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Campagne de blé 2019-2020, les débouchés de la France à l’export

Agritel, l’organisme spécialisé dans la gestion des risques a dressé un premier panorama de la campagne d’exportation de blé français d’ici le mois de juin 2020. Sur les 35,6 millions de tonnes (Mt) de blé collectées, près de 20 seront vendues dans l’Union européenne ou à des pays tiers.

Plus d’une tonne de blé collectée durant la campagne, débutée le 1er juillet dernier, sera exportée. Sur les 39 millions de tonnes (Mt) de blé produites selon Agritel, l’organisme spécialisé dans la gestion des risques, 35,9 Mt seront collectées et près de 20 Mt seront exportées.

Sur le marché intérieur, 9,8 Mt de blé seront destinées à l’alimentation humaine et 5,4 Mt de grains seront transformées par les industriels de l’alimentation animale. Au cours actuel, le blé est quasiment aussi compétitif que le maïs produit en Europe ou importé d’Ukraine.

Sur le marché européen, 8,2 Mt seront expédiées en Belgique, dans les Pays-Bas mais aussi au Portugal et en Espagne. La péninsule ibérique a été fortement touchée par des périodes de sécheresse et de déficits hydriques récurrentes. L’Espagne n’aurait produit que 5,5 Mt de blé contre 8 Mt l’an passé, selon le Conseil international des céréales.

En juin dernier, FranceAgriMer soulignait que les prévisions de ventes de blé vers l’Union européenne avaient été portées à 7,55 Mt.

Hors de l’Union européenne, 11,3 Mt devront être expédiées d’ici le mois de juin prochain pour que la France n’achève pas pas la campagne avec des stocks de report excessifs. Au cours des douze mois précédents, les exportations avaient porté sur 9,75 Mt.

Des écarts de prix moins importants

L’écart de prix entre le blé français et celui originaire de la Mer Noire (russe, ukrainien) est très faible depuis le début de la campagne. De plus, le blé disponible est de bonne qualité (taux protéique de 11,5 % ; poids spécifique élevé).

Le prix du blé français s’est ajusté dès le début du mois de juillet sur les prix en vigueur dans le bassin de la Mer Noire, quand les places des marchés ont appris que la France et l’Union européenne s’apprêtaient à récolter 150 Mt de blé.

Mais cet ajustement s’est fait au détriment des agriculteurs. Les prix de vente du blé « sorti ferme » sont inférieurs aux coûts de production (157 €/t en moyenne selon Agritel). Une partie des aides Pac à recevoir financera les surcoûts. Mais comme toujours, des exploitations agricoles s’en sortiront mieux que d’autres si leurs charges sont moins élevées que la moyenne ou si les rendements obtenus sont plus importants.

Les parités monétaires de plus en plus influentes

La baisse des prix des céréales aurait été plus forte si l’euro était plus fort face au dollar (1 € = 1,12 $). Mais la réévaluation du hryvnia (monnaie ukrainienne) par rapport au dollar américain, et donc par rapport à l’euro, réduit les  écarts de prix entre le blé français et du blé mis en vente en Ukraine.

Par ailleurs, les coûts de production des céréales ukrainiennes augmente chaque année (actuellement 105 €/t selon Agritel). Or dans le même temps, les frais logistiques continuent toujours à pénaliser les exportations. Ils s’élèvent à plus de 25 € la tonne contre moins de 4 € en France.

Les capacités d’exportation de l’Ukraine sont équivalentes à celles des Etats-Unis (30 Mt environ) alors que la production est dix fois moindre.

Quant aux exportations de blé vers les pays tiers, la France ne peut pas compter sur l’Algérie pour écouler, comme par le passé, une grande partie des grains disponibles à l’export vers les pays tiers. Elle doit trouver d’autres débouchés tant les volumes de blé disponibles sont importants. Par ailleurs, l’Algérie sera tentée d’importer du blé ukrainien puis argentin durant la seconde partie de la campagne au détriment des grains français.

Les marchés abondent de blé

Cependant, le Maroc pourrait constituer un débouché pour le blé français, plus important que lar le passé, à partir du mois de novembre prochain, quand la récolte de blé marocaine aura été consommée. Le royaume chérifien n’a produit que 4,5 Mt de blé dur et de blé tendre alors que 7 Mt avaient été récoltées l’an passé.

La France peut aussi espérer reconquérir les marchés des pays subsahariens (2,2 Mt de ventes en vue).

En fait, notre pays a les moyens d’affronter la concurrence des pays tiers alors que les marchés abondent de blé : 32 Mt de disponibles au Canada, plus de 83 Mt aux Etats-Unis en raison de stocks importants. Les grains exportés sont vendus à des prix compétitifs depuis le début de la campagne.

Dans l’hémisphère sud, l’Argentine se prépare à exporter 14 Mt outre-Atlantique et au Brésil. Le blé argentin concurrencera fortement les grains français durant la seconde partie de la campagne.

Pas d’accident climatique majeur

La dévaluation du peso argentin de plus de 30 %, au début de l’été, renforce la compétitivité du blé produit en Argentine. Pour autant, les prochaines élections présidentielles pourraient contrarier le déroulement de la campagne argentine de blé si les céréales sont de nouveau taxées à l’exportation.

Des marchés céréaliers approvisionnés en abondance depuis plusieurs campagnes est une situation exceptionnelle. La campagne céréalière 2018-2019 n’a pas été marquée par des évènements climatiques pénalisants dans le monde. La sécheresse australienne n’a eu aucun impact sur les cours mondiaux de blé. En Russie, les températures hivernales moins rudes favorisent l’extension de la culture des céréales d’hiver dans des régions où seules les cultures de printemps étaient auparavant envisageables. Aussi, le potentiel de production de l’agriculture russe n’a cessé de croître puisque le potentiel de production des variétés d’automne est plus élevé.

Mais statistiquement, les bonnes campagnes céréalières dans le bassin de la Mer Noire ne peuvent se succéder indéfiniment. L’Australie cumule des épisodes de sécheresse.

Or si un hiver particulièrement rigoureux ou une période de sécheresse torride survenaient, le choc serait brutal sur les places de marché. Hormis les Etats-Unis et l’Union européenne, les pays exportateurs de blé ne se constituent quasiment pas de stocks de report. Ils n’auront donc aucune marge de sécurité pour compenser les pertes générées par une mauvaise récolte.


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