Au cours du cycle de vie d’un aliment commercialisé en circuits courts, la phase de production est souvent plus vertueuse pour l’environnement que tout ce qui a trait à la logistique, faute de références techniques et de compétences appropriées dans ces domaines. Ce qui rend au final le bilan carbone des circuits de proximité très mitigé.
En matière de bilan carbone, quelle est l’activité la plus vertueuse pour l’environnement ? La production et la vente de fromages de chèvres en circuits de proximité, ou l’activité d’un éleveur livrant son lait à une fromagerie qui se chargera alors de la transformation et de la distribution des produits ? Les réponses à ces questions sont compliquées car elles ne relèvent pas seulement du rationnel et de l’économie. Face à la pression sociale et à l’émotion que suscite de telles questions, il est parfois difficile de garder raison.
Dans une récente étude intitulée « Alimentation – les circuits courts de proximité », l’Ademe a avis tranché. Selon elle, l’essor des circuits courts ne conduit pas systématiquement à une réduction des émissions des gaz à effet de serre. Autrement dit, leur impact sur l’environnement est mitigé. La clé réside en fait dans les capacités d’organisation de la filière tout au long du cycle de vie de l’aliment : production, transformation, distribution et consommation. Chacune de ces étapes ont un impact sur l’environnement.
Au niveau de la production, les producteurs cherchent à rendre leur activité vertueuse en veillant souvent à utiliser moins d’engrais et de produits phytosanitaires, reconnaît l’Ademe.
En matière d’emballages, les produits en vente directe ou en circuits cours présentent aussi un avantage indéniable. « Les produits bruts sont peu ou pas emballés et les conditionnements liés au transport sont souvent réemployés, rapporte l’agence. De plus, la consigne pour réemploi des emballages des consommateurs est fréquemment pratiquée et présente une pertinence environnementale car elle n’engendre pas de transport additionnel. Ce réemploi permet une économie tant pour la production des emballages, qu’en termes de déchets ».
Par ailleurs, La vente directe valorise des produits « hors calibre » ou présentant des défauts esthétiques, pourtant parfaitement consommables.
Mais par manque de références techniques et économiques, les acteurs des circuits de proximité sont moins vigilants sur les autres étapes du cycle de vie de leurs produits. Il s’agit en l’occurrence à tout ce qui a trait à la logistique : la conservation et le transport. « Les circuits de proximité permettent de limiter les procédés de conservation pour les produits consommés en saison (stockage au froid), puisque le délai entre la production et la cueillette, et la commercialisation est réduit », analyse l’Ademe.
Mais les procédés de transformation et conservation utilisés dans les processus artisanaux sont généralement moins optimisés que dans les industries agroalimentaires, dès lors que les impacts sont ramenés à l’unité produite, précise encore l’agence. Quant aux transports du site de production jusqu’au foyer du consommateur, tous les cas de figure se présentent. Mal organisés, ils sont particulièrement énergivores.
« De grandes quantités, transportées sur de grandes distances, de manière optimisée, peuvent avoir un ‘impact effet de serre’ par tonne beaucoup plus faible que de petites quantités, transportées sur des distances faibles dans des camionnettes peu remplies et revenant à vide », écrivent les auteurs de l’étude. « En effet, les émissions par kilomètre parcouru et par tonne transportée sont environ 10 fois plus faibles pour un poids lourd de 32 tonnes et 100 fois plus faibles pour un cargo transocéanique que pour une camionnette de moins de 3,5 tonnes : ils permettent de parcourir de plus grandes distances avec un impact gaz à effet de serre équivalent. »
Les impacts énergétiques et d’effet de serre de l’alimentation sont également fortement liés au déplacement du consommateur pour acquérir les produits. Ramenées au kilogramme de produit transporté, les émissions de gaz à effet de serre peuvent parfois très élevées. « Il est donc nécessaire d’organiser les points de distribution au plus près du consommateur (par exemple, livraison de paniers sur le lieu de travail), voire de regrouper les points de distributions (sur un marché ou des points de vente collectifs), afin de présenter une offre large sur un seul point de vente. Si la logistique est optimisée (adéquation entre moyen de transport et volume transporté, optimisation du circuit de livraison, remplissage du camion, véhicule « propre »…), les circuits de proximité peuvent s’avérer très performants du point de vue du transport jusqu’au point de distribution. »
De l’étude de l’Ademe, l’essor des circuits courts de proximité vertueux pour l’environnement requiert de producteurs dotés de compétences professionnelles pour chaque étape du cycle de vie de leur produit. Sinon l’objectif recherché est manqué.
En savoir plus : http://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/avis-ademe_circuits-courts_201706.pdf (l’étude complète de l’Ademe).
Photo d’archives, tomates sous serre.