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Orges d’hiver, le bilan de campagne 2015-2016

Avec un début de campagne optimal pour les orges d’hiver, les conditions climatiques du printemps 2016 ont tout remis à plat, pour une récolte, au final, extrêmement décevante. Retour sur cette saison 2015-2016 atypique.

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Un automne doux offrant des conditions optimales pour l’établissement des premières composantes de rendement

Les orges d’hiver, semées majoritairement lors de la première quinzaine d’octobre, ont bénéficié d’un automne très doux jusque décembre et d’une pluviométrie plutôt faible (figure 1).

Figure 1 : cumuls de températures et de pluies du 01/10/2015 au 10/01/2016 – station de Fagnières (Marne)

Les conditions de levée ont donc été globalement bonnes (quelques stress hydriques ont pu avoir lieu dans les sols les plus superficiels). La création de biomasse a également été excellente cet automne : dans les essais Arvalis – Institut du végétal menés en craie (Marne et Aube), le nombre de tiges de plus de 3 feuilles/m² atteignait en moyenne 1000 tiges/m² en sortie d’hiver.

Les conditions douces de cet automne ont donc favorisé le développement phénologique des orges d’hiver [biomasse importante, stades de développement en avance], mais ont aussi permis aux pucerons, principal vecteur du virus de la jaunisse nanisante de l’orge, de se maintenir sur les parcelles pendant les mois de novembre et décembre, au-delà de la période de rémanence des traitements de semences insecticides. Ainsi, un nombre non négligeable de parcelles présentaient des symptômes de JNO en sortie hiver. Des interventions en végétation permettaient néanmoins de limiter les contaminations.

Les conditions plus fraîches de mars ont provoqué un ralentissement des stades, ramenant l’année 2015-2016 à 5 jours d’avance pour le stade épis 1 cm (21,03 en moyenne) en comparaison à une moyenne pluriannuelle de 15 ans.

Un printemps très humide et frais, avec un rayonnement globalement limitant

Le potentiel de rendement élevé à la fin d’avril est rapidement remis en question avec les conditions climatiques du printemps.

Montaison allongée

La période épis 1 cm – épiaison s’est déroulée sur environ 48 jours, soit 7 jours de plus que la moyenne, sans stress hydrique notable. Ainsi, la densité d’épis est correcte avec plus de 600 épis/m² (variété Etincel) dans les essais ARVALIS (figure 2).

Figure 2 : nombre réel d’épis/m² en fonction du nombre de plantes/m²
Source : sites Arvalis, historique et année 2016

La montaison est également la période où s’élabore la fertilité épi (nombre de grains par épi). Plusieurs évènements climatiques ont participé à l’altération de cette composante de rendement, qui cette année, dans nos essais est de l’ordre de 30-35 grains par épi :
• les températures fraîches de la dernière décade d’avril ont pu impacter la fertilité (figure 3) : cette période coïncidait en effet avec la méiose, pour laquelle le seuil de température critique est de +4°C (les températures minimales ont pu localement descendre en dessous de -3°C).

Figure 3 : T°C minimales à méiose du 20 au 30 avril 2016

• les pénalités sur le rendement dues aux températures basses ne s’expriment que lorsque le rayonnement est < 200 cal/cm²/jour. Le rayonnement était globalement faible sur les mois de mai et juin (en comparaison à la moyenne pluriannuelle), mais a rarement été inférieur à 200 cal/cm²/jour. Au final, le rapport rayonnement/températures entre 2 nœuds et floraison reste correct : les températures fraîches subies par les plantes n’impliquaient pas des besoins importants en rayonnement pour leur croissance.

Fraîcheur, humidité et manque de rayonnement en mai-juin impactent la floraison et le remplissage

Les mois de mai et juin ont été marqués par les excès d’eau et le manque de rayonnement, d’autant plus impactant pour les cultures que ces conditions climatiques ont persisté sur plusieurs semaines. Ainsi, sur le secteur de Châlons, près de 230 mm de pluie (figure 4) sont tombés en 2 mois (pour une pluviométrie annuelle d’environ 650 mm). Les réserves utiles des sols se sont retrouvées saturées (figure 5). Le drainage a repris, fait exceptionnel à cette époque de l’année.

Figure 4 : cumuls de températures et de pluies du 01/05/2016 au 30/06/2016 – station de Fagnières (Marne)


Figure 5 : évolution de la réserve utile des sols du 01/10/2015 au 10/07/2016 – station de Fagnières (Marne)

En parallèle, le rayonnement est bas sur ces deux mois et largement en dessous de la médiane pluriannuelle 1991-2015 (figure 6).

Figure 6 : rayonnement cumulé du 01/10/2015 au 20/07/2016 – station météo de Fagnières (Marne) – INRA

La phase de remplissage des orges d’hiver est donc impactée dès le départ, la taille des enveloppes des grains étant prédéterminée par la quantité de rayonnement interceptée par les plantes. Le PMG, le calibrage qui en découle et le PS sont directement touchés : sur les essais Arvalis – Institut du végétal, les PMG sont de l’ordre de 35 grammes, les PS n’excèdent pas 60 kg/hl et les calibrages sont hétérogènes en fonction des variétés.

Les conditions climatiques humides ont malheureusement favorisé le développement des maladies foliaires, en particulier celui de la rhynchosporiose. Des grillures polliniques ont par ailleurs fréquemment été signalées.

L’écart de rendement traité-non traité moyen est de 14,7 q/ha, sur 5 essais Arvalis – Institut du végétal [51/36/80/91/55] : une nuisibilité finale en cohérence avec les symptômes observés.

Une récolte décevante

Bien que les conditions automnales aient placé la récolte 2016 sur de hauts potentiels, les rendements ne sont pas au rendez-vous, dégradés par les conditions climatiques de fin de cycle. Sur le territoire de Champagne-Ardenne, les rendements s’échelonnent entre 35 et 75 q/ha, avec une moyenne aux alentours de 60-65 q/ha. Les taux de protéines sont entre 10 et 12,5 %.

Alexis Decarrier, Mélanie Franche, Philippe Hauprich (Arvalis – Institut du végétal), Bastien Remurier (Arvalis – Institut du végétal).

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