Les élevages américains de dimension industrielle de plusieurs centaines de vaches voire plusieurs milliers doivent leur rentabilité aux économies d’échelle qu’il est possible de réaliser. Le coût de l’alimentation dans l’ouest des Etats-Unis est deux fois plus élevé qu’en France et dans les élevages américains de dimension familiale. Comparaison d’échelles et de structures.
Si on ne s’en tenait qu’à l’alimentation, produire du lait en France serait plus rentable qu’aux Etats-Unis. Faute d’autonomie fourragère, nourrir une vache en Californie coûte deux fois plus cher que dans l’ouest de la France.
L’autonomie fourragère est devenue un facteur de compétitivité entre pays producteurs, pour lequel la France détient un avantage comparatif indiscutable.
Ce sont en revanche la rémunération de la main-d’œuvre et le coût des charges de structure qui rendent la production de lait américaine plus compétitive qu’en France ; dans les exploitations de plusieurs centaines de vaches en particulier. Dans celles de dimensions plus réduites (les systèmes de 80 vaches pris en référence dans le Wisconsin), c’est davantage la productivité par vache aux Etats-Unis qui rend le coût de production plus faible que dans les exploitations françaises comparables.
Mais de part et d’autre de l’Atlantique, les élevages sont de plus en plus vulnérables au moindre retournement de conjoncture des marchés de matières premières. Et surtout, les producteurs n’ont pas pu échapper à une forte hausse des charges d’alimentation depuis une dizaine d’années environ.
Ces propos sont extraits de l’étude de l’Institut de l’élevage, intitulée « Etats-Unis, une filière laitière solide et de plus en plus performante » qui passe en revue l’ensemble de la production aux Etats-Unis. Un des chapitres décompose, par poste de charges, les fonctionnements de 5 catégories de systèmes de production bien définis (lire en fin d’article) à partir des données collectées de 1996-1998 puis 2011-2013 (derniers chiffres disponibles).
Il en ressort que, en Californie, le coût alimentaire est jusqu’à 2 fois supérieur à celui des autres systèmes de production passés au crible dans l’ouest de la France car les animaux américains sont nourris avec des sous-produits achetés.
Sinon, les charges courantes autres qu’alimentaires, dans les systèmes français et du Wisconsin, sont élevées car elles sont réparties sur des élevages de plus petite dimension, comparées aux grosses structures californiennes.
Toutefois, le point mort, c’est-à-dire le prix à partir duquel l’exploitation commence à rémunérer la main d’oeuvre non salariée est compris, selon les cinq systèmes étudiés, entre 250 € et 300 € les 1.000 litres. Il est le plus élevé en Californie.
Et évidemment, le point mort a fortement augmenté sur la dernière décennie (+ 46 % en Californie et + 36 % New-York) essentiellement sous l’effet de la hausse des coûts de l’alimentation (+ 66 % en Californie et 62 % à New-York). Il est proche du point mort des systèmes de l’ouest de la France.
Néanmoins, la main d’oeuvre salariée employée est bon marché (souvent des immigrés pas toujours déclarés), les vaches produisent jusqu’à 11 000 litres de lait par an et les amortissements des équipements sont lissés sur un volume de production très important. Combinés, ces facteurs rendent les plus grosses exploitations laitières américaines structures très compétitives.
En Californie, les fermes de 33 millions de litres de lait emploient 34 salariés en moyenne. La production de lait par unité de main-d’oeuvre est de 940 mille litres contre 245 mille en France mais aussi, dans le Wisconsin, dans les exploitations de dimension familiale (73 hectares). Ceci dit, la rémunération de la main-d’œuvre pèse modérément sur les comptes d’exploitation.
En conséquence, « le coût de production total du lait aux Etats-Unis est globalement inférieur à celui des systèmes français. En moyenne sur 2011/2013, il allait de 297 à 404 € les 1000 litres pour les trois exploitations étatsuniennes étudiées contre 442 et 445 €/1.000l pour les deux exploitations types françaises », rapporte l’Idele. Ces montants intègrent la rémunération des producteurs.
Des marges de progrès existent. La différence de compétitivité serait plus accentuée si les élevages américains de grande dimension étaient plus autonomes en fourrages.
En revanche, les charges foncières sont proportionnellement plus élevées dans les exploitations américaines de dimension familiale, qui produisent leurs fourrages, que dans les grands élevages industriels conduits hors sol.
En Californie, des troupeaux de 3 000 vaches sont conduits sur des exploitations de 346 hectares, une superficie équivalente à celle des exploitations du Wisconsin de 500 vaches où les charges foncières ramenées aux 1000 litres sont en conséquence plus élevées.
En matière de rémunération des exploitants, le facteur « dimension de l’exploitation » explique aussi de fortes disparités de résultat entre les systèmes. En France et dans les fermes du Wisconsin de 80 vaches, la rémunération de l’exploitant est une charge répartie sur un volume de lait plus faible (pour rappel, en moyenne 246 000 litres par unité de main-d’oeuvre) au regard des autres systèmes passés en revue.
La production de lait plus intensive dans ces élevages américains (9 200 litres par vache laitière pour une production totale de 736 000 litres) ne génère aucun avantage comparatif puisque le recours à la main-d’oeuvre familiale est plus important : jusqu’à 3 unités de main-d’œuvre dont 2,3 non salariés.
Les cinq systèmes (cas types) retenus par l’étude de l’Institut de l’élevage pour comparer la compétitivité des filières laitières américaine et française sont :
En France, un système herbager de 66 vaches laitières et un système de 84 vaches dans la région Centre.
Aux Etats-Unis, des fermes de 80 vaches et de 500 vaches dans le Winconsin. En Californie, le modèle retenu par l’étude rassemble les exploitations de 3 000 vaches laitières qui emploient plus de 25 salariés en plus des exploitants.
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