epi rouille jaune

Rouille jaune, après les feuilles, l’épi !

Cette année, la situation est particulière : ce n’est pas une seule variété qui est atteinte mais un grand nombre de blés tendres, de blés durs et de triticales. S’il est trop tard pour protéger efficacement le feuillage de certaines parcelles, il est encore temps de protéger les épis, qui le moment venu, vont servir de refuge à la maladie !

–stop–La maladie nous a habitué à une apparition graduelle d’Ouest en Est pour la moitié Nord Loire. Cette année, elle est également dans le Sud de la France à des niveaux rarement atteints (en dehors de la variété Victo en 1997, dépourvue de tous gènes de résistance). Pour les plus anciens, il faut se souvenir de 1975 avec la variété Joss pour constater une épidémie comparable.

2014 : un niveau jamais atteint

La rouille jaune signalée depuis le début février atteint des niveaux de gravité record. Elle est présente sur l’ensemble de la France sur blé tendre, blé dur et triticale. Ponctuellement, elle a pu également être signalée sur orge.

Pour la première fois, devant le niveau de maladie observé en mars, nos recommandations encouragent à déclencher un traitement avant le stade « épi 1cm ». Force est de constater que ces premiers traitements ont été efficaces. Toutefois, devant la pression parasitaire exceptionnelle, la persistance des produits n’a pas dépassé 3 semaines. Par la suite, la rouille a redémarré sur certaines parcelles et des foyers ont été signalés sur de nouvelles parcelles. Le mois d’avril, pendant la montaison, une certaine dilution de la maladie dans une biomasse en forte en croissance a donné l’illusion d’une accalmie.

En mai, la plupart des blés ont émis leur dernière feuille. La rouille jaune a continué sa progression, même dans les parcelles traitées, pour s’installer sur la nouvelle pousse. Les températures qui s’élèvent progressivement ne permettent pas de stopper son extension.
Comme en 2013, les triticales sont très attaqués, à un point tel que cela nuit à l’image rustique de la culture (pas ou peu de besoin de protection fongicide). Sur blé dur, les variétés les plus cultivées sont sensibles à la rouille jaune et le sud-ouest est particulièrement touché.

Des symptômes parcellaires impressionnants

Les symptômes ressemblent à des manques d’azote ou à une phytotoxicité, mais ce sont des décolorations sur les feuilles provoquées par la rouille jaune.



Très grands foyers

Puis une attaque généralisée à la parcelle


On observe également des jaunissements très prononcés.



Des feuilles très jaunes qui ne ressemblent pas aux symptômes habituels.

Mais où sont passées les pustules ?

     



Selon les variétés, l’expression des symptômes est différente. Le symptôme classique avec des pustules alignées dans une strie est toujours présent, mais il n’est plus aussi fréquent. On observe souvent des décolorations peu ou pas sporulantes, qui se rejoignent pour donner à la feuille une couleur presque totalement jaune.

Ce type de symptômes s’observe aussi après des applications fongicides. La rouille jaune en cours d’incubation a pu être détruite mais le cycle du champignon s’achève tout de même par l’expression de plages jaunes avec ou sans pustules.

L’effet des températures élevées

Habituellement, les pustules de rouille jaune disparaissent à une température de 25 °C. Par contre, les stries restent et peuvent former des plages nécrosées importantes.



Y a-t-il encore quelque chose à faire ?

Dans certains cas, des dégâts sont déjà faits. Mais il est encore possible de les limiter dans les parcelles concernées. Les traitements à la dernière feuille devront évidemment prendre en compte la rouille jaune. La dose devra être relevée pour certains produits et il sera même conseillé d’ajouter une strobilurine avec ceux qui ont une activité trop faible sur la maladie.

Eviter le passage de la maladie sur épi

Pour les blés qui nécessitent un traitement à la floraison, les produits actuels se composent d’un ou plusieurs triazoles et prennent en compte la rouille jaune. La dose pourra être adaptée en fonction du niveau du ou des triazole(s) et du traitement réalisé à la dernière feuille.

Pour les blés (tendres pour la plupart) pour lesquels il n’est pas prévu de traitement sur l’épi, il est conseillé sur les variétés x parcelles concernées de réaliser une application à l’épiaison avec un triazole efficace : type époxiconazole ou tébuconazole.

En effet, tous les organes formés après une application fongicide ne sont pas protégés et risquent d’être contaminés rapidement, en raison du climat actuel et de la présence d’une quantité d’inoculum abondante dans l’environnement. Les glumes sont à considérer comme des petites « feuilles » susceptibles d’être attaquées par la rouille jaune. La sporulation apparaît généralement à l’intérieur de la glume, comme en 2012. Un tel scénario est redouté pour 2014.

La nuisibilité de la rouille jaune n’a jamais été chiffrée, étant donnée la rareté des attaques sur épis et l’absence d’essais fongicides à ce stade. On peut toutefois s’attendre à de fortes pertes de rendement.

Et si la rouille jaune passait sur épis ?

Les symptômes sur épis ne sont pas toujours faciles à détecter. Une partie de l’épi est décolorée mais cela peut passer pour un début de maturité. Il faut donc écarter la glume pour apercevoir les spores de rouille jaune qui en fonction du stade d’infection ont pu (ou non) faire avorter le grain.

 

Jean Yves MAUFRAS (ARVALIS – Institut du végétal)

 

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