broyeur

Couverts végétaux, un exemple dans le nord de la France

Une journée organisée en décembre par le Geda de l’Artois (dans le Pas-de-Calais) donne l’opportunité de s’intéresser aux couverts végétaux. Du règlement aux démontsrations de matériels, en passant par des résultats d’expérimentations sur les impacts agronomiques des couverts.

Retour sur le cadre réglementaire. Dans directive européenne n°91/676/CEE de 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles, le Code de Bonnes Pratiques Agricoles conseillait le « maintien d’une quantité minimale de couverture végétale au cours des périodes pluvieuses ». Depuis le 4e programme de la directive nitrate, toutes les parcelles situées en zones vulnérables doivent être couvertes à l’automne.

La mise en place des couverts végétaux, considérée au départ comme une simple obligation, est de plus en plus considérée comme un atout par les exploitants. Afin de valoriser au mieux cette interculture, leur gestion doit être pensée comme celle d’une culture à part entière, et les groupes de réflexion se multiplient sur ce thème, en agriculture conventionnelle comme en non-labour.

Dans le Nord-Pas-de-Calais, le Geda (groupe d’études et de développement agricole) de l’Artois répond aux questions techniques  et réglementaires de ses 190 adhérents. Laurent Devochelle, jeune conseiller en productions végétales, a récemment organisé des formations sur le thème de la gestion des couverts végétaux. « Notre mission de développement agricole nous pousse à passer de la « contrainte règlementaire » des couverts  à un « outil agronomique a part entière ». L’objectif est d’améliorer le seul outil indispensable à chaque exploitant : son sol ».  Avec l’entrée en vigueur du 5e programme d’actions zones vulnérables, un point sur la règlementation était nécessaire pour permettre aux agriculteurs de replacer les évolutions dans le contexte de leur exploitation. « En parallèle, Pierre Mortreux de la Chambre d’Agriculture publiait les résultats de 10 années d’essais sur les couverts, et nous souhaitions présenter les différentes techniques de destruction » précise le conseiller.

Toutes les plantes ne sont pas des Cipan

Concernant les Cipan (cultures intermédiaires piège à nitrates). L’azote est fixé par les bactéries Rhizobium présentes sur les racines des légumineuses. Leur capacité de fixation dépend de leur développement (biomasse) et de la quantité d’azote à leur disposition.  Exemple : les légumineuses, (utilisées en mélange comme CIPAN) se caractérisent par leur capacité à fixer de l’azote mais plus elles trouvent d’azote dans le sol, moins elles fixent d’azote atmosphérique (on dit parfois qu’elles deviennent « paresseuses »).

Plus un couvert est développé, plus il contient de l’azote

On s’y attendait : le bénéfice environnemental des cultures intermédiaires, à savoir leur capacité à piéger l’azote présent dans le sol pour éviter son lessivage, augmente avec la biomasse produite. Les résultats de la Chambre d’agriculture Nord Pas-de-Calais ont montré qu’en moyenne, à la mi-novembre, les couverts ont piégé 26 kg d’azote par tonne de matière sèche. Cela pour une restitution d’humus, une stimulation de la vie du sol et une diminution de la battance. Attention toutefois, la biomasse, en particulier lorsqu’elle est lignifiée, peut poser des problèmes à la destruction. Le créneau de semis à retenir pour les régions du Nord de la France est du 20 août au 10 septembre ; au-delà, les conditions climatiques deviennent limitantes.

Toutes les plantes ne se développent pas de la même manière: la moutarde blanche, la phacélie ou le radis fourrager, atteignent environ 2 à 3 tonnes de matière sèche en 2 à 3 mois. Ce sont les champions confirmés de la production de biomasse. Les graminées, un peu moins vigoureuses au départ, ont au final un potentiel similaire. L’avoine fourragère est intéressante, comme l’avoine rude et le seigle. Les repousses peuvent atteindre des développements corrects (1,4 tonne de matière sèche par hectare) mais posent la question du parasitisme. D’autres plantes, comme le tournesol, le lin ou la cameline, peuvent produire des biomasses importantes mais en mélange.

