Initiative Agri Nouvelle Aquitaine soutient des candidats à l’installation en leur allouant des prêts d’honneur pour faciliter le financement de leur projet auprès de banques. Ils bénéficient aussi d’un encadrement des services de la Chambre d’agriculture de leur département. Lancé en Dordogne, ce dispositif est étendu l’an passé aux douze départements de la région.
Ce 19 avril 2017 s’est tenu le premier comité d’Initiative Agri Charente à Angoulême. Il a validé les projets des trois premiers candidats charentais à l’installation en leur attribuant des prêts d’honneur.
Ces futurs agriculteurs ne sont pas éligibles au statut des jeunes agriculteurs, ni à leur dotation. Pourtant leur projet est économiquement viable. Ils doivent même devenir exploitants à plein temps.
Ghislain Prisset est un des premiers bénéficiaires charentais d’Initiative Agri Nouvelle Aquitaine. Les membres du comité départemental, qui rassemble des représentants des Chambres d’agriculture, de l’artisanat, des banques mais aussi des chefs d’exploitation, des experts comptables et la Siagi, lui ont accordé un prêt d’honneur de 20.000 € remboursable en 5 ans. Ce prêt conforte les fonds propres de l’agriculteur en finançant essentiellement son besoin en fonds de roulement, une aide précieuse pour démarrer sainement son activité. Mais surtout, il facilite l’obtention d’un prêt complémentaire auprès d’un organisme bancaire.
« En allouant ces prêts d’honneur, les banques (Crédit Agricole, Crédit mutuel, Banque populaire) sont davantage enclines pour financer les projets des futurs agriculteurs. Ce soutien est même un véritable effet de levier puisque les emprunts alloués sont 5 à 6 fois supérieurs aux prêts d’honneur accordés », commente Anne Pédenon, chargée de mission à Initiative Périgord. Mais l’emprunt a été préalablement négocié directement entre le chargé d’affaires de la banque et l’agriculteur après avoir analysé le projet d’installation de ce dernier.
Des prêts d’honneur sont ainsi alloués depuis sept ans en Dordogne aux candidats à l’installation non éligibles au statut jeune agriculteur et, depuis l’an passé, Initiative Périgord est chargé de régionaliser le fonds Initiative Agri à la Nouvelle Aquitaine entière. Il est ainsi étendu aux douze départements de la région et il revient depuis à Christophe Deffarges, responsable du pôle installation – transmission à la Chambre d’agriculture de Dordogne, d’assurer son développement en collaboration avec Anne Pédenon.
Les objectifs de ce dispositif régional n’ont cependant pas changé. Initiative Agri Nouvelle Aquitaine facilite l’installation des candidats non éligibles aux aides à l’installation (dotation jeune agriculteur, ou DJA), soit par la reprise d’une exploitation, soit par la création d’activité dans le secteur agricole (pour plus de détails, lire l’encadré ci-dessous). Dans tous les cas de figure, le projet doit aboutir à l’installation d’un chef d’exploitation à titre principal au moment du déblocage du prêt d’honneur.
Depuis son lancement, Initiative Périgord répond à un réel besoin identifié à la fin des années 2000 par la Chambre d’agriculture de Dordogne. « En 2008, le comité d’orientation installation de la chambre d’agriculture de la Dordogne avait alors demandé de réfléchir à un dispositif accompagnant ses porteurs de projet non éligibles à la DJA », explique Christophe Deffarges.
A cette époque, les services de la Chambre d’agriculture avaient constaté que deux tiers d’entre elles échappaient à tout accompagnement sur les 120 installations enregistrées par la Msa. Les nouveaux agriculteurs s’inscrivaient alors au Centre de formalités pour entreprises sans bénéficier de conseils à l’installation et sans soutiens financiers particuliers. « Mais après recherche, le choix s’est porté sur le dispositif du réseau initiative… qui existait pour les artisans et les commerçants mais pas pour les agriculteurs ! », ajoute Christophe Deffarges.
Depuis 2008, en recourant au dispositif Initiative Périgord devenue Initiative Agri Nouvelle Aquitaine, plus de 30 candidats à l’installation périgourdins sont dorénavant accompagnés chaque année par la chambre d’agriculture de Dordogne. Ses services étudient la faisabilité de leur projet avant de le transmettre à une banque pour négocier des prêts. Mais ce sont toujours les futurs agriculteurs qui présentent au final leur étude d’installation aux membres du comité d’Initiative.
