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BIEN CHOISIR SON CHARGEUR TÉLESCOPIQUE

Les chariots télescopiques sont des engins très sollicités et concernés par des exigences importantes : une erreur de casting peut se payer cher et longtemps

Le télescopique, ce chariot élévateur tout terrain est devenu un outil fréquemment rencontré dans les fermes. C’est d’ailleurs un allié de nombreuses productions ; que l’on soit éleveur hors sol, en pâturage, céréalier ou producteur de cultures industrielles. Le compromis de maniabilité et performance assure au chargeur à bras télescopique la réalisation de nombreuses tâches en plaine comme en étable. Attention toutefois à ne pas rêver d’un outil ultra polyvalent en signant un prochain bon de commande. Voyons les points majeurs qui caractérisent ces engins de manutentions.

Pour définir un modèle de chargeur télescopique il sera essentiel d’évaluer le volume annuel des travaux sur l’exploitation. Ainsi, on visualise davantage le profil des performances attendues tant au niveau des matériaux à transporter que des capacités de levage. L’environnement de travail va également affecter la rédaction de votre cahier des charges. A ce stade il faut définir les exigences de maniabilités ou contraintes de gabarits. Ne sous-estimé pas ces étapes pour définir l’engin le plus adapté à vos attentes. Des négligences de caractéristiques à l’achat peuvent s’avérer désastreuses tant au niveau de la qualité de travail que de la durabilité de l’engin en lui-même.

Ne pas confondre charger haut et vider loin

Tous les constructeurs annoncent des forces et hauteurs de levages maximales pour chacun de leurs modèles. Faire le choix d’un chargeur télescopique uniquement sur  ces caractéristiques  peut s’avérer  ubuesque. Que vous réalisiez un pailler ou que vous chargiez une semi-remorque de céréales, c’est plus souvent la profondeur de levage et le dégagement sous bennage qu’il sera judicieux de vérifier. Pour cela il est facile de retrouver les abaques de charges ou les schémas de dimensions des engins pour comparer les modèles. Alors que la hauteur de levage s’exprime lorsque l’outil frontal est à plat, il est judicieux de minorer parfois près d’un mètre lorsque le godet est abaissé pour sa vidange. Bien entendu, les travaux sans bennage réalisés avec des fourches à palettes ou des nacelles par exemple ne sont pas concernés. La profondeur offerte par le déploiement du bras télescopique est certainement le point le plus discriminent lors de chantiers de chargements. Cette performance également disponible dans l’abaque de charge offre d’avantage de souplesse pour affaiter le chargement d’une remorque ou encore pour empiler du fourrage sans être bloqué au pied de la pile de bottes. C’est dans ces configurations qu’il sera possible d’investir dans un chargeur télescopique qui lève plus haut que nécessaire uniquement pour gagner en profondeur de chargement.

Les capacités de charges sont souvent exprimées en kilogrammes et permettent de comparer les performances des chariots élévateurs sur le marché. N’oublier pas de vérifier la distance du tablier à partir de laquelle s’applique cette charge. Le milieu des fourches à palettes (50 à 60 cm) est souvent pris en référence mais il est bon de vérifier encore une fois sur l’abaque de charge fournie par tous les constructeurs. Lorsque vous estimez les poids maximums à transporter sur votre exploitation ou entreprise de travaux, n’oubliez pas de considérer la perte due au déploiement du bras télescopique. Qu’il soit composé de deux ou trois poutres, leur force de levage est souvent divisée par plus de deux lorsque le télescope est en bout de course. La capacité de levage est aussi un critère qui influence l’arrachement lors de chargement de matériaux compacts (terre et fumiers en tête). Il est cependant conseiller de viser un engin plus lourd sur l’essieu arrière ou largement lesté. En procédant par un recul de flèche ou du chariot on limite la sollicitation du bras tout en évitant les phé- nomènes de cabrages préjudiciables aux ponts avant et arrière.

La hauteur de déversement est spécifiée dans les dimensions et gabarits de l’engin. Ici la valeur N2 est plus impactante que la simple information de hauteur maximale largement communiquée

En plus des poids de levage maximum, l’abaque de charge vous renseigne sur la portée du bras en fonction de l’angle de la flèche.