Les essais montrent que les mélanges graminée + légumineuse ou crucifère + légumineuse produisent une biomasse plus importante en semis précoces (avant le 25 août) et en conditions limitantes en azote, lumière et chaleur. En dehors de ces conditions la biomasse produite est inférieure à celle des couverts simples et induit des surcoûts en semences et des complications en termes de semis et de destruction. Le seul avantage pourrait être le bonus agronomique apporté par les légumineuses qui permettent une mise à disposition de l’azote pour les cultures suivantes… pour autant qu’elles soient assez développées ! La féverole est toutefois la légumineuse la plus adaptée aux semis tardifs des régions du Nord de la France, car elle se développe rapidement. Elle se comporte bien avec l’avoine (le mélange est possible dans un semoir) voir avec la moutarde, mais il faut alors décomposer le semis.

Bénéfices sur le lessivage ou sur la fertilisation, il faut choisir 

Selon que l’on souhaite favoriser le piégeage des nitrates ou maximiser l’effet « précédent » dont la restitution d’azote à la culture suivante, on ne sèmera pas les mêmes espèces. A savoir : la règlementation impose de ne pas dépasser 2/3 de légumineuses dans le mélange, seuil au-delà duquel le piégeage d’azote sera trop faible. Les Cipan classiques (moutarde, phacélie, avoine) prélèvent l’azote et limitent donc le reliquat azoté en sortie d’hiver, alors que les légumineuses n’ont pas d’impact (ni positif, ni négatif) sur les nitrates. Les mélanges comportant des légumineuses et des Cipan ont un effet intermédiaire, qui varie selon le développement des plantes dans le mélange, de l’ordre de 25 à 30 unités d’azote économisées pour la culture suivante. Garder à l’esprit que l’avantage agronomique des légumineuses est contrebalancé avec le coût de la semence et une réussite conditionnée par un semis précoce.

Impact sur le rendement de la culture suivante

Un couvert bien géré n’engendre pas de conséquence négative pour la culture suivante, que ce soit en termes de productivité comme de qualité. En revanche, l’impact sur la rotation, les cultures voisines, le parasitisme… est beaucoup moins bien cerné. Une idée répandue est que les Cipan ont un effet néfaste sur la culture de pomme de terre. Les essais ont montré que les couverts entraînent un rendement égal voire légèrement supérieur, et des résultats aussi satisfaisants sur la qualité

Des méthodes de destruction qui conditionnent les bénéfices

Pour créer une véritable vitrine des différentes modalités de destruction de Cipan, le Geda de l’Artois s’est appuyé sur le lycée agricole de Tilloy-lès-Mofflaines: mise en place de la plateforme, mise à disposition de locaux et prêt de matériels pour la démonstration, le lycée est un solide partenaire pour le Geda. Ce dernier s’est également appuyé sur ses adhérents et administrateurs pour compléter l’éventail de matériel et assurer la logistique de la manifestation. Pour disposer des dernières innovations techniques et technologiques, des concessionnaires locaux ont également apporté leur contribution à la démonstration en présentant leurs dernières modèles.

Le choix du couvert est à déterminer en fonction de date et de la technique de destruction prévue. Si le sarrasin ou la phacélie sont facilement détruits par le gel, la moutarde demande une température inférieure à – 4°C pour être détruite tandis que les graminées et les légumineuses sont rarement gélives. Pour la plupart des espèces de couvert, la température ne garantit pas la destruction de 100 % des pieds.

Rouleau, broyeur et déchaumeur

Coté matériel, le constructeur Guilbart présentait le rouleau Faca, qui, combiné à des températures négatives, peut être une stratégie intéressante sur des mélanges sensibles au gel. Ce rouleau a pour particularité d’être plus « agressif » sur la biomasse existante en comparaison des rouleaux traditionnels lisses voir Cambridge. Les blessures occasionnées sur les tiges les rendent plus sensibles aux effets du gel.  Ce mode de destruction permet de conserver une protection du sol, intéressante dans les terres sensibles à la battance. Dans les terres hydromorphes, le non- bouleversement de l’horizon de surface permettra quant à lui de favoriser l’infiltration et la circulation de l’eau à travers le réseau racinaire souterrain, en complément des galeries de vers de terre.

