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Chambres d’agriculture, de Guy Vasseur à Claude Cochonneau

Guy Vasseur n’est plus président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture. Devant une brochette de journalistes, il a dressé un bilan sommaire de ses 43 années d’engagement professionnel au Cnja puis comme président de chambres départementale et régionale d’agriculture dans le Centre, avant de monter à Paris.

« Nouvel » ancien président de l’Apca, Guy Vasseur s’est livré, le 15 novembre dernier, à un certain nombre de confidences, mais aussi à quelques critiques, au cours du dernier déjeuner de presse de son mandat. Depuis le 24 novembre, il a mis fin à ses fonctions de président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (Apca) qu’il occupait depuis 2010.

A propos de Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, Guy Vasseur a déclaré : « Si le ministre avait prodigué une agriculture plus agronomique dès son entrée en fonction, personne ne s’y serait opposé ! Mais avoir voulu inscrire, dans un contexte de crises à répétition, l’agriculture dans la transition dite « agro-écologique », c’était mal venu ! »

Dit autrement, la politique agricole française est une question de sémantique et de contenu. Et l’hôte de la rue de Varenne n’aurait tout simplement pas choisi les bons mots pour présenter son projet pour l’agriculture française, inféodalisant la part environnementale légitime à une écologie très politicienne. D’où le profond et persistant malentendu avec le monde agricole ! Car sur le fond, ministre et agriculteurs seraient presque en phase, a laissé entendre Guy Vasseur : « Quand Stéphane Le Foll avait lancé l’initiative 4 pour 1000 à l’occasion de la Cop21, les chambres d’agriculture ont répondu présent ! », a rappelé l’ancien président. « Mais en parlant d’agro-écologie, les agriculteurs ont vu rouge. Ça les a braqués ! » 

Les Chambres d’agriculture pouvaient « se faire spolier » de 130 millions d’euros

Guy Vasseur affirme avoir toujours cherché à travailler avec Stéphane Le Foll, « confronté à des situations bien difficiles tout au long de ses cinq années passées, rue de Varenne. Il a dû faire face à de nombreuses crises dès sa prise de fonction: Doux, Gab, problèmes sanitaires, surproduction, sécheresses et inondations, etc… Aucune filière n’a été épargnée ».

« Mais c’est en bon bagarreur, fidèle à mes engagements de conforter le rôle des Chambres d’agriculture dans le concert national que j’ai empêché ces dernières de se faire spolier de près de 130 millions d’euros en 2015 ! » Le gouvernement prévoyait alors de ponctionner une partie du fonds de roulement des Chambres d’agriculture pour alimenter le budget national. En fait, Guy Vasseur a affirmé avoir eu plus de difficultés pour travailler avec les membres du cabinet de Stéphane Le Foll qu’avec le ministre lui-même. « Ils ne sont pas tous à la hauteur pour apprécier la gravité des situations », déplore t-il.

Au cours des cinq dernières années, le ministère de l’environnement a aussi « compliqué la tache du ministre de l’agriculture, affirme le président sortant de l’Apca. Personne ne peut s’opposer à madame Ségolène Royal, la ministre !»

Sinon, Guy Vasseur a travaillé avec les deux majorités de droite puis de gauche et, trois ministres de l’Agriculture : Christine Lagarde (très peu de temps), Bruno Le Maire puis Stéphane Le Foll. Mais François Hollande, président de la République et plusieurs membres du gouvernement actuel suivaient aussi l’actualité agricole et ses enjeux, ajoute-t-il. Michel Sapin, ministre de l’Economie en fait partie. Lui et sa famille sont propriétaires de plusieurs centaines d’hectares de terres agricoles et de forêt dans l’Indre mais « d’une valeur bien supérieure à celle déclarée dans sa déclaration de patrimoine », a ajouté Guy Vasseur sur le ton de la confidence.

Manuel Valls, Premier ministre, a aussi été un interlocuteur. L’ex-président de l’Apca n’a pas hésité à le rencontrer lorsque la situation l’imposait, pour défendre les intérêts des Chambres d’agriculture quand la situation l’imposait, « quitte à voler la politesse au ministre Le Foll ».

L’heure du bilan

« Durant mon mandat, l’Apca a su infléchir les politiques et instiller quelques idées », a défendu son ex-président. Celui-ci se réjouit aussi d’avoir renforcé leurs fonctions de conseil et d’expertise. Et le changement de logo « a repositionné les chambres dans l’accompagnement de tous les agriculteurs dans tous les territoires ».

« L’Apca est à la fois un partenaire de la politique nationale tout restant en lien avec le terrain grâce aux Chambres d’agriculture, capables d’apporter des conseils à tous les porteurs de projets », a ajouté Guy Vasseur.

