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Production de lait en Nouvelle-Zélande, la fin d’un paradigme

Après deux années de crise, les éleveurs néo-zélandais sont exsangues. Les perspectives de croissance de la production laitière sont limitées. Pour accroître le revenu des producteurs, la coopérative Fonterra fait le choix de la valeur ajoutée. 

Doubler sa production de lait: la Nouvelle-Zélande ne pourra pas renouveler son exploit des années 1995 – 2015. Cette performance reposait sur une conversion des terres de l’ile sud à l’élevage laitier et par des gains de productivité importants (+ 12 % entre 2010 et 2015). Auparavant, l’île sud était consacrée à la production d’ovins et de bovins viande et, par une intensification de l’élevage.

Or la Nouvelle-Zélande comprend deux grandes iles, pas trois, qu’il serait sinon tentant de convertir à la production laitière pour satisfaire les ambitions des producteurs! Enfin, l’intensification de l’élevage néozélandais est déjà très forte (jusqu’à 3 VL par ha de race jerseyse ou mixte pour une production de 10.000 Kg à 13.600 Kg de lait par ha). L’excédent d’azote des prairies atteint dans certaines régions plus de 200 unités par hectare.

« La qualité des eaux de surface se dégrade depuis plus de 10 ans en lien avec l’augmentation des effectifs laitiers et l’intensification des systèmes », analyse l’Institut de l’élevage lors de la quatrième conférence « Grand lait » qui s’est déroulée le 4 avril dernier.

Comme dans les autres pays occidentaux, la protection de l’environnement devient un enjeu sociétal et économique. Les citoyens attendent de l’industrie agroalimentaire et des exploitations agricoles des efforts pour améliorer la qualité de l’eau.

Par ailleurs, le secteur du tourisme, fondé sur la nature, est un poids lourd économique. Il représente un chiffre d’affaires de 13 milliards de dollars néo-zélandais, soit autant que la valeur des exportations laitières.

Aussi, la protection de l’environnement va représenter un frein à la poursuite du développement de la filière laitière. Le respect des normes de production sera beaucoup plus contraint car l’activité agricole doit coexister avec le tourisme rural sur un territoire limité.

Un redressement plus contraint

En fait, les clignotants ont viré au rouge les uns après les autres pendant les deux années de crise. De nouveaux facteurs impactent fortement la filière laitière néo-zélandaise.

Tout d’abord, la capacité de résistance des exploitations a été mise à rude épreuve. Les coûts de production supérieurs de 40 % à leur niveau d’avant 2008 les rendent plus vulnérables au moindre retournement de conjoncture. Le point mort oscille autour de 500 dollars néo-zélandais pour mille litres contre 330 dollars à la fin des années 2000. Au cours du dollar actuel, il est équivaut à 330 € par 1 000 litres, soit un niveau bien éloigné du modèle irlandais qui faisait office de référence jadis pour comparer la compétitivité des pays exportateurs de produits laitiers.

La hausse des coûts de production résulte de l’abandon du système « tout herbe » vers un système où les aliments complémentaires achetés prennent de plus en plus d’importance dans la ration alimentaire des vaches.

Aussi, avec des prix de la poudre de lait qui flirtaient le seuil de 4 dollars pendant plusieurs mois (soit environ 200 euros les kilogrammes de lait), les trésoreries des exploitations étaient donc exsangues en fin de crise.

Des contraintes monétaires et environnementales

Plus des trois quart des exploitations sont débitrices et les encours de prêts s’élèvent à 3,5 millions de dollars en moyenne (40 milliards pour l’ensemble du secteur au niveau national).

Par ailleurs, les prix des moyens de production sont restés élevés tout au long de la crise. La course à l’agrandissent et la conversion de nombreuses exploitations ovines et bovines viande en exploitations laitières dans l’ile sud a renchéri la valeur du foncier. Le prix de l’hectare a été multiplié par deux en 20 ans et a atteint 24 000 €. Le share milking, le schéma traditionnel d’acquisition des terres pour reprendre des exploitations et s’installer est devenu trop onéreux.

La hausse des prix du lait survenue l’an passé était donc très attendue. Mais le redressement des comptes des exploitations est contraint par un nouveau contexte monétaire imprévu qui pèsera au moins autant que les normes environnementales à respecter. La réévaluation du dollar néozélandais renchérit à l’export les produits laitiers commercialisés (95 % de la production totale de lait).

Depuis quelques mois, le prix du lait payé aux éleveurs néo-zélandais équivaut (converti en euro) à celui payé en France. La hausse de 10 cents du dollar a représenté un surcout à l’export de près de 20 % des prix qui s’ajoute à l’augmentation des prix des matières premières agricoles.

Chercher de la valeur ajoutée à l’export

Ceci dit, la Nouvelle-Zélande table sur une nouvelle augmentation de la production de lait, d’ici 2025 grâce à de nouveaux efforts de productivité écologiquement vertueux. Mais elle plafonnerait à 24 millions de tonnes par an.

En conséquence, pour augmenter le revenu des exploitants néozélandais, Fonterra, la principale coopérative laitière du pays, a adopté une nouvelle stratégie. Elle vise à augmenter la valeur ajoutée des produits exportés de plus de 27 % et à accroître, par conséquent de 55 % la valeur des exportations laitières d’ici 2020 par rapport à leur niveau de 2013 avant la crise.

Le scénario de croissance de la production laitière néozélandaise rappelle, dans l’hémisphère nord, celui souvent évoqué en Irlande contrainte elle aussi à revoir ses ambitions à la baisse.

Dans ce contexte, la France est un des rares pays exportateurs de produits laitiers (45 % de sa production) à disposer de réelles capacités de croissance de la production laitière inexploitées alors qu’elle est dotée d’un climat approprié. Mais les crises successives et la volatilité des prix découragent chaque jour des éleveurs de poursuivre leur activité ou de se lancer.
 

Ci-dessous, paysage de Nouvelle-Zélande avec des vaches… Source Fotolia, lien direct : https://fr.fotolia.com/id/119630674.

1 Commentaire(s)

  1. La surproduction, l’impact environnemental, les aberrations technicoéconomiques, ou sont les gestionnaires responsables ?

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