Le broyeur (Schulte FX-315) a impressionné par son efficacité sur la moutarde. Ce mode de destruction présente en outre l’avantage de ne pas bouleverser le sol et de laisser une liberté dans le choix de la date d’intervention. Comparé aux broyeurs à axe horizontal, ce broyeur demande peu de puissance au travail puisque pour les 135 Cv du modèle de démonstration ont largement suffit à entrainer les 4.57 m de l’engin, tout en assurant un travail de qualité : hauteur de fauche régulière, répartition des résidus de manière homogène, le tout sans andainage.

Trois déchaumeurs à disques indépendants fonctionnent bien sur les couverts développés ; ils enfouissent de manière superficielle les débris végétaux et permettent de préparer le sol pour le semis de la culture suivante. La rapidité de ces outils en fait une solution plébiscitée par de nombreux professionnels, mais son efficacité peut être diminuée dans des situations hydromorphes. Le Carrier de chez Väderstad, peut être équipé du Cross –Cutter. Opérant sur le même principe que le rouleau FACA, ce dispositif permet de « hacher » la biomasse en place avec son rouleau rotatif muni de « couteaux » et rendre sa dégradation plus facile pour les rangées de disques qui lui succède. En situation adaptée, cet outil est d’une efficacité redoutable.

Le déchaumeur à patte d’oie a l’avantage de scalper les racines, mais en conditions humides les ailettes auront un effet lissant. En situation critique avec un couvert très développé, le faible dégagement de l’outil a provoqué un bourrage entre les dents et le rouleau.

Herse-rotative, covercrop, charrue et… semoir direct

Un combiné herse-rotative était présenté lors de cette manifestation. Détourné de son utilisation primaire, cet outil se révèle peu adapté comme moyen de destruction des couverts : faible débit de chantier, andainage des résidus entre chaque dent, cet outil a pour seul avantage de créer un mulch de surface.

Un covercrop en X, de 36 disques s’est montré d’une très bonne efficacité. Gourmand en puissance, la non-maîtrise de la profondeur de travail contrebalancent ses qualités d’enfouissement et de dégradation de la biomasse quelque soit le volume à détruire.

La charrue était aussi présentée ce jour là, mais pas sous une forme dynamique. Des profils d’une quinzaine de mètres de long ont été préalablement creusés en travers de différents réglages de la varilarge : 14, 17 et 20 pouces. Conclusion, la répartition de la biomasse dans le sous-sol est directement liée à l’écartement de la charrue. Plus celle-ci prend large, plus elle concentre au fond du sillon un volume important de biomasse végétale. Placée en milieu anaérobie, sa dégradation se verra ralentie et perturbera potentiellement le développement racinaire de la culture suivante.

On pouvait enfin observer l’action du semoir direct Semeato, prêté par l’agriculteur Eric Boisleux, président de l’APAD. L’outil est conçu pour effectuer un semis sous couvert ; il ne détruit pas le couvert.

Vous l’aurez compris, les moyens de destruction sont variés, et doivent être pensés en coordination avec la mélange d’espèces du couvert. L’objectif final étant d’optimiser la dégradation des résidus et de préserver la structure du sol.

Broyeur.

Déchaumeur à disques indépendants Carrier de chez Vaderstad.

Déchaumeur à disques indépendants Rubin de chez Lemken.

Herse rotative avec semoir Sulky.

François Derancourt présente un profil cultural aux élèves.

Les élèves de BTS ACSE.

2 Commentaire(s)

  1. Plusieurs remarques
    -un mélange doit étre composé de plusieurs espéces, y compris des légumineuses
    – il doit étre semé le plus tôt possible
    -A court terme, il faut envisager ne pas le détruire et semer en directe dedans.
    Toutes les autres possibilités sont faisables mais elles engendre le plus de problèmes, pas forcément tous les ans, mais souvent.
    Si quelqu’un est intéressé je peux développer les 3 remarques, en cas contraire je m’excuse……

  2. bien sur que l’on est intéressé!!!! on attend ton développement avec intérêt!

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