saisonniers

L’arrêt de l’exonération de charges et les saisonniers agricoles

Le journal du soir que France3 région Centre a diffusé ce lundi 5 novembre un excellent reportage avec le témoignage d’un producteur d’oignons prêt à cesser son activité si l’exonération des charges sur l’embauche des saisonniers est arrêtée, lors du vote de la loi de finances 2013.

L’exonération sur l’embauche des saisonniers représente 30 % des charges d’embauche. Considérée comme une niche, elle pourrait être levée lors du vote de la la loi de finances 2013, c’est en tout cas ce qui est prévu pour le moment. Or, loin d’être une niche, cette exonération représente l’un des rares moyens des producteurs de faire face à la concurrence, y compris intra-européenne, sur le coût du travail.

Un frein au travail des saisonniers…

Le reportage de France 3 Centre (lien en fin d’article) montre ainsi un producteur d’oignons, qui embauche près d’une quarantaine de saisonniers chaque année, pour lequel l’arrêt de l’exonération ferait passer le prix de l’oignon à 48 centimes… Contre 15 centimes pour la concurrence polonaise (ATTENTION cette partie de l’article fait l’objet de précisions par le producteur concerné, lire les commentaires sous l’article). Ce producteur explique : « Si j’arrête la production de légumes, ce ne sera pas fait par mes voisins, mais par des producteurs de pays tiers. » Précisément, l’exonération représente 90 centimes par heure et par saisonnier en plus à débourser, avec donc pour unique façon de se rattraper que de répercuter sur le prix de vente… Ce que le consommateur n’accepte pas, d’où l’arrêt envisagé de cette production.

… Un frein à la biodiversité dans les productions

En pleine région céréalière, on devine aisément quel pourrait être le choix de ce producteur. Alors que le gouvernement s’est clairement prononcé en faveur d’une biodiversité accrue, voilà que l’une de ses mesures budgétaires irait franchement à l’encontre. Loin d’être une niche, l’exonération sur les saisonniers autorise tout simplement l’emploi et la diversité. La supprimer, ce n’est pas demander un effort au chef d’entreprise agricole, mais condamner l’Etat à payer davantage en Assedic et autres primes à l’emploi pour les saisonniers, qu’il ne débourse aujourd’hui pour cette exonération. Et au passage accepter que plusieurs productions françaises soient délocalisées. Ici, on parle d’oignons, mais parallèlement la FNSEA, les JA, Légumes de France, la FNPF (fédération nationale des producteurs de fruits) et la FNPHP (l’équivalent pour les productions horticoles) ont fait campagne pour montrer comment asperges, fraises, tomates, poireaux ou pêches quittent progressivement le territoire français pour celui d’autres pays européens (lien en fin d’article).

C’est d’ailleurs dans l’esprit de freiner cette érosion de la production française que l’exonération des charges sur l’embauche des saisonniers avait été créée par le précédent gouvernement. Il serait franchement préjudiciable que l’actuel, au seul nom du changement, ne supprime cette disposition fiscale. Les conséquences seraient lourdes, tant sur l’emploi que sur la biodiversité dans notre territoire.

NOUS AVONS RECU DES PRECISIONS DU PRODUCTEUR INTERVIEWE SUR FRANCE3, vous pouvez les lire dans la partie COMMENTAIRES de cet article.

En savoir plus : http://www.pluzz.fr/jt-19-20-centre-2012-11-05-18h59.html (le reportage de France3 région Centre commence au bout de 6 minutes) ; https://www.eudonet.com/V7/datas/2256A28B91692791792393490690990A90E91028B91692791792393490690990A90E910/Annexes/TRACTS.PDF (le tract qui montre l’érosion en France des terres agricoles dévolues à plusieurs cultures de fruits et légumes).

2 Commentaire(s)

  1. Le producteur d’oignons interviewé dans France3 Centre tient à nous donner quelques précisions. Voici son message :

     »
    Sur votre site, il est fait allusion à un reportage de FR3 Centre sur un producteur de légumes (oignon-bottes maraîchage). Je suis ce producteur. Même si ce reportage était bien fait, il comporte des erreurs financières parce que le journaliste n’a pas la formation ou la compréhension qui convient parfois (je ne lui en veux absolument pas). En revanche, certaines erreurs sont reprises dans votre article : je n’ai jamais parlé de prix de revient GLOBAL d’une botte à 48 ct pour moi et 15 cts en Pologne. Il s’agit du SEUL coût de la main d’oeuvre pour une botte.
    Ci-dessous les éléments techniques et financiers que j’ai donnés par écrit au journaliste.

    Production en 2012 : 500 000 bottes d’oignons blancs ( 420 000 € HT de CA) peut varier du simple au double …
    Ma marge brute est actuellement d’environ 0,10 euros par botte ; on est en zone d’équilibre (revenu de l’activité : 50 000 € pour faire vivre mon entreprise pour cette production…)
    • Avec les actuelles exonérations des charges patronales pour mes salariées occasionnelles : une botte d’oignons blancs me coûte en 2012 en main-d’oeuvre = 0,35 €
    • S’il y a suppression TOTALE des exonérations : une botte d’oignons blancs me coûterait en main-d’oeuvre = 0.48 € soit + 37 % ou +13 cts (- 65 000 € ou – 130% du revenu et donc faillite immédiate)
    • S’il y a une réduction de 20 % environ de ces exonérations : une botte d’oignons blancs me coûterait en MO = 0,38 euro soit + 8% ou +3 cts (- 15.000 € soit moins 30% du revenu de cette activité. Conséquences: il vaut mieux arrêter car cela devient du bénévolat social )

    Ces suppléments de coût devraient être répercuter sur l’achat du consommateur ( ?) mais en a t’il les moyens ? Si ce n’est pas le cas, c’est la faible marge du producteur qui disparait ou se réduirait.
    ma Récolte 2012:
    Masse salariale (brut + chg patronales) pour ma production légumes 2012 : 180.000 euros
    Réduction de charges pour 2012 : 54.000 € pour TO/DE et 11.000 € pris en chg par MSA

    Merci de bien vouloir rectifier sur votre site l’erreur dont vous n’etes pas responsable.

    Cordialement.

    JM-Leluc
     »

  2. Avec une deuxième précision :
     »
    Suite à mon message précédent, et suite au vote ce jour de la réduction des exonérations pour les travailleurs saisonniers, j’ai trouvé (peut-être) la seule solution possible pour continuer cette production : c’est de ne plus employer 40 personnes mais 50 pour rester sous les seuils de rémunération de 1.25 fois du SMIC.
    Pour mon entreprise ceci ne changera financièrement rien mais compliquera la gestion salariale par un plus grand nombre de personnes. Par contre, mes anciens salariées gagneront moins car je serai dans l’obligation de réduire leurs nombres d’heures. C’est le pouvoir d’achat des salariées qui malheureusement va en pâtir !….
    « 

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