confenvi

Dans « agroécologie », il y a « écologie », au sens politisé du terme

Pour l’agriculture, le concept défendu par le gouvernement lors de la conférence environnementale est l’agroécologie. C’est-à-dire l’écologie, au sens politisé du terme, émanant du programme politique des Verts. Exit les avancées européennes sur la croissance verte, autorisant des financements récompensant les efforts environnementaux, place à un environnement sanction éloigné des réalités du terrain.

L’étymologie explique à elle seule bien des mots, et autant de maux. Ce néologisme qu’est l’agroécologie montre ainsi une écologie dominante et entière, en toutes lettres, réduisant de moitié l’agriculture, réduite à l’agro. Et ce que cette sémantique cache, c’est l’utilisation du mot « écologie », avant tout politisée. Un mot confisqué par les Verts, autoproclamés défenseurs de l’environnement, en accord avec leurs propres experts. Au niveau national, les Verts ont obtenu précisément 2,31 % des voix à l’élection présidentielle (avec la candidature d’Eva Joly), avec 17 % de leurs voix acquises dans la seule région Ile de France. En d’autres termes, un électorat à la fois faible, et résolument urbain.

Pourtant, c’est ce parti qui dicte aujourd’hui à notre pays sa politique de gouvernance rurale, et en particulier sur l’agriculture. N’ayant pas obtenu gain de cause sur le nucléaire, il veut, et est en passe d’obtenir, sa compensation sur une activité économique majeure de notre pays. D’ores et déjà, le site du ministère de l’Agriculture est bardé de ce mot, « agroécologie », avec une propagande « bien pensante » qui explique, pratiquement dans les mêmes termes que dans le programme politique des Verts (le « livre vert de l’agriculture » se retrouve en ligne facilement), que les agriculteurs sont d’affreux pollueurs et qu’il est temps de leur apprendre les bonnes pratiques.

Mi-août, la collusion entre le pouvoir et ce parti est apparu noir sur blanc dans les colonnes du Journal du Dimanche, qui a diffusé une tribune cosignée par la ministre verte Cécile Duflot (logement) mais aussi par les socialistes Philippe Martin (environnement), Stéphane Le Foll (agriculture), et Pascal Canfin (développement). Cette tribune réclamait une accélération du processus de transition écologique… calqué sur le programme des Verts en ce qui concerne l’agriculture.

Or, en la matière, le programme des Verts est beaucoup trop caricatural pour être réellement environnemental, au sens « non politisé » du terme, celui du dictionnaire. Le constat de départ sur lequel il repose date de plusieurs années, de l’époque, où, effectivement, il y a eu des crises sanitaires, telle la vache folle. Et estime qu’il faut obliger les agriculteurs à d’autres pratiques.

C’est faire peu de cas de la réalité du terrain. Non, les agriculteurs ne sont pas fous, ils ont payé chèrement leurs erreurs, et celles qu’on leur a fait commettre. Et ils ont réagi. Cela fait plusieurs années qu’ils se sont dirigés d’eux-mêmes vers le bien-être animal ou encore des techniques respectant la terre pour les cultures. Ce que les agriculteurs savent, mais pas les Verts, c’est qu’il n’est pas possible d’arrêter systématiquement et sur tous les sols le labour, ni totalement les pesticides. Ils procèdent par étapes, font des tests sur des parcelles, comparent les rendements (un mot utilisé comme synonyme de « productivisme » dans le document sus cité, alors que chacun sait que sans rendement il n’y a plus d’agriculture) bien sûr, mais aussi l’évolution du sol, de la terre. Ces tests se font sur des utilisations dites « raisonnées » des pesticides (n’en utiliser qu’à bon escient, mais pour cela il faut d’abord déterminer la juste dose), et sur des formes de labour moins intensifs et moins profonds, pour mieux respecter la matière organique en surface, comprenez la vie microbienne et celle des vers de terre.

Or, ce qui se profile, c’est de systématiser ces pratiques sans tenir compte des différences existant d’un terrain à l’autre, et donc de l’obligation de réaliser des tests préalables. Et surtout en diabolisant les « rendements », pour proscrire l’activité sous son angle économique. Ce nouveau modèle aurait des effets pour le moins pervers : moins de rendements signifie plus de difficultés à répondre à la demande, et donc plus d’importations, de produits dont on ne peut contrôler les méthodes de cultures ou d’élevage. Et donc davantage de crises sanitaires. Davantage d’importation de biocarburants aussi, et donc le risque d’équivalents de marées noires dans les transports, alors que nous avons la faculté d’en produire nous-mêmes.

