurer. Côté ravageur, la parcelle doit présenter un faible risque limace et ne pas abriter de rongeur.
Afin d’assurer la réussite du semis, les deux ingénieurs Terres Inovia proposent un « semis précoce, car les levées sont généralement plus lentes et à moins de 6 km/h pour limiter le flux de terre ». Pour gérer les résidus de la culture précédente, ils préconisent l’utilisation d’une herse à paille afin d’homogénéiser la parcelle et de réaliser l’implantation avec un chasse débris efficace dans le but de nettoyer la ligne de semis.