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Les agriculteurs sont-ils les otages de la faible compétitivité de l’industrie agroalimentaire ?

En 2021, les revenus de la quasi-majorité d’entre eux restaient inférieurs à 2 smic. Selon le 11ème rapport de l’Observatoire des marges et prix, les agriculteurs pâtissent de la faible compétitivité des industries agroalimentaires.

Les chiffres publiés par le 11ème rapport de 513 pages de l’Observatoire de la formation des prix et des marges (OFPM) piloté par Philippe Chalmin sont éloquents.

La répartition de la consommation alimentaire en valeur ajoutée induite dans les branches, les taxes et les importations n’évolue pas à la faveur des agriculteurs. Un panier (de produits) de 100 € de valeur joutée comprend moins de 7 € de valeur ajoutée issue de l’agriculture depuis 2010. A contrario la part des produits importés (26 €) croît chaque année (+ 10 % en 10 ans). Autrement dit, la valeur ajoutée des produits consommés, de plus en plus créée à l’étranger à partir notamment de produits agricoles français exportés, échappe aux agriculteurs contraints de vendre leurs commodités à des prix imposés depuis l’étranger.

Ces chiffres justes publiés, issus des comptes de la Nation, datent de 2018 car ils nécessitent un certain temps de traitement. Mais ils traduisent une tendance de fond face à laquelle les agriculteurs sont impuissants.

Depuis 2021, la hausse des prix de la plupart des produits agricoles n’améliorera pas la répartition de la valeur ajoutée entre les branches car une bonne partie de cette augmentation est absorbée par la flambée des prix des intrants.

La politique commerciale de la grande distribution contribue aussi à la contraction de la valeur ajoutée tout au long de la filière de production et de transformation malgré les lois Egalim.

« Jusqu’à un certain niveau, la transmission des chocs subis par les prix agricoles est souvent amortie, dans un premier temps, par les industries agroalimentaires et par les distributeurs. Ils compriment leurs marges afin de maintenir des prix stables en rayon pour les produits les plus emblématiques », explique Philippe Chamin, président de l’OFPM.
Selon le rapport de l’Observatoire, les prix à la production agricole ont sensiblement progressé (+ 9,2 %) par rapport à 2020 alors que les prix à la consommation des produits alimentaires n’ont augmenté que de 0,6 %.

La faible répartition de la valeur ajoutée entre les branches affecte en particulier les filières animales, et plus spécifiquement les éleveurs de bovins viande et de d’ovins viande. Les aides Pac reçues sont plus de trois fois supérieures à leur résultat courant avant impôt. Par exemple, un  éleveur de bovins a perçu 40 100 € d’aides en moyenne alors que son revenu n’excède pas 12 500 € (source Rica).  

Sur les treize catégories d’éleveurs définies par le réseau d’élevage Inosys, seuls les revenus des producteurs de trois d’entre elles (lait de vache en zone de plaine, lait de chèvre + céréales, lait de chèvres + lait de vaches) étaient supérieurs à 2 SMIC par UTANS.

En bovins viande, les revenus de naisseurs-engraisseurs de JB équivalaient à 1,4 Smic par UTANS. En 2021, ils  vendaient leurs bovins 252 € les 100 kg vifs pour un coût de production de 360 €, si on inclut une rémunération de 2 Smics. Et malgré les aides Pac, le produit n’excédait pas 338 €/100 kg.

En production ovine, le produit – aides incluses – est en zone de plaine de 12,7 €/kg alors que le cout de production est de 14,4 €/kg, si bien que le revenu n’excédait pas 1,4 smic/UTANS.

En 2021, les céréaliers étaient à peine mieux lotis. En 2021, les prix de vente couvraient toutefois leurs coûts de production (202 €/t), mais la rémunération retenue par Arvalis était de 1,2 Smic par UTANS. Toutefois, en ajoutant les aides Pac, le produit de 229 €/t leur a permis de dégager un revenu de 2 Smic/UTANS.

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