Comme l’agriculture est une activité qui immobilise beaucoup de capitaux, le montant moyen des prêts d’honneur alloués est supérieur (16 000 €) à celui accordé dans l’artisanat (9 000 €) pour des projets qui avoisinent près de 130 000 €.
A l’avenir, le nouveau régime « microBA agricole » pourrait inciter davantage de porteurs de projets à solliciter Initiative Agri Nouvelle Aquitaine pour s’installer. Aujourd’hui, près d’une quarantaine par an échappe à tout dispositif d’accompagnement.
Pour lancer son activité, Initiative Périgord a bénéficié d’un fonds alloué par le Feder (Fonds de développement rural de l’Union européenne) complété et abondé quelques années après par le conseil régional d’Aquitaine. Ces fonds sont régénérés au fur et à mesure des remboursements des prêts alloués aux porteurs de projet.
L’an passé, 1,3 million d’euros de prêt a été accordé pour compléter le financement des 45 projets présentés à Initiative Périgord. Depuis le lancement du dispositif, les prêts alloués s’élèvent à 3 millions d’euros.
Les dossiers d’installation, traités par Initiative Périgord, renforcent l’émergence d’exploitations affranchies des marchés des matières premières agricoles. Ils privilégient la production et la commercialisation en ventes directes. 60 % des postulants aux prêts d’honneur ne sont pas issus du monde agricole (tout au plus ont-ils des liens familiaux éloignés ou des souvenirs de vacances passés dans une ferme).
Les candidats à l’installation, qui font appel à Initiative Agri Nouvelle Aquitaine, sont des femmes et des hommes diplômés mais pas forcément en agriculture. Ils se reconvertissent professionnellement dans cette activité après avoir exercé d’autres fonctions pendant plus de dix, voire, vingt ans.
Parmi ces candidats, la tranche d’âge des 30-40 ans est majoritaire. Leur attrait pour la Dordogne s’explique par les opportunités qu’offrent le département, le climat (on peut tout faire) et par le prix du foncier bon marché.
Et parmi l’ensemble des porteurs de projets, seuls 10 % sont étrangers. Cette année, Initiative Agri Nouvelle Aquitaine accordera un prêt d’honneur à Rustem, un agriculteur kurde de Turquie, éleveur d’ovins et producteur de noix depuis quelques mois. Fils de maquignon, il est le premier Turc a acquérir en France le statut d’agriculteur.
Le projet initiative Périgord fait des émules. En Auvergne, de département de l’Ariège se lance seule dans le dispositif. La région Nord semble étendre son programme d’installation qu’elle avait lancé il y a plus de vingt ans pour faciliter la reconversion de chômeurs vers une agriculture privilégiant les circuits courts. Dans cette région fortement peuplée, l’agriculture périurbaine est commune.
Pour le candidat : ne pas être éligible à la DJA (pour les moins de 40 ans : non titulaires d’un diplôme de niveau 4 agricole et ne pouvant pas bénéficier de la dérogation)
Au moment du dépôt de la demande : ne pas être installé, ou être installé depuis moins d’un an (inscription MSA). Les agriculteurs déjà installé comme cotisant solidaire ou à titre secondaire sont aussi éligibles à Initiative Agri Nouvelle Aquitaine.
Dans tous les cas de figure, le projet doit aboutir à l’installation d’un chef d’exploitation à titre principal au moment du déblocage du prêt d’honneur.
Da Le plan de financement doit obligatoirement comporter :
– un emprunt bancaire qui doit être supérieur ou égal au prêt d’honneur ;
– si possible un apport personnel qui peut être valorisé en nature (foncier inclus) et/ou en numéraire.
Investissements pris en compte pour l’évaluation du montant du prêt d’honneur : tous les types d’investissements liés à l’exploitation agricole peuvent être pris en compte pour l’évaluation du montant du prêt d’honneur : parts sociales, moyens de production neufs ou occasion, foncier, cheptel, besoin en fonds de roulement …
Apports personnels : tous les apports personnels valorisés en nature peuvent être pris en compte : matériel, foncier, cheptel…Ils doivent être justifiés au moment du décaissement du prêt d’honneur.
En savoir plus : http://www.initiative-france.fr/Creer/Pret-d-honneur (mieux connaitre les prêts d’honneur).
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