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Bien organiser pour déplafonner l’activité

L’ETA Gauquelin basée près de Briouze dans l’Orne, compte aujourd’hui 25 salariés auxquels s’ajoutent trois équivalents temps plein saisonniers. Une répartition judicieuse des tâches entre les deux frères associés et une capacité à déléguer certaines responsabilités ont permis à l’entreprise de prospérer sur un terrain de jeu qui reste agricole à près de 100%. L’ETA n’en est pas pour autant épargnée par l’inflation sur les prix des matériels. 

C’est à Briouze, en plein cœur de la zone bocagère normande en appellation Camembert, que se sont établis deux des frères Gauquelin : Jean-Christophe et Patrice à la tête de la SAS Gauquelin spécialisée dans les travaux agricoles. L’empreinte laitière est ici bien visible. L’ETA s’est d’ailleurs établie dans une partie des anciens locaux de la laiterie de la marque Elle & Vire aujourd’hui devenue propriété de la coopérative Agrial. C’est ici qu’ils ont centralisé leur siège social avec leurs bureaux et l’ensemble du matériel. L’entreprise a été créée initialement par leurs parents agriculteurs en 1971. « Ils ont commencé sous les pommiers. C’est-à-dire qu’au départ, ils n’avaient pas vraiment de hangar ni d’atelier dédié, explique Patrice Gauquelin. Puis, ils ont commencé à structurer l’activité dans les années 80. C’était alors le plein développement des automotrices d’ensilage aux côtés des ensileuses traînées. Mes parents ont, dès le départ, commencé avec le constructeur John Deere. Leurs automotrices présentaient l’avantage d’avoir de grandes roues à l’avant et de pouvoir apporter des solutions de récolte en conditions humides ». Les entrepreneurs sont d’ailleurs encore aujourd’hui restés fidèles à la marque. 

Depuis le démarrage, de l'activité dans les années 70, les entrepreneurs sont restés fidèles au constructeur John Deere.
Depuis le démarrage, de l’activité dans les années 70, les entrepreneurs sont restés fidèles au constructeur John Deere.

Petit à petit, l’entreprise se développe au milieu des années 80 notamment par une activité d’épandage d’amendements pulvérulents qui tient encore aujourd’hui une grande place dans l’activité de l’ETA. Cette diversification a conduit quelques années plus tard les entrepreneurs à investir dans le transport pour pouvoir boucler la chaîne de service autour de ces prestations d’épandage. Se sont ajoutées également par la suite des prestations de travaux publics en 2003. Cependant, toutes ces activités de diversification sont restées en lien étroit avec le cœur de clientèle que constituent les exploitants et exploitantes agricoles et le secteur agricole en général.

Bien placés sur la chaîne verte

Réalisant tous les travaux agricoles généralistes, l’ETA se développe aujourd’hui beaucoup autour de la chaîne verte. « C’est véritablement un point sur lequel nous misons et sur lequel nous investissons, car c’est là que nous avons le plus de croissance depuis cinq ans. Nous avons eu raison d’y croire », soulignent les entrepreneurs dont l’activité est située au cœur des zones de production de plusieurs appellations fromagères normandes d’origine protégée. L’entreprise Gauquelin se positionne ainsi sur toute la chaîne de valeur de la récolte de l’herbe – depuis la fauche, jusqu’au ramassage en passant par l’andainage avec une prestation d’andainage à tapis. En plus des ensileuses classiques, les établissements proposent un ramassage de l’herbe à l’autochargeuse depuis deux ans. Cette prestation répond à une demande de réactivité et de réduction des besoins en main d’œuvre à l’ensilage.

Gérer les ressources humaines

Au fil des années, l’entreprise s’est développée et compte aujourd’hui 25 salariés, auxquels il convient d’ajouter 3 équivalents temps plein sur l’année de main d’œuvre saisonnière. L’entreprise semble ainsi être parvenue à dépasser un plafond de verre en termes de main d’œuvre et de volume d’activité. Cela s’explique notamment par une répartition cohérente des responsabilités entre les deux frères. Jean-Christophe s’occupe de toute la partie amont, c’est-à-dire les achats et la gestion de l’atelier. « Il nous donne les moyens à tous de bien travailler, explique Patrice. De mon côté, je gère l’administratif, le commercial dont la relation avec les clients. Ces dernières années, j’ai entrepris de déléguer les parties administratives pour l’activité de transport et de travaux publics auprès notamment d’une des employées qui a petit à petit créé son poste. Mon fils devrait également nous rejoindre prochainement, après avoir suivi une licence pro de gestion, management et marketing à Rennes. Il a par ailleurs travaillé deux ans dans une belle ETA bretonne ».

