Ils ne sont pas moins de quatre exploitants agricoles, dans la commune de Puy-Guillaume (2 500 habitants dans le Puy-de-Dôme), à voir leur activité remise en cause par une décision que le conseil municipal ne justifie que par un argumentaire qui frise l’insulte.
Selon le bulletin municipal de Puy-Guillaume, l’activité agricole provoque, je cite, des « nuisances sonores, olfactives, la prolifération des mouches, l’écoulement d’eaux polluées« . C’est donc avec ces « arguments » que le maire de la commune, Nadine Chabrier (en fait, elle n’a pas été élue, elle a suppléé Michel Charasse lors de la nomination au Conseil constitutionnel de ce dernier), est revenue sur la parole donnée à quatre agriculteurs, selon laquelle elle allait autoriser la modification du PLU (plan local d’urbanisme) pour que certaines zones naturelles (et donc inconstructibles) deviennent agricoles (et donc avec la possibilité d’installer des bâtiments). A l’arrivée, le conseil municipal a voté contre ce changement de PLU, et s’en défend à travers ces insultes, avec un autre étrange argument, celui d’avoir fondé sa décision en visitant une autre exploitation que celles concernées.
Les quatre exploitations représentent en tout 17 emplois non délocalisables, et des projets d’investissement de 1,5 million d’euros. Les projets d’aménagements consistent en une stabulation pour l’exploitation de vaches laitières (pour passer de 70 à 90 têtes, sachant qu’ils sont quatre associés à vivre dessus), une serre pour des fraises (10 emplois sur cette exploitation), deux poulaillers label rouge, et enfin un bâtiment pour des brebis. Aucun ne se fera, en l’état actuel des choses, et les quatre exploitations, qui ne pourront se moderniser, sont appelées à un funeste destin. D’ores et déjà, du côté de l’élevage de vaches laitières, un jeune a dû s’asseoir sur ses prêts JA, ce qui n’est quand même pas rien.
J’ai joint Quentin Baumont, l’éleveur de brebis, âgé de 23 ans. Il raconte : « Je me suis installé avec un plan de développement, validé avec la Chambre d’agriculture, où je prévoyais d’élever 350 brebis. Pour cela, il me fallait un bâtiment supplémentaire. J’ai demandé au maire, au mois de juillet, elle m’a répondu qu’elle allait s’en occuper et que ce serait validé dès le conseil municipal de septembre. J’ai donc avancé, me suis installé, et la réponse négative du conseil municipal est tombée. Du coup, je me retrouve avec 200 brebis, ce qui est insuffisant pour moi pour vivre. Avec le plan de développement, je m’étais calculé un revenu de 1000 à 1500 €. En-dessous, clairement, ce n’est pas viable.«
Au-delà du refus, Quentin Baumont est meurtri par les arguments avancés soudain par la mairie. « On va où ? Moi, mon bâtiment, je l’avais prévu au plus loin de l’entrée du village, soit à 600 mètres, alors que réglementairement 50 mètres suffisaient. Je l’avais prévu en bois, tout joli, pour faire honneur à notre commune et à son terroir. Sur les 17 hectares de mon père, avec lesquels je m’installe désormais, je voulais en rendre un, un seul, en zone agricole pour construire ce bâtiment pour accueillir les brebis. Résultat, les 200 brebis que j’ai sont entassées dans une vieille grange, qui plus est toute proche du village, et elles ne me suffiront pas pour vivre. » Et il ajoute : « Et je ne suis pas seul. Les fraises, ça pue aussi, les fraises ?«
La structure syndicale des Jeunes Agriculteurs du Puy-de-Dôme s’est emparée du problème. Il y a déjà eu une manifestation (notre illustration ci-dessous) pacifique devant la mairie. Ce dimanche, ce sera une opération « fermes ouvertes » : deux des quatres fermes concernées seront ouvertes au public pour que chacun puisse se rendre compte par lui-même que les « pollutions » avancées par la municipalité pour détruire 17 emplois ne sont pas si terribles que cela.
Mais vis-à-vis de la municipalité justement, il est clair qu’il n’y a plus rien à espérer. Tant et si bien que les exploitants ont rencontré Bernard Vignaud, qui fut jadis 1er adjoint de Pierre Charasse (preuve que le problème n’est pas la couleur politique, les deux sensibilités sont voisines en terme d’étiquette), et qui va conduire aux prochaines élections municipales une seconde liste candidate à la mairie (face à celle du maire actuel). « Nous lui avons demandé s’il trouvait normal que des activités qui apportent 17 emplois avec 1,5 million d’investissements soient ainsi bannies de tout avenir, reprend Quentin Baumont. Il nous a assuré du contraire. »
L’avenir de quatre exploitations agricoles de Puy-Guillaume va donc se jouer dans les urnes…
En savoir plus : https://www.facebook.com/jeunesagriculteurs63 (page de soutien aux agriculteurs de Puy-Guillaume sur Facebook, vous y trouverez notamment le bulletin municipal cité au début de notre article).
Photo fournie par les JA63, en rouge : Quentin Baumont.