La recherche biotechnologique est victime de l’obsolescence de la directive 2001/18/CE. La Cour de justice de l’Union européenne assimile les produits issus de l’édition génomique à des OGM de première génération, compte tenu des techniques employées et des risques liés à l’emploi de ces nouvelles technologies.
Les agriculteurs n’ont pas les variétés de blé à leur disposition pour produire 900 millions de tonnes de blé par an d’ici 2050. Or, cet objectif fait partie des défis planétaires à relever pour nourrir 9 à 10 milliards d’êtres humains. Et l’Association française des biotechnologies végétales (AFBV) comptait sur l’édition génomique, et en particulier la méthode CRIPR/cas9 pour accélérer la recherche variétale et mettre au point de nouvelles variétés de céréales et de blé en particulier.
L’édition génomique permet en effet d’effectuer des modifications génétiques ciblées dans tout type de cellule, grâce à des ciseaux moléculaires.
Les modifications apportées arrêtent le fonctionnement de gêne ciblé (SDN1) ou modifient ses propriétés et sa fonctionnalité (SDN2). Aucun gène étranger n’est introduit.
Des plantes deviennent ainsi résistantes au mildiou ou à la sécheresse, par exemple.
Or la décision rendue le 25 juillet dernier par la cour de justice de l’union européenne (CJUE) restreint une fois de plus le champ de la recherche variétale. En effet, la CJUE estime que les produits issus de l’édition génomique sont soumis à la directive 2001/18/CE du fait « que les risques liés à l’emploi de ces nouvelles technologies pourraient s’avérer analogues à ceux résultant de la production et de la diffusion d’OGM par voie de transgénèse ». Comme si de nouveaux gènes avaient été introduits.
Par cette décision, les industriels semenciers craignent que l’agriculture européenne et française ne soit pas en mesure de relever les défis climatiques et alimentaires faute de variétés adéquates.
Aux Etats-Unis, 70 produits issus de l’édition génomique sont en cours de validation. En Chine, plus de 80 % des dossiers variétaux sont le fruit de cette méthode de recherche.
« Les pays qui planteront les nouvelles variétés céréales issues de l’édition génomiques seront en mesure d’être plus compétitifs que ceux qui interdisent les méthodes pour les mettre au point », affirment l’AFBV.
Celle-ci souligne que la recherche biotechnologique est la seule voie pour produire plus et mieux en consommant moins d’intrants. Les retours sur plantations d’Ogm montrent que ces cultures remplissent les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, en mobilisant plus de CO2 tout en réduisant le nombre d’interventions dans les champs et en limitant le recours aux produits de protection des plantes. Or l’ambition de a France n’est-elle pas de réduire l’utilisation de produits phytosanitaires de 50 % ?
« A ce jours, 100 000 tonnes de produits phytosanitaires sont épandues sur les 600 000 hectares de maïs pour lutter contre la pyrale », observe l’AFBV.
En fait, la décision de la CJUE relance les débats sur ce que sont les Ogm au regard de la réglementation européenne, les OGM que les agriculteurs bio européens refusent d’employer. Or, en dehors de l’Union européenne, certaines variétés de plantes issues de l’édition génomique sont tout à fait compatibles avec ce mode de production et les produits récoltés sont exportés vers le marché européen comme produits bio !
Selon les techniques employées pour les obtenir, deux plantes identiques pourraient aujourd’hui être assimilées, ou pas, à un OGM. « La variété de blé Renan, principalement utilisée en agriculture biologique, serait aujourd’hui classée Ogm si elle avait été obtenue avec les techniques biotechnologiques actuelles », affirme l’AFBV.
La décision du 25 juillet dernier de la CJUE relance aussi les débat sur le modèle agricole qu’il serait souhaitable de développer. « Or, une agriculture planétaire passée intégralement au bio ne serait pas en mesure de nourrir la population, rapporte l’AFBV. En France, un hectare de blé bio produit 3,5 tonnes de grain contre 7 tonnes en agriculture conventionnelle. »
Prenant acte de la décision de la CJUE (qui est appliquée dans tous les pays membres de l’Union européenne), l’AFVB a demandé dans une lettre ouverte adressée à la Commission européenne de mettre en place une procédure spécifique pour les plantes issues des nouvelles technologies.
A long terme, l’AFBV estime « que la Commission devrait engager une procédure de révision complète de la réglementation sur les organismes génétiquement modifiés et plus particulièrement pour les plantes ».
Cette révision vise à harmoniser les différentes directives et règlements sur les OGM en vigueur dans l’UE et à prendre en compte les connaissances acquises durant les vingt dernières années de commercialisation des plantes génétiquement modifiées.
Dans les pays où les plantes issues de l’édition génomique ne sont pas assimilées à des Ogm, les récoltes seront mélangées aux autres produits issus de l’agriculture conventionnelle. Aussi, l’Union européenne pourrait importer des produits qu’elles assimilent à des OGM lorsqu’ils sont enregistrés à ses frontières alors qu’ils ne l’étaient pas au départ des pays exportateurs. Ils sont donc vendus comme des produits conventionnels.
L’AFBV a aussi saisi le conseil d’Etat de sursoir « à toute décision concernant les plantes tolérantes aux herbicides tant que la commission européenne ne se sera pas exprimée sur les questions soulevées auprès des organisations européennes » et exposées précédemment.
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« A ce jour, 100 000 tonnes de produits phytosanitaires sont épandues sur les 600 000 hectares de maïs pour lutter contre la pyrale », observe l’AFBV.
Cela ferait 166 kg/ha ! Même en comptant l’eau, sachant qu’une grande partie des champs ne sont pas traités, il me semble que quelque chose cloche dans cette estimation.
Cela dit, je suis d’accord sur le fond de l’article, mais les bonnes causes méritent être bien défendues.