eta 26 semaine 42 bis couverture

Comment un banquier étudie un projet de financement ?

Nicolas Noël, directeur d’agence agriculture à la Banque Populaire Rives de Paris, étudie les financements des projets de production et de vente d’électricité photovoltaïque tel que celui de Paul, céréalier en Haut de France. Ce dernier a l’intention de coupler la construction d’un nouveau bâtiment agricole à la pose de panneaux solaires sur son toit. Le montant du projet s’élève à 165 500 euros.

Produire de l’électricité photovoltaïque ne dégage souvent qu’une très faible rentabilité. Mais coupler la construction d’un bâtiment ou la réfection d’une toiture indispensable à l’exploitation en vendant l’électricité photovoltaïque produite sur son toit, rend le projet plus pertinent. Les compléments de chiffre d’affaires  et de revenu permettront de financer l’investissement qui ne serait sinon qu’un coût pour l’exploitant.

Nicolas Noël, directeur d’agence agriculture à la Banque Populaire Rive de Paris étudiera le financement d’un tel projet en analysant d’abord la situation financière globale de l’exploitation pour déterminer ses capacités d’emprunt et de remboursement de nouveaux prêts.

Tous les projets d’investissement à venir personnels de l’agriculteur et de son exploitation seront aussi passés en revue afin de prévoir les marges de financement nécessaires.

Un coût pour le céréalier

Depuis quelques mois, plusieurs facteurs rendent plus aisée l’analyse des dossiers de financement des projets, qui associent la construction d’un bâtiment à une centrale photovoltaïque.

En effet, le retour d’une conjoncture agricole favorable, avec des prix élevés, permet d’espérer une augmentation des capacités d’investissement et de remboursement des prêts de n’importe quel céréalier.

Et les garanties d’emprunt élargies, apportées par le fonds européen d’investissement, minimiseront les prises de risques des banques lorsqu’elles décident de financer des projets d’ins- tallations photovoltaïques.

Pour autant, un bâtiment reste un coût pour un céréalier alors que pour un éleveur, son financement est supporté par ses activités d’élevage.

Quoi qu’il en soit, la première condition à remplir pour financer un projet photovoltaïque par des prêts bancaires est d’être propriétaire du terrain sur lequel sera construit le bâtiment. Si le projet est porté par une société agricole, celle-ci devra aussi être propriétaire du terrain en son nom.

A contrario, si le terrain constructible est loué, le financement du bâtiment sera plus compliqué. La caution hypothécaire du terrain du propriétaire s’ajoutera alors à l’hypothèque du bâtiment.

En Haut de France, le projet de Paul, céréalier, est un cas d’école. Il n’a pas les moyens de financer sur ses propres fonds le nouveau bâtiment dont il a besoin pour stocker son matériel. Et ses capacités d’emprunt sont limitées. Depuis trois ans, son revenu n’excède pas 1,5 smic par mois.

Aussi, pouvoir coupler la construction de son futur bâtiment avec l’installation de panneaux photovoltaïques sur le toit (133 kWc) est une opportunité qu’il compte saisir.

Dans un premier temps, Paul a soumis son projet à un constructeur de bâtiments et à un installateur de panneaux. Après avoir bâti l’ensemble de son projet, ces entrepreneurs ont transmis à Paul des dossiers à remettre à son banquier.

L’investissement s’élève à 165 500 €. Une fois déduit les 12 500 € d’autofinancement, Paul sait qu’il devra emprunter 153 000 €.

Nicolas Noël va s’appuyer sur le dossier de construction du bâtiment et d’installation des panneaux, transmis par son client, pour étudier comment les prêts sollicités pourront être remboursés.

Un projet adapté à la dimension de l’exploitation

Autrement dit, il tentera de savoir si le produit de la vente d’électricité sera suffisant pour payer chaque année l’échéance de prêt ou pas ?

Si non, l’excédent brut d’exploitation de l’exploitation de Paul servira en partie à régler chaque année une partie des nouvelles échéances de prêt.

Quoi qu’il en soit, le plan de financement reposera sur le devis transmis par l’installateur et sur l’offre de rachat, par EDF, de l’électricité qui sera injectée dans le réseau électrique (durée et prix du kWh vendu).

Deux prêts financeront le projet de Paul. Le premier de 70 000 €, d’une durée de 20 ans, sera affecté à la construction du bâtiment et le second de 83 000 €, d’une durée de 12 ans, aux panneaux.

L’offre de prêt sera associée à la mise en place d’un contrat de cession des créances Dailly : les produits de la vente de l’électricité seront directement versés à la Banque Populaire Rive de Paris. Paul n’aura qu’à régler l’échéance complémentaire des prêts souscrits si le produit de cette vente ne couvre pas la totalité de leurs montants.

« Un bon projet est un projet adapté à la dimension de l’exploitation, affirme Nicolas Noël. Paul aurait pu envisager l’installation d’une grande centrale photovol- taïque sur des bâtiments surdimensionnés par rapport à ses besoins d’entreposage. Mais la nature de son projet serait alors différente. Il ne s’agirait plus seulement de financer la construction d’un bâtiment agricole mais de se lancer tout bonnement dans la production d’énergie solaire ».

 

Dans l’ensemble, les dossiers techniques transmis par les installateurs de panneaux sont des documents fiables sur lesquels les banquiers s’appuient pour étudier les finan- cements des projets soumis.

Leur viabilité repose sur un certain nombre d’élé- ments. Nicolas Noël portera une attention particulière à la notoriété de l’installateur, à ses compétences et, aux projets qu’il a déjà réalisés et financés.

L’installateur doit aussi avoir souscrit une garantie décennale et assurer l’entretien et la maintenance de la future centrale pendant la durée de l’emprunt.

Pour que le projet soit réalisé rapidement, l’installa- teur doit s’engager à accompagner son client dans ses démarches administratives (permis de construire, contrat de raccordement etc.)

Tous ces éléments doivent figurer dans le dossier transmis au banquier.

Si l’agriculteur est livré à lui-même, celui-ci perdra beaucoup de temps pour raccorder sa centrale et la mettre en service. A contrario, l’agriculteur doit pouvoir rester maître de son projet même s’il se fait accompagner!

Auteur: Frédéric Hénin

Article Précédent
Article Suivant