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L’agro-écologie, un nouveau marché pour les banques

70 % des agriculteurs sont inscrits dans une démarche agro-écologique ou en voie de le devenir. Or la conversion progressive à l’agro-écologie ne vise pas seulement à modifier ses pratiques culturales. Elle implique aussi des investissements massifs que les agriculteurs devront financer. Pour connaître les besoins de ses clients, le groupe BPCE s’est livré un vaste travail d’enquêtes.

Les agriculteurs pratiquent l’agro-écologie comme monsieur Jourdain faisait de la prose, sans le savoir !

Selon une étude (*) de du groupe BPCE (Banque populaire et Caisse d’Epargne), 61 % des agriculteurs interrogés ont opté pour une agriculture de conversion des sols, pour une certification environnementale, pour une production sous label ou pour l’agroforesterie. Or selon cette même étude, 51 % de ces mêmes agriculteurs affirment être actuellement inscrits dans une démarche agro-écologique et 14 % envisagent de s’y engager.

En fait, le terme « agro-écologie » doit encore effrayer encore de nombreux agriculteurs (qui préfère parler d’agronomie) alors que dans la réalité, ils sont très nombreux à déjà bien engagés dans le mouvement!

En d’autres termes, « l’agro-écologie est aujourd’hui bien installée et devrait progresser rapidement », commente le groupe BPCE. Mais pour les deux banques, un des enseignements essentiels de cette enquête est le suivant : 30 % des agriculteurs interrogés « envisagent de réaliser au moins un investissement en lien avec l’agro-écologie au cours des deux prochaines années ».

En fait, la conversion partielle ou totale à l’agro-écologie n’est pas seulement un défi écologique mais aussi économique. A projets comparables, elle implique davantage d’investissements qu’en agriculture conventionnelle (2,8 acquisitions contre 2,2 en moyenne).

Pour 25 % des agriculteurs qui ne sont pas engagés dans l’agro-écologie ou qui ne le souhaitent pas, l’investissement est jugé trop important ; et pour 24 %, l’incertitude sur les avantages économiques est forte.

Les voies empruntées par les agriculteurs pour s’inscrire dans une démarche agro-écologique sont très liées à l’âge, à la situation économique de leur exploitation et, bien sûr, à leur propension à être sensibilisés par les questions de biodiversité de sauvegarde de l’environnement.

Quatre catégories d’agriculteurs

L’enquête BPCE réalisée par BVA profile quatre catégories d’agriculteurs. Pour le groupe bancaire, ce sont potentiellement quatre portefeuilles de clients avec des besoins spécifiques pour financer leurs investissements dans les prochaines années.

Parmi ces quatre catégories, les « militants » représentent 11 % des agriculteurs. Ils sont plus jeunes que les membres des trois autres catégories définies par les résultats de l’enquête. « Ils sont majoritairement convertis en bio (54 %) et sont à la pointe sur plusieurs pratiques agroenvironnementales », commmente le groupe BPCE. Et pourtant, ils envisagent de s’engager davantage dans l’agro-écologie. A cet égard, près de 4 sur 5 prévoient au moins investissement en lien avec l’agro-écologie. Mais comme ils sont jeunes, souvent endettés pour s’installer, auront-ils tous les moyens de financer leurs projets ?

Leurs ainés, les « stratégiques » (2e catégorie) vont « utiliser l’agro-écologie comme un levier de compétitivité. Ils représentent 35 % de l’échantillon et comme ils ont déjà pris le virage de l’agro-écologie. Mais seuls 23 % projettent d’un investissent en lien avec l’agro-écologie », analyse le groupe BPCE.

A l’opposé, les « réfractaires » (3e catégorie) sont à 47 % âgés de plus de 55 ans. Ce sont aussi les plus vulnérables économiquement. Ce sont les moins nombreux à porter un projet d’investissement (59 % contre 90 % pour les « militants ») et en l’occurrence, en lien avec l’agro-écologie (13%). En fait, l’agro-écologie n’est pas leur priorité.

Enfin, les « volontaires » (4e catégorie) rassemblent les agriculteurs qui vont prendre le virage de l’agro-écologie (20 % des sondés). Agriculteurs installés en conventionnels, les deux tiers d’entre eux ont des projets concrets (pratiques de conservation des sols, production sous label ou d’énergie). Ils sont 85 % à envisager dans les prochains mois un investissement et même 45 % en lien avec l’agro-écologie.

Les « militants » et « les volontaires » sont les deux catégories d’agriculteurs à fort potentiel pour les banques, les plus amènes à les solliciter pour financer leurs projets agro-écologiques.

Signalons que les « militants » ne représentent pas la catégorie de néo-ruraux installés dans des systèmes agricoles en marge de l’économie de marché… Et par conséquent du système bancaire. Ils forment une cinquième catégorie marginale d’agriculteurs que certains qualifieraient d’« agro-ècologistes intégristes ». Leur conversion à l’agro-écologie accompagne leur adhésion à un projet de société alternatif.
 

(*) Enquête téléphonique (CATI) réalisée par BVA entre le 30 janvier et le 26 février 2019 auprès d’un échantillon de 1381 chefs d’exploitation en France métropolitaine – en hors pêche – en moyennes et grandes exploitations. Surreprésentation des agriculteurs convertis en bio (268 sur 1381).

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