Pour la troisième campagne successive, la consommation mondiale de céréales est supérieure à la production. Les stocks des pays exportateurs se replient. Une nouvelle moisson record est d’ores et déjà attendue en 2022.
La tonne de blé ou d’orges vaut entre 60 € et 70 € de plus que l’an passé à la même époque sur le marché de Rouen. La flambée des prix constatée au début de l’été a été précédée par une hausse continue des cours observée à partir de l’hiver passé, lorsque les marchés ont pris conscience que les productions mondiales de maïs puis de blé seraient moins importantes qu’attendu.
Dit autrement, la consommation mondiale de céréales et la croissance démographique nourrissent la spéculation sur les marchés quand la production ne suit pas. Chaque année, plus de 40 millions de tonnes (Mt) de grains en plus sont consommées.
D’ici la fin du mois de juin, 2 287 Mt de grains seront consommées, soit 90 Mt de plus qu’en 2019-2020. Certes, la demande entre céréales s’ajuste en fonction de l’offre. Le blé ou l’orge fourragers peuvent en partie être employés pour fabriquer des aliments pour animaux et vice-versa. Mais la demande est dans son ensemble rigide.
A contrario, l’augmentation de la production mondiale de grains est entravée par les conditions de cultures et climatiques observées sur lesquelles l’homme a peu de moyens d’agir.
Croissance rigide
La croissance démographique mondiale et un appétit planétaire de plus en plus affirmé de produits carnés et laitiers sont les deux principaux moteurs de la demande de grains. L’essor des filières industrielles de transformation de grains en biocarburants et autres produits biosourcés accompagne le mouvement.
En fait, la demande de céréales est surtout déséquilibrée. Elle stagne voire baisse dans la dizaine de pays exportateurs majeurs de grains sur lesquels la planète comptent pour êre approvisionnés (environ 800 Mt). Mais la demande augmente inexorablement dans les pays importateurs, au sud de la Méditerranée et en Asie du Sud-est notamment.
Sans surprise, l’Inde et la Chine (2,5 Mds d’habitants) sont les moteurs de cette croissance. Sur les 90 Mt de grains qui seront consommées en plus entre 2020 et 2022, les deux pays les plus peuplés de la planète en auront utilisé près de 34 Mt.
Toujours battre des records
Selon le CIC, la production mondiale de blé (782 Mt) est juste équilibrée. Au mois de juillet, les marchés tablaient encore sur 788 Mt mais le dôme de chaleur qui s’est abattu en Amérique du nord et la sécheresse qui a sévi dans le bassin de la Mer Noire ont nui au développement de la céréale et ont même détruit plusieurs millions de tonnes de grains.
En conséquence, la production croît à peine au rythme de la demande parce que celle-ci a été entre temps ajustée à la baisse, faute de grains disponibles. Pour de nombreux usages, la céréale n’est pas substituable. Toujours plus de pain à base de blé est produit avec toujours plus de blé.
Or en 2020, la production mondiale de maïs avait stagné (1 126 Mt) alors que la demande avait progressé de 30 Mt. Aussi, la campagne s’est achevée avec des stocks de report en repli de 20 Mt dans les pays exportateurs majeurs de la céréale et de 30 Mt à l’échelle de la planète.
Cet automne, la planète céréalière mise sur la production 2022 de maïs pour couvrir la demande de céréales destinée à l’alimentation animale et pour produire du bioéthanol. 1202 Mt de grains devraient être récoltées soit 76 Mt de plus que l’an passé. Cette estimation repose sur le retour à des conditions de cultures normales dans l’ensemble des bassins de production exportateurs (Brésil, Union européenne).
Une partie des grains produits en plus sera conservée pour restaurer en partie des stocks mondiaux (+10 Mt hors Chine et Inde). En effet, ils avaient significativement baissé la campagne passée.
Dans ce contexte, l’orge est la céréale sacrifiée. La production mondiale (147 Mt), inférieure de 12 Mt à l’an passé, est déficitaire de 5 Mt.
Dans ce contexte, le sorgho restera une céréale d’appoint (64 Mt ; +2 mt sur un an). Les 2 Mt de grains consommées en plus se substitueront en partie à l’orge utilisée en moins.
Pour l’an prochain, une nouvelle moisson record est d’ores et déjà attendue car la campagne commerciale actuelle cessera sans nouveaux stocks. Or la demande mondiale de grains n’est pas prête de fléchir.