Le biologiste belge Marc Van Montagu vient de recevoir le prix mondial de l’alimentation (world food prize) pour l’ensemble de son oeuvre. Or, Marc Van Montagu est l’inventeur des OGM, qui sont donc en l’occurrence considérés comme une avancée sociale majeure.
Le prix mondial de l’alimentation est un prix qui récompense les avancées, souvent scientifiques, en matière d’alimentation. L’humanité, depuis la nuit des temps, a toujours su progresser et a su s’accroître en trouvant les moyens de s’alimenter. Ces moyens ont fait appel à la nature, mais aussi à l’ingéniosité des hommes pour savoir la dominer. Aujourd’hui, on connaît les enjeux : être capable de nourrir 9 milliards d’humains (et même plus d’après les dernières estimations) à l’horizon 2050. Avec la perte de terres agricoles, l’enjeu consiste à nourrir trois fois plus d’êtres humains en 2050 qu’en 1960, avec 2,5 fois moins de terres arables. On peut retourner le problème dans tous les sens, parvenir à cet enjeu n’est pas possible sans progrès dans les rendements. D’autant que, parallèlement, la qualité de cette alimentation augmente. La Chine est passée du fameux bol de riz par jour par habitant à une aspiration à manger de la viande au moins une fois par semaine : non seulement la population de la Chine, ou de l’Inde, croit, mais en plus il s’agit de nourrir le bétail qui va nourrir l’homme.
Face à cette problématique, les OGM peuvent être considérées comme une solution. WikiAgri a publié, dans le numéro 8 de son magazine, un reportage en Espagne avec l’interview d’un producteur de maïs OGM, lequel disait pouvoir faire une quatrième récolte en deux ans, soit 25 % de rendement en plus.
Plus récemment, début octobre, l’AFBV (association française des biotechnologies végétales) et la SAF société des agriculteurs de France ont organisé une journée d’information sur le sujet. Marc Van Montagu y était présent. Selon lui, les OGM ont subi « la plus grande campagne des années 1990, mais aujourd’hui l’urgence est devenue extrêmement grande« . « Avoir plus de 3 milliards d’humains qui vivent avec 1 à 2 € par jour, c’est inadmissible dans notre société« , avait-il ajouté. Le scientifique belge intervenait ainsi dans le cadre d’une conférence de presse de l’AFBV où justement son président, Marc Fellous, se demandait comment redonner bonne presse aux OGM après cette fameuse campagne évoquée plus haut, alors que toutes les études scientifiques sérieuses ont démontré l’efficacité en termes de rendements et d’environnement des OGM, tout en préservant le sanitaire.
Cette négation du progrès, finalement très égoïste (on a peur pour soi alors on refuse ce progrès aux générations futures), et qui fait prendre des risques à l’humanité entière, fut également débattue tout au long de l’après-midi de cette journée d’information, par des intervenants de standing. Parmi eux, citons l’économiste renommé Philippe Chalmin qui s’est montré ainsi « surpris de la manière dont les OGM sont devenus un casus belli politique« , comparant la situation à celle des gaz de schiste : « C’est irrationnel, il n’y a pas de raisonnement scientifique, dans les deux cas on rejette, sans discernement. » Et en refusant d’essayer de trouver le juste compromis qui changerait la peur en risque acceptable. Pour lui, « les OGM ne sont plus une question scientifique, c’est un enjeu politique« .
En disant cela, n’a-t-il pas répondu en partie à la question que se posait Marc Fellous plus tôt dans la journée : comment redonner bonne presse aux OGM… En entrant dans le jeu politique.
En savoir plus : http://www.worldfoodprize.org (site internet du prix mondial de l’alimentation) ; http://www.biotechnologies-vegetales.com (site de l’AFBV, association française des biotechnologies végétales) ; http://www.agriculteursdefrance.com/fr/LesConferences.asp?ThemePage=3&Rubrique=10&Num=17 (le programme du colloque organisé début octobre par l’AFBV et la SAF).
Notre photo : Marc Fellous et Marc Van Montagu.