Formation continue des conducteurs

Cette structuration nécessaire des ressources humaines au sein de l’entreprise s’accompagne également d’une recherche de convivialité au sein de l’entreprise. Tout est prévu pour pouvoir partager des pauses repas ensemble le midi. « Le travail en ETA reste difficile. Tout le monde a besoin de moments pour pouvoir souffler et lâcher la pression », insiste Patrice qui reconnaît que l’exercice n’est pas toujours simple. Mais certains signes ne trompent pas. Près de 80% des collaborateurs ont plus de dix ans d’ancienneté dans l’entreprise. Par ailleurs, les deux frères investissent dans la formation continue de leurs équipes. « Nous voulons que chaque conducteur puisse avoir une relation de professionnel à professionnel avec les agriculteurs, appuie Patrice Gauquelin. Pour cela, ils doivent avoir un minimum de connaissances techniques sur les productions agricoles et ne pas se contenter des aptitudes en conduite d’engin et de machinisme ». De fait, l’ETA s’implique avec les organismes de conseil technique ou des coopératives comme Agrial pour se positionner comme un vrai partenaire de construction de marge pour les agriculteurs et agricultrices. Les conducteurs sont par exemple sensibilisés à la problématique de tassage et de conservation des silos et à l’impact financier sur le stock fourrager utile pour les clientes et les clients.  De même, ils sont sensibilisés à la qualité de l’éclatement des grains de maïs à l’ensilage. Ce niveau d’exigence de formation permet également de s’assurer de la qualité des prestations. « Nous n’avons pas la réputation d’être les moins chers. Mais nous faisons de la qualité. En tant que chefs d’entreprise, cela nous permet de bien dormir la nuit », résume Patrice. 

L’ETA s’est établie dans une partie des anciens locaux de la laiterie de la marque Elle & Vire.
L’ETA s’est établie dans une partie des anciens locaux de la laiterie de la marque Elle & Vire.

Outre les compétences techniques additionnelles – les conducteurs de l’entreprise Gauquelin doivent être capables de réaliser l’entretien courant de leurs machines. « En outre, 5 de nos 18-19 chauffeurs passent les permis poids lourds. Chez nous, un conducteur doit presque savoir tout faire. Ils sont nos premiers ambassadeurs auprès de nos clients agriculteurs. C’est réellement la clé pour notre activité », souligne l’entrepreneur.

L’ETA s’est dotée d’une organisation interne qui lui a permis de croître. Cependant, dans le contexte actuel, les dirigeants ne visent pas de s’accroître, mais plutôt de se maintenir sur leurs marchés. « L’inflation nous pose vraiment un problème. Nous avons su gérer la hausse des coûts de l’énergie, mais la hausse des coûts des matériels devient réellement problématique, car elle est difficilement répercutée sur les prix des prestations – tant l’ampleur est grande. Par ailleurs, elle s’accompagne d’une hausse des taux d’intérêts. J’en appelle aux constructeurs pour qu’ils fassent des efforts ! », plaide Patrice Gauquelin qui est par ailleurs président du syndicat EDT Normandie. 

Poursuivre le virage agro-écologique

L’ETA Gauquelin s’est aussi construite ces dernières années sur la volonté d’être un acteur du territoire au service de la transition agroécologique. « Cela s’est traduit historiquement par notre positionnement dans des équipements de modulation, de coupure de tronçons, d’enfouissement des lisiers, de régulation électronique des débits d’épandage etc. Nous sommes par ailleurs équipés pour le binage du maïs, l’andainage à tapis qui préserve les valeurs azotées des fourrages et réduit les achats de soja d’importation.  Nous avons dès le lancement investi dans le système d’analyse embarqué des fourrages et des lisiers Harvestlab de John Deere pour pouvoir fournir des données en faveur de toujours plus d’agronomie et de précision. Cette année, nous lançons une activité de semis simplifié des céréales et des couverts avec la mise en service d’un Kuhn Espro 4000 avec le soutien du conseil régional. Notre ambition est de continuer d’être au service de toutes les agricultures ».

Alexis Dufumier

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