Transmission : ne pas confondre rendement et force de traction

Les décennies se suivent et les débats sur le choix des transmissions perdurent. Même si les constructeurs peuvent proposer différentes technologies de boîtes de vitesses selon leurs modèles, quelques tendances demeurent selon les constructeurs. On retrouvera par exemple des convertisseurs de couples pour animer une boîte à rapport sous charge (power-shift) chez Caterpillar et souvent souvent chez JCB, tandis que Massey Ferguson ou l’italien Merlo conservent une transmission à deux rapports mécaniques animée par un circuit hydrostatique. Une troisième catégorie de couple embrayage-boîte anime notamment les télescopique chez Claas et Kramer. Cette évolution de transmission hydrostatique offre des performances notables en s’affranchissant totalement de rapports discrets.

La majorité des constructeurs optent pour des convertisseurs de couple. Chez Deutz- Fahr, certains modèles reçoivent 6 rapports power-shift.

  • Convertisseur de couple : les embrayages de cette catégorie sont encore parfois appelés (à tort) coupleurs. Il s’agissait pourtant de convertisseur de couple placé entre le moteur et une boîte de vitesses à rapport sous charge (power-shift). Ces transmissions ont longtemps été jugées comme plus performantes en traction lorsqu’il s’agit de rentrer dans un tas pour gaver un godet par exemple. Pour autant, les améliorations des transmissions concurrentes et l’incidence du poids sur la force de traction d’un chargeur automoteur ne justifie pas de privilégier cette techno- logie sur ce critère unique. En revanche, le rendement mécanique à vitesse élevée positionne cet embrayage à convertisseur avantageusement sur des travaux de transport à forte charge. Même si l’ajout d’une boîte de vitesse permet d’adapter le meilleur couple au moteur, il n’offre pas la possibilité de réduire le régime moteur lors de travaux à vitesse élevée lorsque la résistance est faible. La réactivité de conduite fait également partie des habitudes pour ce type de transmission. La mise en mouvement du télescopique nécessite parfois une accélération qui rebute les chauffeurs les plus économes.
  • Hydrostatique : cette transmission bien connue sur les automoteurs de récolte est également reconnu pour son rendement médiocre en traction. L’utilisation combinée de rapports de boîte de vitesse améliore considérablement la force de poussée de ces chargeurs télescopiques. C’est surtout sa simplicité et compacité qui en fait une trans- mission privilégiée sur les gabarits les plus étroits.
  • L’Integrated Continuously Variable Drive (ICVD) : Il s’agit d’une amélioration technique d’une transmis- sion hydrostatique. Conservant les avantages d’une boîte à variation continue, la grande variabilité de cylindrée des pompes hydrauliques permet d’améliorer considéra- blement le rendement de cette transmission en traction. Certains constructeurs comme Dieci ou Claas lui ajoutent une boîte de vitesses pour s’adapter au couple nécessaire. Cette technologie permet à certains modèles de chariot élévateurs à bras télescopiques de s’affranchir de boîte de vitesses. Même si sur le papier, cette transmission offre davantage de performance, son coût de conception et pilotage électronique fait croitre l’investissement de l’automoteur.

Choisir les caractéristiques hydrauliques sur le terrain

Lors d’un essai, l’animation de la flèche et son outil doit être plus rapide que la manœuvre pour placer l’engin devant la caisse à charger.

