Le prix du lait en Europe ne se redressera pas sans apurement de l’offre. Pas au niveau mondial où la production laitière néo-zélandaise fléchit et celle des Etats-Unis reste stable. Non, l’apurement de l’offre devra être concrétisée en Europe.
Le secteur n’en prend aucunement le chemin, comme le montre la dernière note de l’Institut de l’Elevage, Tendances (n° 265 de février). Dans les cinq zones d’exportations de produits laitiers (Australie, Argentine, États-Unis, Nouvelle-Zélande et UE 28), la collecte « a progressé en moyenne de 500 000 tonnes par mois au second semestre de 2015 », relève l’Institut. Et qui a réalisé cette collecte supplémentaire « supérieure à l’évolution de la demande en produits laitiers sur le marché mondial » ? L’Union européenne : + 5 % entre l’automne 2014 et celui de 2015.
60 % de ce lait supplémentaire a été produit en Allemagne, aux Pays-Bas et en Irlande. En Allemagne qui dispose d’un cheptel de 4,3 millions de vaches en lactation, le prix du lait stabilisé au-dessus de 280 euros pour 1000 litres ne freine pas les producteurs (+ 4 % sur le dernier trimestre de 2015).
« Même si de nombreux éleveurs produits (…) à perte, ils estiment moins perdre en produisant plus », observe l’Institut de l’Elevage. L’approche économique est la même aux Pays-Bas qui a vu sa collecte augmenter de 17 % en décembre et de 14 % sur les six derniers mois de 2015. Clairement, ils stimulent leur production par l’augmentation des effectifs en production (+ 3,5 % sur 2015, + 11 % en cinq ans) et la saturation de leurs outils. Les Néerlandais bénéficient, il est vrai d’une transformation efficace qui les rémunère à 327 euros pour 1000 litres en moyenne.
Quant à l’Irlande, sa « collecte automnale a bondi de 33 % » sous l’effet d’un cheptel laitier augmenté de 6 % en un an et du prolongement de la durée de lactation des vaches. L’hiver particulièrement doux au pays du trèfle a évidemment joué. L’abondance d’herbe leur donne un avantage économique certain. A 278 € pour 1 000 litres en prix de base, le lait reste attractif ; le point mort moyen (prix du lait couvrant les charges avant rémunération du travail) se situe en effet à 230 euros, selon l’Institut.
Eh bien elle « fait pâle figure » (+ 1 %) malgré « une très bonne arrière-saison climatique propice à la pousse de l’herbe et au pâturage, (des) effectifs conséquents de génisses (…) entrées depuis en lactation ». Pour autant, il ne s’agit pas d’augmentation du cheptel mais de son renouvellement (3,7 millions de têtes au 1er janvier 2016, soit 1 % de moins en un an). Pour l’Institut, « la timide croissance (de) 2015 découle (…) de l’encadrement serré par les transformateurs laitiers, en particulier les collecteurs « non coopératifs » (qui), faute de débouchés, (…) incitent leurs livreurs à respecter strictement leur référence contractuelle. »
Mais, à pénaliser la production, c’est le revenu qui en pâtit. En 2015, l’Institut estime que les éleveurs laitiers ont perdu en moyenne 15 % de leurs recettes du fait de la baisse du prix du lait standard à 309 € pour 1000 litres. C’est moins qu’en Allemagne (- 23 % de recettes) et qu’aux Pays-Bas (- 17 %). Mais le sentiment d’appauvrissement est réel. Le prix a encore glissé en janvier et février en France, avec un prix moyen de 290 € pour 1 000 litres. Il cache des disparités importantes (de 260 à 310 €), selon le mix produit des laiteries.
Notre photo ci-dessous montre une ferme laitière allemande, et est issue du site Fotolia. Lien direct : https://fr.fotolia.com/id/75758188.