La Russie et l’Ukraine produisent 200 millions de tonnes (Mt) de céréales, soit 9 % de la production mondialeLes deux pays exportent environ la moitié de leur production. Ces ventes équivalent à un quart des exportations des principaux pays exportateurs de grains. Si le conflit armé dure, la sécurité alimentaire de nombreux pays est menacée.
Le 11 mars dernier, lors de la réunion des ministres de l’Agriculture du G7 (1) présidé par l’Allemagne, l’Ukraine et son Agriculture étaient évidemment le principal sujet au cœur des discussions.
Invité par le G7, Roman Leshchenko, le ministre ukrainien de l’Agriculture, n’a pas été en mesure d’expliquer dans quelle mesure la guerre affecterait la prochaine campagne céréalière et oléagineuse. Or la période des semis de tournesol et de maïs débutera dans les prochaines semaines alors que les céréales d’hiver auront besoin d’engrais pour se développer.
En fait, les agriculteurs ukrainiens et leurs salariés ne se sont pas joints à la masse de réfugiés qui ont fui leur ville et leur village pour échapper à l’armée russe. Ils n’ont pas non plus été mobilisés. Mais dans les fermes, ces agriculteurs et leurs salariés sont confrontés à des problèmes de sécurité et de logistique (engrais, carburants, matériels en panne) qui les empêchent de cultiver leurs champs quand ces derniers ne sont pas devenus des champs de bataille.
Sur les marchés agricoles, les pays importateurs de commodités (l’ensemble du bassin méditerranéen et pays africains sub-sahariens) sont les victimes collatérales du conflit armé en Ukraine. La fermeture des ports céréaliers ukrainiens et russes de la Mer Noire les prive d’approvisionnement. Le Liban et l’Egypte achetaient exclusivement leurs céréales rn Ukraine et en Russie.
A l’avenir, la reprise des échanges commerciaux dépendra de l’issue du conflit qui oppose l’Ukraine à la Russie. Si les ports ukrainiens sont annexés, les pays importateurs de grains pourraient refuser de financer la guerre menée par le Russie, en boycottant l’ensemble des produits agricoles de la région.
Et si la Russie perd la guerre qu’elle a enclenchée, elle pourrait être mise sur le banc du commerce mondial.
Mais prendre de telles décisions ne serait pas sans conséquences car les productions agricoles russes et ukrainiennes sont indispensables pour assurer la sécurité alimentaire de la planète.
Les pays importateurs achètent la paix sociale de leur population en lui mettant à disposition des céréales bon marchè. La résurgence d’émeutes contre la faim est une menace prise au sérieux.
L’Ukraine est le théâtre d’un conflit armé alors qu’elle se partageait il y a encore un mois, avec la Russie et six autres pays de la planète, l’essentiel des exportations de céréales de la planète.
La Russie et l’Ukraine produisent 200 millions de tonnes (Mt) de céréales, soit 9 % de la production mondiale mais les deux pays en exportent environ la moitié. A l’échelle mondiale, près d’un quart des exportations de grains étaient ukrainiennes et russes.
Un tiers des ventes de blé (58 Mt) et la moitié de livraisons d’orges (15 Mt) réalisées par les huit pays exportateurs majeurs étaient russes et ukrainiennes.
Près de 100 % des importations égyptiennes de blé étaient originaires de la Mer Noire. L’Ukraine et la Russie livraient du blé aux principaux pays importateurs de la planète (Indonésie, Algérie, Bengladesh etc.)
Au mois de février dernier, le Conseil international des céréales (CIC) estimait la production mondiale 2022-2023 de blé à 791 Mt et les exportations mondiales de la céréale à 190 Mt. Mais surtout la production de blé serait à peine suffisante pour couvrir la demande mondiale.
Depuis, ces estimations sont d’ores et déjà dépassées car la production ukrainienne de blé pourrait être réduite de moitié. Autrement dit le pays serait absente sur les marchés de l’export.
La production ukrainienne de maïs (35 Mt en moyenne sur trois ans) équivaut à 3 % de la production mondiale. Mais plus de 80 % de la récolte est exportée chaque année.
Cette année, l’Ukraine a pour premier client la Chine (2,9 Mt sur six mois de campagne) et l’Union européenne, premier importateur au monde de maïs quand elle n’est pas détrônée par l’empire du milieu.
Si la planète ne pouvait pas compter l’an prochain sur les exportations ukrainiennes de maïs, les stocks mondiaux des principaux pays producteurs – exportateurs de grains, diminueraient d’un tiers à la fin de la campagne 2022-2023. Le baisse serait plus importante si la demande des pays importateurs est, dans le même temps, amenée à croître.
Sans relais de croissance dans d’autres pays producteurs, la planète ne disposerait plus de stocks de report de maïs de fin de campagne d’ici 2 à trois campagnes.
On en parle moins, mais l’Ukraine est devenue un pays producteur de volailles majeur qui exporte une grande partie de sa production vers l’Union européenne.
Et surtout, la guerre en Ukraine empêche peu à peu l’agriculture ukrainienne de pourvoir aux besoins alimentaires élémentaires de la population. Les rayons des magasins ne sont plus achalandés.
Légende photo: Paysage ukranien (@sergii Mostovyi)