Michel et Annie Pecheras sont englués dans une affaire judiciaire kafkaïenne depuis le jugement rendu par la cour d’appel de Bordeaux le 2 juin 2016. Mais l’enjeu de ce conflit est dorénavant écologique puisqu’il porte sur le maintien ou la destruction d’une mare. Des associations environnementalistes se mobilisent. Un ancien magistrat, Gérard Charollois, président de Convention nature vie, va lancer une tierce opposition pour que le jugement soit revu.
« Nous comptons sur Nicolas Hulot, ministre de l’écologie pour s’exprimer sur notre affaire avant le 10 mai prochain », a brandi samedi 14 avril, Annie Pecheras, un micro à la main, au bord de sa mare. Elle s’adressait aux 150 personnes venues à Grignols en Dordogne soutenir sa famille. Pour la première fois se sont jointes à elles des associations environnementalistes.
Son mari Michel et elle sont englués dans une affaire judiciaire kafkaïenne depuis le jugement rendu par la cour d’appel de Bordeaux le 2 juin 2016. Il donne une dimension écologiste au conflit judiciaire qui oppose depuis sept ans la famille de Michel à son voisin, Jean-Louis Malfione. L’enjeu n’est plus la destruction de la mare pour mettre fin aux coassements des grenouilles mais la destruction ou la sauvegarde d’un biotope.
Or, si le jugement rendu par la cour d’appel de Bordeaux est appliqué, il conduira à de nouvelles poursuites par la police des eaux (prison, amendes) ; celle-ci ayant pour mission de de préserver ou de retrouver des milieux et une ressource en eau de qualité. Le comblement de la mare sera alors assimilé à une infraction.
Coïncidence des dates du calendrier ou pas, Annie et Michel Pecheras viennent d’apprendre que le préfet les convoque prochainement pour prendre connaissance de leur situation. Ce rendez-vous préfigure peut-être une solution administrative à ce conflit entre voisins. Mais ils prévoient déjà d’organiser d’autres rassemblements autour de leur mare, avec les associations écologistes venues en renfort, pour médiatiser encore plus leur affaire. Une pétition a d’ores recueilli plus de 200 000 signatures.
En fait, le rassemblement de samedi souligne le changement de stratégie opéré par Annie et Michel Pecheras pour tenter de trouver une solution à leur conflit. Leur affaire est devenue un enjeu écologique de premier ordre. D’où les engagements de plusieurs associations de défense de l’environnement et l’appel lancé à Nicolas Hulot.
Annie Pecheras et son mari vont du reste être accompagnés par Gérard Charollois, ancien magistrat et président de Convention nature vie, « un mouvement pour une écologie, éthique et radicale qui défend le respect des êtres vivants et des équilibres naturels ».
Présent à ce rassemblement, ce dernier leur a proposé trois moyens d’actions. Les deux premiers sont déjà engagés : la multiplication des rassemblements à Grignols et tenter un règlement par voie administrative (via le rendez-vous avec le préfet par exemple). Il faudrait aussi que les adversaires se reparlent et tentent « de trouver la paix des braves ».
La troisième voie suggérée par l’ancien magistrat est la tierce opposition. Ce recours vise à demander à la cour d’appel de Bordeaux de revoir le jugement du 2 juin 2016 afin de constater qu’il conduira à la destruction d’un biotope. Mais cette démarche nécessitera encore de longs mois de procédure.
Depuis que Jean-Louis Malfione a déposé plainte en 2011 pour dénoncer la réouverture d’une mare, le conflit n’a cessé de s’envenimer.
Michel et Annie Pecheras sont condamnés à plus de 150 000 € d’amendes et de frais divers. A ce jour, aucune somme n’a été versée grâce à l’intervention de leur avocat. Mais leurs comptes bancaires sont bloqués et leur patrimoine est gelé dans l’hypothèse d’un prochain règlement.
En attendant, Annie et Michel Pecheras et leurs enfants et petits-enfants sont épuisés par leur conflit.
Leur affaire judiciaire soulève une nouvelle fois les problèmes de cohabitation et de voisinage entre les natifs et les nouveaux arrivants. Ils mettent en lumière des conceptions de vie en milieu rural totalement décalées.
En savoir plus : https://wikiagri.fr/articles/jurisprudence-les-coassements-des-grenouilles-sont-du-tapage-nocturne/9783 (premier article de WikiAgri sur cette « affaire de mare aux grenouilles ») ; https://wikiagri.fr/articles/mare-aux-grenouilles-les-proprietaires-condamnes-dans-tous-les-cas/16677 (article suivant).
Ci-dessous, photos et affiche du rassemblement de ce samedi 14 avril sur la mre aux grenouilles de Grignols en Dordogne.