Ces dernières années, les Chambres se sont vues confier de nouvelles missions : dès 2010, l’installation, puis les programmes Ecophyto, la constitution du réseau des fermes Déphy, et le registre de l’agriculture. Ce sont aussi, les chambres qui ont accompagné les exploitations en période de crise. En 2015, les Chambres d’agriculture étaient déjà en ordre de marche lorsque les régions ont été redessinées, a rappelé Guy Vasseur. Aussi, il n’était pas question de réduire leurs capacités budgétaires et d’actions, comme avait tenté de faire le gouvernement à plusieurs reprises.

Le 24 novembre dernier, Guy Vasseur a tenu un de ses derniers engagements pris lorsqu’il a été réélu en 2013 à savoir : quitter ses fonctions en cours de mandat « pour permettre à une autre équipe de se mettre en place et laisser ses membres se roder à leurs nouvelles missions d’ici les prochaines échéances électorales en 2019 », a-t-il expliqué à la presse.

Le successeur de Guy Vasseur est Claude Cochonneau, jusqu’alors vice-président de l’Apca chargé des questions économiques. Il a été élu par les présidents des chambres départementales et régionales d’agriculture réunis en session. Dans les Pays de la Loire, il est aussi président de la Chambre régionale d’agriculture.

Au cours de ses 43 années d’activités syndicales au Cnja (le syndicat qui précédait JA) puis comme élu au sein des Chambres d’Agriculture du Loir et Cher, de la région Centre et enfin de l’Apca, Guy Vasseur a rencontré et travaillé avec plus de vingt ministres de l’Agriculture. Et il a su nouer, avec certains, des collaborations étroites. Il en a évidemment apprécié plus certains que d’autres, de tous bords.

Dès 1974 au Cnja, ses compagnons de route étaient déjà Jean-Michel Lemétayer, ancien président de la Fnsea décédé, puis, Xavier Beulin l’actuel président de la Fnsea, originaire de la région Centre.

Mais depuis quelques jours, Guy Vasseur, n’a plus ni mandat électif (il ne s’était pas représenté aux élections du conseil régional), ni mandat professionnel. Il sera un homme libre de tout engagement. Mais un homme de cette envergure va-t-il rester longtemps sans responsabilités ?

Pour les prochaines présidentielles, les primaires de la droite et du centre en particulier, il a « donné son avis à ceux qui m’ont consulté mais je n’ai frappé à aucune porte ». « Deux candidats de droite à la candidature pour la présidentielle de 2017 m’ont contacté. Mais si dans les semaines à venir, un candidat de gauche me sollicite, je n’hésiterai pas non plus à lui répondre. » Il n’est pas question d’affaiblir la position de l’Apca en prenant officiellement position pour l’un ou l’autre des candidats.

Selon lui, l’avenir de l’Agriculture sans l’Union européenne est inenvisageable. Le Brexit : l’ancien président de l’Apca redoute que les Anglais négocient hardiment les conditions de leur scission. Mais il espère que leur départ modifiera les positions des Pays-Bas, des pays scandinaves jusqu’alors sous l’influence britannique mais aussi des membres de l’est de l’Union européenne. La crise agricole a eu raison de leur engouement libéral. Même en Ukraine, les responsables professionnels revoient leur position.

« La Pac en 2020 : il faut que les agriculteurs se retrouvent sur l’essentiel et fassent barrage à toutes les démagogies. La prochaine politique agricole commune devra répondre aux attentes de la société avec pragmatisme. Il n’y a pas de place pour les doctrinaires et le clanisme », a affirmé le président sortant.   

Première intervention de Claude Cochonneau

Lors de son premier point de presse avec les journalistes de la presse agricole, Claude Cochoneau, le nouveau président de l’Apca a déclaré avoir été élu pour un mandat de 2 ans, jusqu’aux prochaines élections des représentants des Chambres d’agriculture début 2019.

Les trois points traités sont la résilience des exploitations agricoles face à la crise, la nouvelle réforme de la Pac pour 2020 voire 2022 et l’action du ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll. A propos de ce dernier, Claude Cochonneau a tenu, comme son prédécesseur des propos, plutôt conciliants. « Il n’a pas eu la tâche facile. Toutefois, son grand tord est d’avoir concentré son action sur la transition agro-écologique de l’agriculture française, en fragilisant de surcroît les capacités d’exportation de produits agricoles et agro-alimentaires de notre pays. »

La prochaine réforme de la Pac, le président de l’Apca la voit plus assurantielle et davantage soutenu par des fonds publics. Toute augmentation du budget de la Pac est exclue selon Claude Cochonneau. Enfin, la crise a permis de classer, selon lui, les exploitations en fonction de leur capacité de résilience et d’observer des écarts de revenu de un à quatre entre exploitations similaires.

Ci-dessous, Guy Vasseur et Claude Cochonneau (photo de Guy Vasseur : WikiAgri ; photo de Claude Cochonneau fournie par l’APCA).

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