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Pas de budget européen, la vraie fausse bonne nouvelle pour les agriculteurs

Le sommet européen des 22-23 novembre 2012 s’est achevé sans accord sur le budget. C’était certes, malheureusement, prévisible. Mais surtout les agriculteurs, qui ont besoin de temps et de lisibilité pour prévoir leurs cultures, sont plongés dans l’obscurité.

Les enjeux de ce budget européen sont multiples. L’aspect diplomatique – celui qui l’a emporté lors de ce sommet – consiste à la fois à conserver l’Angleterre dans le giron européen tout en l’obligeant à contribuer « comme les autres ». Et derrière, surtout en ce qui concerne nos agriculteurs, il y a l’aspect économique : une fois que l’on connaît le budget, comment le ventile-t-on précisément., et quelles perspectives offre-t-on à l’agriculture européenne (et française par prolongement) jusqu’à 2020.

La Commission européenne avait défendu un compromis entre la volonté générale baissière pour la contribution mais aussi le maintien des engagements politiques volontaires avec un budget en baisse de 12 %. Un consensus semblait s’être organisé autour de ce budget, et Dacian Ciolos, commissaire européen à l’Agriculture, avait bâti le budget de la Politique agricole commune (la Pac 2014-2020) avec une volonté politique axée sur le verdissement, tout en intéressant les agriculteurs à celui-ci en introduisant un concept de croissance verte. De cette manière, la baisse du budget devenait acceptable, et comportait même des enjeux motivants.

Seulement voilà. Comme je vous l’ai écrit dans d’autres articles (les liens figurent à la fin de celui-ci), le fait que l’Europe ne fonctionne plus aujourd’hui avec une tête forte composée du couple franco-allemand a autorisé les initiatives des uns et des autres. En particulier avec une présidence chypriote relativement passive. C’est ainsi que le président du Conseil européen Herman Van Rompuy a estimé qu’il était stratégique d’asseoir son autorité : il a proposé un budget très largement baissier. L’Angleterre s’est engouffrée dans cette brèche en appuyant cette demande, d’autant qu’entre-temps le Parlement anglais avait adopté une motion favorable à ses eurosceptiques, réclamant le véto au budget en cas d’absence de baisse.

C’est donc dans cette ambiance que s’est déroulé le sommet européen. Dans un premier temps, le Copa et le Cogeca (les puissants syndicats européens des agricutleurs et des coopératives agricoles) estimaient avoir évité le pire par leur lobbying, avec une nouvelle baisse du budget n’atteignant « que » 6 % (et non 20 comme el suggérait Herman Van Rompuy), en plus des 12 % prévus par la Commission européenne donc. Sans crier victoire, les représentants agricoles européens estimaient que compte tenu du contexte, ce n’était pas si mal. Seulement même ce budget là, qui se voulait consensuel, n’a pas été voté.

En tribune, le Président de la République française François Hollande a commenté : « Personne n’a gagné, personne n’a perdu puisqu’il n’y a pas eu d’accord à ce stade. Ce qui aurait été mauvais pour l’Europe, c’eût été un accord avec une remise en cause importante des dépenses et une altération de la Pac, une diminution des fonds de cohésion à un niveau pas supportable pour certains pays et un statu quo sur les recettes« . Mais ces propos diplomates devaient davantage s’adresser aux Britanniques qu’aux agriculteurs.

Choix retardés, conséquences dramatiques

Car, pour les agriculteurs, la perspective d’une décision sans cesse repoussée n’est en aucun cas une bonne nouvelle. Quand pourront-ils effectuer leurs semis en fonction de la nouvelle Pac ? Le risque pour la population agricole est de s’engager dans une voie (que chacun conserve son mode de culture actuel par exemple) et que les paiements européens soient concrétisés selon d’autres choix. Pekka Pesonen, secrétaire général du Copa-Cogeca, déclare ainsi : « Les agriculteurs retardent actuellement leurs décisions de production et d’investissement en raison de l’incertitude concernant la future Pac et, si cette situation devait se poursuivre, elle aurait un impact catastrophique sur l’emploi dans les secteurs connexes ainsi que sur la stabilité du marché.« 

Faire miroiter aux agriculteurs qu’un accord catastrophique pour eux aurait pu être signé n’a aucun sens : aucun des 27 pays européens, quel qu’il soit, n’a intérêt à renationaliser la politique agricole, ça coûterait autrement plus cher à chaque gouvernement.

En revanche, l’absence d’accord ouvre la spéculation sur toutes les renégociations. Pour ce sommet, nous en étions à une baisse de 6 % ajoutés aux 12 % de la Commission européenne. Les parties concernées estimaient cette position « acceptable ». Mais qu’en sera-t-il demain ?

Et vous, qu’en pensez-vous ? Pour en débattre, rendez-vous ci-dessous dans l’espace « Ecrire un commentaire ».

En savoir plus : https://wikiagri.fr/articles/pac-lagriculture-europeenne-freinee-par-les-remous-au-sein-du-couple-franco-allemand/322 (pour bien comprendre le contexte de la Pac 2014-2020) ; https://wikiagri.fr/articles/les-syndicats-agricoles-europeens-plaident-pour-une-pac-forte/329 (ce que veulent le Copa et le Cogeca pour la Pac) ; https://wikiagri.fr/articles/budget-de-la-pac-hollande-doit-intervenir-il-y-a-le-feu/317 (Michel Dantin, député européen proche des agriculteurs, aurait préféré une autre attitude du Président de la République sur la Pac) ; https://wikiagri.fr/articles/le-budget-de-la-pac-2014-2020-fortement-conteste/316 (les propositions d’Herman Van Rompuy pour baisser drastiquement le budget de la Pac).

1 Commentaire(s)

  1. Je suis en colère de lire de tel commentaire !
    Je pense que vous êtes bien loin de la réalité du monde agricole qui subit les lubits des agro-business alimentaires pour surtout satisfaire les actionnaires par des dividendes énooormes réalisés par la vente des matières premières.
    Je suis en colère car on fait payer la baisse du prix aux éleveurs ou aux producteurs de fruit, etc….pour augmenter la marge des agro-alimentaires.
    Je suis en colère car les citoyens ne voient pas la supercherie de nos hommes politiques sur l’Europe agricole : elle veut une agriculture de pauvreté !
    Je suis en colère car l’Europe va créer une situation de FAMINE et de PAUVRETÉ.
    Je suis en colère, sous le nez des citoyens, l’Europe distribue des millions d’ Euros aux multinationales de l’automobile, aux Banques, aux associations ….
    Mais cela semble t-il, est normal !!!
    Vous acceptez que les actionnaires gagnent de l’argent sur votre dos, mais vous voulez que les’agriculteurs vivent dans la pauvreté, il ne faut pas perdre de vue que ce sont eux qui vous amènent à manger dans vos assiettes !

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