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Pac, l’Europe et la France à contresens de l’histoire

Le saviez-vous ? L’Europe est la seule grande région du monde à réduire ses dépenses en faveur de l’agriculture. Avec tous les dangers que cela comporte…

Depuis 1992 et ses différentes réformes, le grand public a une image très négative de la Pac. En effet, le graphique ci-dessous présente l’évolution de la part du budget alloué à la Pac depuis 1985 jusqu’en 2008 (source Commission Européenne, DG Agri). Presque 50 % du budget de l’Europe est consacré à l’agriculture ! Le pourcentage parait démesuré aux yeux de la part économique que représente l’agriculture au sein de l’Europe : environ 1,5 % du PIB en 2013 (sources précisées en fin d’article).

Cependant, il convient de ne pas s’arrêter à cette première lecture du budget de la Pac : l’agriculture est la première et la seule compétence qui a été pleinement transmise à l’échelon européen. La santé, l’éducation et toutes les fonctions régaliennes restent des missions assurées par les Etats membres sur leur propre budget. Il faut donc vérifier quelle part du budget français est réellement dédiée à l’agriculture.

En France, un budget agricole loin d’être aussi pléthorique que l’on pense

D’après la loi de finance française 2014, la mission agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales représente 3,2 milliards d’euros pour 2014, auxquels il faut ajouter 45 % des 20,2 milliards d’euros collectés au titre du budget européen (qui seront effectivement affectés à la Pac). Le total de dépenses consacrées à l’ensemble des missions reliées à l’agriculture pour la France est donc de 23,4 milliards d’euros.

Le total des dépenses recensés dans la loi de finance 2014 est de 407,4 milliards d’euros pour l’ensemble des missions, plus 195,2 milliards d’euros pour les dépenses spéciales, soit 605,6 milliards d’euros. L’agriculture, l’alimentation, la pêche, la forêt et les affaires rurales représentent donc en réalité 3,8 % du budget de la France, bien loin des 9,5 % consacrés par l’Etat aux pensions de retraites, ou aux 10,7 % à l’éducation.

Au niveau mondial, l’Europe a souvent été montrée du doigt lors des différents cycles de négociation de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) pour ses soutiens à l’agriculture. Il est dès lors aisé de comprendre les efforts d’adaptation de la Pac à une politique de dérégulation des marchés en regardant le graphique présenté ci-dessous :

Evolution des dépenses de la Pac Source : DG Agri

L’effet de la réforme de la Pac en 1992 est bien visible, réduisant fortement les supports directs au marché par l’abaissement des seuils d’intervention. La réforme de 2003 est venue réduire les paiements directs au profit des paiements découplés. L’Europe a aussi consenti beaucoup d’efforts pour le développement rural, et a finalement presque supprimé le système d’aides à l’exportation.

Ces efforts de réduction, ou de contrôle, des dépenses agricoles ont eu des objectifs qui ont évolués avec le temps. Il s’agissait d’abord de limiter l’impact des subventions sur le marché mondial depuis la réforme de 1992. L’agenda 2000 y a ajouté l’objectif du développement durable.

L’Europe, seul bon élève de l’OMC

L’Europe est malheureusement le seul bon élève de l’OMC aujourd’hui : nous sommes les seuls à abandonner les mécanismes de régulation et de soutiens aux marchés agricoles. Le think thank Momagri a mis au point un indicateur pour mesurer les soutiens publics à l’agriculture (baptisé SGPA). L’Europe est la seule région au monde à se désintéresser de l’agriculture ! En effet, sur 5 ans les soutiens publics à l’agriculture se sont réduits de 17 % en Europe, alors qu’ils augmentaient de 40 % aux Etats-Unis, et même de 89 % en Chine ! Il est d’ailleurs alarmant de constater que des pays régulièrement présentés comme vertueux en matière de soutiens publics à l’agriculture dépensent finalement plus par habitants pour soutenir leur agriculture que l’Europe. Par exemple, le Canada, membre du groupe de Cairns, suit une trajectoire opposée à celle pratiquée en Europe aujourd’hui.

Source : Momagri

Le printemps arabe a montré l’importance de la notion d’indépendance alimentaire en faisant vaciller et tomber plusieurs régimes dans le monde. L’Europe aurait tort de penser que ces notions appartiennent au passé. En effet, la raréfaction des terres combinée à l’augmentation de la population mondiale sont des tendances de fond que l’on ne maitrise pas. L’alimentation et l’agriculture, au même titre que la sécurité nationale, sont des secteurs d’importance stratégique majeure aujourd’hui qui ne peuvent pas être relégués au second plan.

En savoir plus : www.statistiques-mondiales.com (source des chiffres fournis en début d’article) ; http://momagri.org (source du dernier schéma).

La photo ci-dessous représente le Parlement européen et est issue de la page Facebook https://www.facebook.com/europeanparliament.

2 Commentaire(s)

  1. Nos dirigeants veulent religieusement convertir notre pays ou l’on puisse vivre sans aucunes pollutions, mais avec le pétrole et les centrales nucléaires qui rapportent énormément au gouvernement .

  2. Concernant l’utilisation qui est actuellement faite des fonds de la PAC, je n’ai pas d’avis aussi tranché que vous.

    Cependant, même si le projet est de réduire drastiquement la pollution, les efforts ne sont sûrement pas au niveau de l’enjeu !

    Je pense qu’on met beaucoup d’objectifs à la PAC :
    – autosuffisance alimentaire,
    – respect de l’environnement et maintien de la biodiversité,
    – réduction des GES,
    – réduction des distorsions commerciales entre régions et pays,
    – maintien d’une agriculture paysanne,
    – favoriser l’installation des jeunes…

    Et tout ça en coupant années après années le montant du budget PAC.

    Les objectifs en cascade ne peuvent être tous tenus dans un contexte de réduction de l’effort.

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