Si le progrès génétique permet de gagner tous les ans plus d’un quintal en maïs et un demi-quintal en tournesol, c’est parce que les semenciers proposent de nouvelles variétés, à la fois performantes et résilientes.
C’est un savoir-faire mondialement reconnu : la France excelle pour la création variétale et pour la qualité des semences (pureté, faculté germinative), avec à la clé, une réelle valeur ajoutée. « La France est le premier producteur européen et le premier exportateur mondial de semences, toutes espèces confondues », chiffre l’Union française des semenciers (UFS). La filière semences génère 3,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires et près d’un milliard d’excédent commercial.
Avec une production annuelle de 240 000 tonnes de semences de maïs, la France est le 1er producteur européen mais aussi 1er exportateur mondial. Les conditions pédoclimatiques variées permettent de tester et de produire les variétés dans différents contextes. Si le critère de base reste le rendement, la sélection intègre également la capacité d’une variété à gérer les à-coups climatiques, sa résistance aux stress abiotiques. Face à un repli des solutions phytosanitaires, il faut aussi trouver des variétés tolérantes aux maladies et ravageurs.
« En complément, nous travaillons aussi sur la vigueur de départ pour que la plante dépasse rapidement son stade de vulnérabilité, par exemple aux ravageurs », explique Laurent Loncle, chef produit maïs Advanta. 2020 devrait voir augmenter les surfaces en multiplication, pour reconstituer les stocks (sur 2019 seulement 90 % de l’objectif de production a été atteint) et répondre à une demande européenne en hausse.
En tournesol aussi, la France est leader. Elle est le 1er sélectionneur mondial et elle représente 80 % du potentiel de recherches européen. Alors que le besoin intérieur est de 32 000 quintaux de semences certifiées, la France en produit 170 000. Il y a beaucoup d’export vers l’Europe de l’Est et la Russie.
Dans le choix de nouvelles variétés, les sélectionneurs tiennent compte du rendement et de la teneur en huile, mais aussi des résistances aux stress et maladies (mildiou, sclérotinia, phomopsis). « Nous avons aussi intégré l’orobanche car le risque émerge en France », complète Sylvain Lascabettes, chef de produit tournesol chez Syngenta. Sont également proposées des variétés tolérantes aux herbicides (comme la marque de BASF, Clearfield ; sulfonylurées). « C’est une solution intéressante quand des flores complexes sont présentes, sans solution efficace, par exemple face à l’ambroisie en Rhône-Alpes », note Sylvain Lascabettes.
Plusieurs dizaines d’entreprises, de la PME à la multinationale, font de la création variétale en France. Si la sélection reste fondée sur le croisement de lignées, elle s’appuie sur de nouveaux outils, de lecture et d’analyses de données, pour trouver plus rapidement les plus intéressantes.
« La sélection assistée par marqueurs moléculaires facilite et accélère la détection des caractères d’intérêt », souligne Laetitia Hamot, chef produit maïs grain chez KWS. Pour autant, la sélection reste un travail au long court. Il faut en moyenne 8 à 10 ans pour obtenir une nouvelle variété, ce qui implique une certaine anticipation de la part du sélectionneur.
