Le désherbage des céréales devient de plus en plus compliqué. C’est donc sur toute la rotation qu’il faut mettre en œuvre des actions pour freiner le développement des adventices.
La présence d’adventices peut entrainer des pertes de rendements conséquentes, jusqu’à 30 quintaux en blé tendre, par concurrence sur les ressources en nutriments et en eau.
Si la maîtrise des adventices est essentielle, elle se complique : évolution du climat, augmentation des résistances, nécessité de baisser l’IFT, durcissement de la réglementation et réduction du nombre de molécules autorisées. Il faut donc multiplier les freins en amont et pendant la culture.
La première étape est de limiter le nombre d’adventices qui lèveront pour permettre aux stratégies de désherbage d’être efficaces. Cela passe par le cumul de plusieurs actions.
La rotation est le premier outil de lutte contre les adventices, notamment par l’alternance de cultures d’hiver et de printemps. Par exemple, l’introduction d’une culture de printemps dans une rotation colza/blé/orge d’hiver diminue très fortement la pression en graminées automnales. La diversification et l’allongement des rotations évitent la spécialisation de la flore adventice. Il est plus facile de gérer une diversité d’adventices qu’une densité très importante d’une seule espèce.
Un travail du sol simplifié peut augmenter de façon significative la présence de graminées à l’automne. Le labour occasionnel, tous les 3 à 4 ans, est une des solutions pour gérer le salissement, notamment pour gérer les vulpins, ray grass et bromes. Après un échec de désherbage, il peut être pertinent de positionner un labour.
Pour ceux qui ne veulent pas labourer, le faux semis présente une alternative intéressante. Pour être pleinement efficace, le faux semis demande une préparation fine et retassée de la surface afin qu’il y ait un bon contact terre/graine favorisant la levée. Les adventices pourront être détruites mécaniquement, en conditions séchantes, ou chimiquement. Cette destruction doit intervenir au moins trois semaines avant le semis pour ne pas dynamiser les levées dans la culture.
En céréales à paille, le décalage, d’une quinzaine de jours, de la date de semis permet de limiter les levées de graminées automnales. Un désherbage en post-levée précoce, avec un produit racinaire, suffit généralement. L’efficacité est d’autant plus importante si elle est couplée à un ou plusieurs faux semis. Dans les parcelles les plus sales, le semis précoce est à proscrire.
En fin de campagne, il est judicieux d’évaluer l’état de salissement, de déterminer la flore dominante pour ajuster sa stratégie. Les graminées demandent d’intervenir à l’automne. Leur densité et la présence de résistances à certains herbicides vont guider la construction du programme en pré ou en post-levée précoce. Pour garder l’efficacité des herbicides, ce programme devra alterner les modes d’actions. Face aux dicotylédones, il faut déterminer les produits complémentaires à apporter au regard de l’efficacité qu’ont les anti-graminées.
Attention, le flufénacet, substance anti-graminées la plus utilisée sur céréales à paille, est en cours de réhomologation au niveau européen. Son renouvellement semble compromis et la molécule pourrait ne plus être utilisable à l’automne 2025.
Le désherbage mécanique reste complexe sur les céréales d’hiver, mais il peut être une solution à essayer, quand des conditions météo séchantes se présentent. Cette approche permet de baisser l’IFT et apporte une solution face aux adventices résistantes. Le désherbage mécanique donne de bons résultats sur les dicotylédones jeunes. Essayer le désherbage mécanique demande de l’anticipation, avec des écartements réguliers et une densité de semis augmentée. La herse étrille intervient en plein, idéalement sur des adventices au stage filament en post-semis ou prélevée. La bineuse sera plus performante sur des adventices développées, sous réserve des conditions d’implantation adéquates.
Les interventions en sortie d’hiver s’avèrent moins efficaces, car les adventices sont trop développées. Elles sont à réserver aux situations où les produits de sortie d’hiver ne sont plus efficaces, du fait de résistance, ou aux éventuelles relevées d’adventices.
Pour combler le manque de molécules disponibles et trouver des alternatives, de nouvelles solutions émergent. Pour gagner en efficacité dans le désherbage mécanique, les outils de guide, GPS, RTK, permettent de travailler plus vite et en respectant mieux la culture en place.
Pour l’instant, plus adapté à un désherbage total en interculture, des outils de désherbage électriques sont en cours de développement pour remplacer les désherbants type glyphosate.
Pour réduire les doses épandues, les constructeurs font appel à l’intelligence artificielle et à des capteurs qui apprennent à différencier les adventices des cultures pour une pulvérisation ou une destruction par laser à la plante. Ces nouvelles technologies sont souvent proposées sur des robots. Ces nouvelles solutions commencent à faire leurs preuves en maraîchage, et des innovations arrivent pour les grandes cultures.
À la moisson, comment limiter la dissémination des graines d’adventices ?
La moisson est une étape clé pour le désherbage : par de bonnes pratiques, on peut éviter de disséminer les graines d’adventices d’une parcelle à l’autre. Pour cela, la règle d’or est de commencer par les parcelles propres pour finir par les parcelles les plus sales. L’idéal sera même d’avoir une approche intra-parcellaire pour faire en dernier les zones à la plus forte densité en adventices.
Très régulièrement, d’autant plus si les conditions de maturité vous amènent à passer dans des parcelles sales avant de retourner dans des propres, il est important de nettoyer sa moissonneuse : fond de la barre de coupe, dessus du convoyeur, vider le bac à pierres sous le convoyeur, nettoyer les grilles. Des graines peuvent se nicher dans les recoins. Il faut aussi vérifier les trappes des pieds d’élévateurs et de vis de retour, l’intérieur de la trémie. Cette fois avec le moteur allumé, réglez les ventes et le batteur à vitesse maximum, faites monter et descendre plusieurs fois la barre de coupe en faisant tourner la vis de vidange. Pour finir, nettoyez le dessus du déflecteur et l’essieu arrière.
Si à ces nettoyages, s’ajoute la récolte des menues pailles, vous diminuerez fortement la dissémination des graines d’adventices.