Les premiers contrats d’approvisionnement en cochon vif ont été signés, ce mercredi 2 mars, entre Agromousquetaires (Intermarché), deux groupements bretons de producteurs de porcs (Aveltis et Prestor) et quelques éleveurs à Josselin (Morbihan), dans un des trois abattoirs du groupe.
Il s’agit là d’une vraie nouveauté dans le landerneau porcin qui rallie donc le légume-industrie, le lait ou encore la volaille. Tout le monde sait que la filière porcine, en crise depuis 2007, a vu les prix dévisser ces derniers mois. La lueur d’espoir du 1,40 euro du kilo vif proposé à l’achat, avant l’été 2015, par Agromousquetaires aux vendeurs du Marché du Porc Breton (MPB) a fait long feu. Désormais, les éleveurs sont prêts à des contrats qui doivent leur permettrent de lisser la volatilité.
« Il s’agit d’un partenariat gagnant-gagnant », clame Yves Audo, vice-président d’Agromousquetaires. Ce contrat tripartite est proposé sur cinq ans. L’éleveur candidat signe sur un volume qui ne peut dépasser plus de la moitié de sa production. La fixation du prix repose sur deux références : le prix du vif négocié au MPB (marché du porc breton) et le prix des matières premières (blé et soja) entrant dans la composition de l’aliment du bétail.
Pour faire court, si la cotation du prix de base du kilo se situe en-dessous de 1,13 euro, Agromousquetaires paiera l’éleveur 1,13 euro du kilo plus les primes de qualité (15 centimes du kilo en moyenne), soit 1,28 euro du kilo. La dernière cotation (29 février) fixait le prix de base à 1,113 euro. C’est au-dessus en revanche que la proposition paraît intéressante. Entre 1,13 euro et 1,59 euro du kilo négocié au MPB, toujours hors prime, Intermarché garantit un prix de 1,33 euro en prix de base. Rappelons ici que la moyenne mobile de prix négocié au MPB de ces douze derniers mois se situe à 1,250 euro (source MPB). Ce « tunnel » de prix variera en fonction de la valeur des matières premières.
De la sorte, Agromousquetaires veut garantir l’approvisionnement en cochons vifs « 100 % français » de ses abattoirs (2,5 millions de porcs abattus par an actuellement, plus demain après des travaux en cours). A terme, le distributeur espère couvrir par contrat « entre 1 et 1,2 millions de porcs par an », précise Yves Audo.
Du côté des éleveurs, ce contrat « peut lisser leur trésorerie et sécuriser les investissements nécessaires à la modernisation de leur élevage », dit l’un d’entre eux, Philippe Bizien, président d’Aveltis, second groupement français en nombre de porcs (3 millions de porcs, 770 éleveurs).
Ne craignent-ils pas une forme d’intégration, eux qui ont si longtemps clamé être des « éleveurs libres », c’est-à-dire des entrepreneurs sans lien avec des firmes d’aliments, des abatteurs et encore moins des distributeurs ? « On ne peut plus rester sans rien faire, il nous faut agir », poursuit Philippe Bizien, pour qui cette contractualisation n’est pas antinomique avec le projet de création d’une plateforme de commercialisation commune entre cinq groupements de producteurs. Pour sa part, la Fédération nationale porcine a salué, dans un communiqué du 26 février, l’initiative du distributeur. La FNP espère « qu’Intermarché/Agromousquetaires (suivra) le projet de fonds de soutien porcin actuellement en discussions ». Sur ce point, Yves Audo ne se prononce pas, précisant juste que « ce fonds crée un certain nombre de problèmes ».
De gauche à droite : Michel Adam (groupement Prestor), Philippe Bizien (Aveltis), Yves Audo (Intermarché), Laurent Cospérec (premier éleveur signataire), et Didier Duhaupand (président d’Agromousquetaires). Photo Franck Jourdain.