Les documentations techniques regorgent de données concernant les caractéristiques hydrauliques des chargeurs télescopiques. Débit (L/min) et pression (bar) en tête ne garantissent malheureusement pas toutes les performances en manutention ou chargement. En effet, même si l’on peut considérer que le débit offert par le circuit en proportionnel à la vitesse d’exécution des mouvements, cette performance dépend aussi du dimen- sionnement des vérins à animer. La rapidité de levage et de cavage devront donc être chronométrée à un régime constant lors d’un essai chez confrère ou une démonstra- tion d’un fournisseur. Même si un chargeur télescopique est équipé d’un circuit load-sensing, il sera préférable de l’éprouver également par la conduite. Cette technologie doit permettre d’animer plusieurs fonctions hydrauliques simultanément. Sans attendre la même réactivité d’une pelleteuse, veillez à tester votre prochain chargeur en cumulant levage, cavage et sortie de flèche. La pression du circuit définie tant qu’à elle la force potentiellement fournie par chaque vérin. Il serait encore une fois trop hâtif de comparer uniquement cette caractéristique pour juger de la force de poussée de la flèche par exemple. En effet, le dimensionnement et surtout le positionnement angulaire des vérins impactera davantage le force nette de levage ou bennage. Si vous utilisez un outil frontal qui nécessite un débit hydraulique continu, assurer vous que le modèle de télescopique permet de placer le distributeur de flèche en pompage continu (parfois réglable en débit).

D’autres exigences à intégrer

  • Motorisation : alors que les solutions de traitement des gaz d’échappement se concentrent, on peut noter des différences d’équipements ou accessoires autour des blocs moteurs des chargeurs télescopiques. Les ventilateurs réversibles permettent d’évacuer les pous- sières ou impuretés accumulés sur la calandre et sur les échangeurs. En bâtiment clos ou lors de travaux pous- siéreux, cette option peut être commandée de manière séquentielle ou programmée. La coupure du moteur lors des phases de ralentis est généralisée sur les modèles de chariots élévateurs dans le monde du BTP. C’est également une technologie disponible sur les modèles agricoles. Si votre profil d’utilisation est en manuten- tion ponctuelle avec de nombreuses phases d’opérations à pieds, cette technologie permet une forte réduction de consommation sans endommager le démarreur conven- tionnel du chargeur télescopique. Enfin, la télémétrie se généralise chez les tractoristes et les fournisseurs de chariots élévateurs tout terrains. En accédant aux circuits électroniques à distance via un serveur, il est possible de suivre toutes les informations de maintenance. Vous pouvez également consulter le profil d’utilisation de votre engin (consommation, part de ralentis, taux de charge…) afin d’améliorer ses performances ou réduire son coût de détention.
  • Ergonomie et confort : quelques options peuvent faciliter le travail d’un chargeur télescopique, améliorer son confort sans être pour autant superflues. La suspension de flèche stabilise l’engin en évitant des secousses parfois rencontrés lors de transport au champ. La secousse automatique du godet va également faire gagner du temps lors des phases de chargement. Certains constructeurs proposent un retour de l’outil frontal en position initial offrant un gain de temps et une précision dans les manœuvres les plus répétitives.

Le levage de personne nécessite une formation spécifique et l’utilisation de nacelles homologuées.

  • Sécurité et réglementation : Tous les engins de manu- tention et levage sont concernés par une réglementation plus stricte que celle des autres matériels agricoles. Le levage de matériaux conditionnés ou emballés impose d’abord la présence d’un clapet de sécurité sur le vérin de levage de la flèche. En cas de rupture de canalisation hydraulique, le vérin ne se vide pas et maintient donc la charge en hauteur. De plus, la conduite d’un chargeur automoteur n’est autorisée qu’à partir de 18 ans quelle que soit la largeur de l’engin. Dans le cas de sollicitation d’une main d’œuvre (stagiaire, apprenti, salarié…) les règles de conduite sont très exigeantes. Le chauffeur employé devra posséder une attestation de conduite (renouvelée tous les ans) délivrée par le chef d’entreprise. L’engin de manutention télescopique devra être contrôlé tous les six mois (un an si manutention uniquement de matériaux en vrac) par un organisme agrée. Ce dernier délivre alors une attestation de vérification générale périodique (VGP).

Une fois de plus le choix d’un engin agricole est à réaliser en fonction du profil d’utilisation. Après avoir listé toutes les caractéristiques attendues et les outils frontaux désirés, hiérarchisé vos attentes. Du simple souhait jusqu’à la contrainte de gabarit, n’hésitez pas à définir vos exigences pour faciliter le choix d’un modèle de chargeur télescopique.

Auteur: Julien Hérault

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