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Coup de froid, des impacts sur les maïs ?

Une chute des températures a été enregistrée sur la fin de cycle du maïs. Quelles conséquences envisager sur les rendements et la récolte ?

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Suite au printemps humide, de nombreuses parcelles n’ont pas pu être semées en temps et en heure. C’est particulièrement le cas dans le nord de la région, qui a connu des cumuls de pluie importants jusqu’à fin mai. Dans les secteurs de Dombes et de Bresse, les semis se sont déroulés courant juin, jusqu’à début juillet. Les stades ne sont pas en avance.

Des températures faibles ont été observées en fin de cycle alors que les stades des plantes n’étaient pas proches de la maturité physiologique.

Figure 1 : relevés météorologiques journaliers sur la station de Ceyzeriat (Ain)

Visiter les parcelles pour le diagnostic

L’effet du froid sur les plantes dépend de la température et de la durée d’exposition au stress. Il suffit de quelques heures autour de zéro ou quelques minutes à -3°C avant de remonter au-dessus de zéro pour impacter les tissus des feuilles, de la tige ou des soies. Mais tous ces organes ne réagissent pas de la même façon face au stress. Leur sensibilité va dépendre de la taille des plantes (les plantes chétives sont plus sensibles) et de l’épaisseur des tissus (Les feuilles, spathes sont plus sensibles que les grains et les tiges).

Il est important de bien aller voir les parcelles pour faire le diagnostic de gel. Si quelques jours après le coup de gel, il reste des tissus verts, tout n’est pas perdu, même si la zone de transferts des réserves entre la rafle et le grain peut-être déjà lignifiée (présence du point noir).

Si tous les organes sont blancs, y compris la tige, la plante est complètement sénescente.


Maïs gelés dans la Dombes (Ain). Les feuilles ont blanchi suite au gel. Les tiges restent vertes. (Semis de début juin, indice 320).



Coupe longitudinale de grains pris sur les épis de cette parcelle. On voit l’apparition du point noir alors que le grain n’est pas complètement rempli.

Un impact sur le rendement grain ?

L’impact sur le rendement va dépendre de l’avancée du remplissage du grain. S’il est à maturité (<= 32 % H20), il n’y a aucune incidence.

Plus l’humidité du grain au moment du gel est importante, plus les pertes sont importantes. Lorsque la plante est gelée et que le point noir apparaît à la base du grain, la remobilisation des réserves est bloquée. Les PMG sont impactés et la perte d’humidité réside dans le dessèchement naturel des grains.

Figure 2 : estimation de pourcentage de perte de rendement suite à une défoliation intervenant à différents stades du maïs

Quelques préconisations pour la récolte

A cette période de l’année, on ne peut pas espérer perdre énormément de points d’humidité mais il est possible d’en gagner quelques-uns.

Débouchés ensilage

Pour les maïs gelés les moins avancés, il va être difficile de les mener à un stade récoltable en grains. Ces parcelles-là devront être ensilées très rapidement !

Voici les clés de décision selon le remplissage des grains et/ou le taux de matière sèche (MS) plante entière :
• si le grain est au-delà du stade « 1/3 laiteux, 1/3 pâteux, 1/3 vitreux » (soit au-delà de 30 % MS plante entière en conditions normales) : ensilage au plus tôt. Si l’alimentation du grain n’est pas coupée (si absence de point noir), il pourra y avoir quelques transferts de sucres vers le grain (stockage sous forme d’amidon) mais au détriment de la partie tige + feuilles. Il y a peu à gagner avec une baisse rapide de la qualité.
• si le grain est en deçà de ce stade « 1/3, 1/3, 1/3 » : la partie tige + feuilles va gagner quelques points de MS en peu de jours (desséchement « naturel »), la partie grain ne gagnera aucun point de MS. L’objectif est de minimiser les pertes au silo alors que la maturité « fourrage » de la plante n’est pas atteinte. Le silo va couler. Prévoir un lit de paille ou de foin sur la dalle du silo pour absorber une partie des jus, et/ou ajouter un aliment absorbant dans la masse du silo pour capter les jus (exemple 5 kg de pulpes surpressées de betteraves par tonne de matière verte et par point de MS à gagner pour atteindre 32 % MS : coûteux !).

Débouchés grain

Au-delà de 38 % d’humidité, il est possible de battre du maïs. Les références sont faibles et les machines ont évolué depuis les derniers essais. Il faut donc être vigilant concernant les réglages de la moissonneuse pour préserver l’intégrité des grains au battage car chaque situation est différente.


Figure 3 : Effet de la teneur en eau du grain à la récolte sur le taux de grains entiers – références sur maïs hybrides dentés
Essais de moissonneuses-batteuses en Aquitaine 2984 – 1993 / X.Gautier – AGPM


Figure 4 : Comparaison de pertes de rendement entre une défoliation et une récolte immédiate ainsi qu’une même défoliation à la même date et une récolte à maturité après perte d’humidité au champ – 3 niveaux de maturité au moment de la défoliation


Gagner quelques points d’humidité permet de réduire les pertes de rendements.

Attention car quelques précautions sont à prendre si l’on souhaite faire perdre des points d’humidité au champ. Le gel détruit les cellules. Les organes touchés ne vont donc pas évoluer de façon normale. Dans le pire des cas, les tiges et les grains pourrissent en développant des moisissures. Il faut donc bien surveiller l’évolution de ces parcelles pour limiter le risque de verse et la dégradation de la qualité du grain.

Thibaut Ray (Arvalis – Institut du végétal)

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