Si les obtenteurs « lisent » le génome, ils ne le modifient jamais mais valorisent les mutations naturelles. « Il y a une réelle volonté de transparences des sélectionneurs sur les outils qu’ils utilisent, précise l’UFS. Par ailleurs, la profession semencière appelle à un plus grand soutien des Pouvoirs Publics en faveur de la création variétale, car, elle est un moyen de répondre à la diversité des attentes des agriculteurs et des citoyens. Cela implique que nos entreprises soient en capacité d’innover et d’utiliser les méthodes de sélection appropriées pour trouver les variétés de demain. »
Etape indispensable entre la sélection variétale et la distribution, la multiplication des semences est aussi faite en France, reconnue par sa qualité irréprochable en termes de pureté, de traçabilité et de facultés germinatives. Si quelques entreprises jouent sur une production en contre-saison, en Amérique Latine, c’est lors du parcours de sélection variétale, afin de pouvoir tester une variété deux fois dans l’année ou pour rattraper des productions insuffisantes en France. Mais peu des semences utilisées en France sont produites ailleurs, déjà pour des aspects de coût logistique. « Quand ce choix est fait, chaque entreprise doit vérifier que la semence réponde bien aux exigences réglementaires, souligne Erwan Bougouin, de Mas Seed. Nous allons souvent au-delà pour assurer aux agriculteurs les semences de la meilleure qualité possible. »
Dekalb. La campagne 2020 verra arriver les premières variétés mises au point grâce au concept E-breed, fondé sur des algorithmes qui, au regard de marqueurs moléculaires, évaluent les croisements les plus pertinents. « Avec E-breed, on gagne du temps. On teste moins de croisement mais dans plus de situations, ce qui nous permet de nous assurer de la stabilité de la variété, explique Jean-Marie Lézé, chef de marché maïs grain. D’où un gain génétique supérieur de 30 % par rapport au gain moyen du marché. » Deux variétés se démarquent : DKC 4391, créneau G2 et DKC 4598, sur le créneau G3, variétés au très bon rendement même en situation stressante.
KWS. Parmi les cinq nouvelles variétés, deux se détachent : KWS Gustavius, variété dentée très précoce, avec une bonne vigueur de départ, et un rendement intéressant et KWS Jaïpur, groupe G1, corné denté performant et régulier. Une arrivée en G4 est en cours d’inscription pour les semis 2020.
Advanta. Sur le groupe G1, Adevey reste la référence, notamment face au stress hydrique. Volney permet d’aller chercher de hauts rendements dans les sols à potentiel. Joffrey, plus précoce, est reconnue pour sa qualité semoulière. Précommercialisés en 2019, Crosbey, G0, et Humphrey, G1, sont très réguliers en rendement et tolérants à la verse. Huxley a une bonne vigueur de départ et peut être valorisé en fourrages comme en grain.
Par ailleurs, le semencier propose désormais des variétés bio dans tous les créneaux de précocité.
RAGT. Sont à noter pour la prochaine campagne, sur le groupe G2, RGT Inedixx, qui résiste bien au stress hydrique et sur le groupe G3, RGT Texero, tous les deux avec du potentiel de rendement et un bon comportement en toutes situations.
Mas Seed. Pour la prochaine campagne, la protection de semences à base du biostimulant Agrostart sera disponible sur toutes les variétés. Lancement de nouveaux hybrides, sur le créneau linoléique précoce, les variétés DT 5008 et DT 5018 ; en demi-précoce linoléique Mas 98 K, dont la notation Terres Inovia affiche 107,4 % de rendement. En oléique, deux nouveautés, le DT 3308.OL, précoce et le DT 3318.OL en demi-précoce. S’ajoutent à la gamme bio, Mas 81.K, linoléique précoce, et Mas 82.OL, oléique précoce.
Syngenta. Pour la prochaine campagne, Syngenta lance trois oléiques non VTH : SY Celesto, demi-précoce, stable, performant et tolérant midiou, verticillium et orobanche ; SY Octavio, plus précoce, avec également une bonne tolérance aux maladies ; SY Genio, demi-tardif, pour aller chercher du rendement sur les parcelles à potentiel.
RAGT. RGT Buffalo reste la variété phare de la RAGT en oléique. Il sera complété en linoléique par RGT Donatello.
MAÏS |
TOURNESOL |
France 1er exportateur mondial |
France 1er pays producteur de l’Union européenne |
68 500 ha en multiplication |
20 000 ha en multiplication |
2 400 000 q de semences certifiées, dont 60 % sont exportées |
170 000 q de semences certifiées, dont plus des deux tiers sont exportées |
4 000 agriculteurs multiplicateurs |
2 000 agriculteurs multiplicateurs |
Catalogue de 1800 variétés + 90 nouvelles/an |
Catalogue de 180 variétés + 20 nouvelles/an |
Cécile Julien