Dans la tribune évoquée plus haut, les signataires rejettent d’emblée, en une phrase, les gaz de schiste et les OGM. Les gaz de schiste n’ont rien d’agricole, juste un mot, car dans les deux cas il est procédé de la même logique : la France est le seul pays européen avec la Bulgarie à refuser ne serait-ce que de savoir si nous avons un potentiel en la matière, et à refuser de lancer des axes de recherche pour une extraction compatible avec nos attentes sociétales… Pour les OGM, c’est pire encore. Notre obscurantisme en la matière favorise la toute puissance d’un grand groupe semencier américain sur notre territoire européen, notamment en Espagne où les rendements en maïs ont augmenté de 25 % grâce à ces cultures. Oui, il y a eu des erreurs dans les cultures américaines en la matière. Mais justement, nous avons pu les observer. Et refuser d’établir conjointement, avec les parties concernées, un modèle français permettant des cultures là où les risques de dissémination sont mineurs, c’est accepter que nos productions animales mangent, comme c’est déjà le cas, des OGM d’importations, non contrôlés. Sans compter qu’il existe aussi (mais oui) des utilisations environnementales des OGM, par exemple des systèmes rotatifs pour éviter que les nuisibles ne s’habituent et ne finissent par tolérer soit les pesticides, soit les OGM : en cultivant une année en « traditionnel » avec pesticides (à dose raisonnée) et l’année suivante en OGM, les nuisibles ne peuvent pas s’acclimater.

Mais laissons ces OGM qui de toutes façons n’ont pas bonne presse. D’une manière plus générale, la crainte des agriculteurs est la contrainte, alors qu’ils sont d’eux-mêmes, globalement, déjà sur la voie d’ailleurs tracée par l’Europe, consistant à produire sur place suffisamment pour être sûr de répondre aux attentes de la société européenne. Le gouvernement semble vouloir leur refuser, y compris dans les financements pourtant d’origine européenne, puisque récemment il a été constaté qu’un milliard d’euros que François Hollande s’était enorgueilli d’avoir obtenu sur la période 2014-2020 pour le développement rural et les efforts environnementaux des agriculteurs, était versé, à la demande britannique mais sans contestation de notre part, vers un autre volet, vraisemblablement social (lire ici).

La croissance verte est décidément bien loin…

En savoir plus : cet article est diffusé simultanément sur Atlantico sous l’url http://www.atlantico.fr/decryptage/quand-gouvernement-et-verts-dissimulent-manque-ambition-ecologique-en-tirant-agriculteurs-848124.html.

2 Commentaire(s)

  1. L’agriculture raisonnée ou raisonnable en thermes de doses, de fréquence, d’utilité ‘est peu être pas si « rose » que cela semble être. Un petit tour sur le terrain pourrait mettre à mal bien des illusions.
    Sans être d’accord avec le programme des verts, il faut quand même reconnaitre qu’un bon nombre d’agriculteurs trainent à évoluer, hypocritement aidé par les firmes, les coops, qui n’ont pas encore intérêt aux changements, mais qui pour les plus malins s’y préparent.

  2. Aucune des politiques menées par les Etats, notamment économiques et sociales, avec leurs aspects écologiques, migratoires, de l’emploi, de santé publique, de sécurité, etc. ne peut avoir de sens si ne sont pas pris en compte les fondamentaux de la démographie mondiale et les problèmes (dont la pauvreté, la violence et les atteintes à l’environnement) qu’elle génère inexorablement.
    L’empreinte écologique de l’humanité résulte d’une transfusion à son profit des ressources limitées de son habitat qu’est la terre. C’est ce qui est extorqué à celle-ci pour le développement de l’espèce la plus performante de toutes, notamment en termes de prédation
    L’écologie en tient-elle compte , quand elle néglige que chaque jour 200 à 250 000 êtres humains supplémentaires déferlent sur la terre ? Quand elle est mise au service d’intérêts politiques partisans, plutôt que défendue par eux. ? Non ! Elle n’est plus l’écologie mais une idéologie comme une autre, luttant pour la conquête du pouvoir, à des fins noyées dans un flot de revendications démagogiques.
    Elle devient écologie-politique, ou écopolitique, véhiculée par les partis qui la servent ; discipline traitant des questions d’environnement à travers le prisme d’ambitions qui la cocufient, en niant ou en ignorant les effets d’une croissance démographique incontrôlée.
    Le seul combat écologique qui vaille est désormais celui mené en faveur de la dénatalité ; conduisant à limiter la taille et les proportions de la pyramide sociale, pour adapter celle-ci aux ressources de la planète. C’est par contre une utopie que de croire l’homme disposé et capable de renoncer au développement et au progrès dont il est porteur.
    Pour approfondir cette réaction, voir :
    http://claudec-abominablepyramidesociale.blogspot.com
    Les articles et commentaires publiés sur ce blog sont accompagnés de schémaset tableaux, à l’intention des visiteurs que décourage la lecture.

Il n'y a pas de commentaires pour le moment. Soyez le premier à participer !

Article Précédent
Article Suivant