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Tournesol : semer dès le 25 mars pour limiter les dégâts de pigeons

Ludovic Robin implante son tournesol avec un semoir monograine Monosem classique. © TL

Dans le Sud-Vendée, Ludovic Robin cultive plusieurs dizaines d’hectares de tournesol. Il débute ses semis le plus tôt afin de se prémunir des dégâts de pigeons. Les attaques de parcelles par ce nuisible peuvent représenter des pertes de rendement conséquentes. 

Sur la commune de Benet, au cœur de la plaine vendéenne, à 10 km au Nord-Ouest de Niort, Ludovic Robin consacre 80 ha de ses 330 ha de SAU au tournesol. Sur son exploitation, qui connaît des printemps de plus en plus secs et qui n’est pas irriguée, il a préféré cette culture oléagineuse à celle de maïs dans sa rotation. « Nous sommes vraiment dans une zone où nous ne sommes pas souvent arrosés par passages orageux l’été, contrairement à nos voisins de la gâtine dans le bocage » précise-t-il. Côté sol, les parcelles de l’exploitation se composent de 15 cm de terre d’argilo-calcaire léger avant d’arrivée sur plusieurs mètres de calcaire. Dans ce contexte, lors des années sèches comme 2022, l’impact sur le rendement est important. « Nous avons fait 24 q/ha sur le tournesol cette année contre 33 q/ha en 2021 et une moyenne sur l’exploitation de 28 q/ha en année classique. Et pourtant je m’estime heureux par rapport à la quantité d’eau que nous avons eu. Début août, nous misions sur un rendement bien inférieur » se souvient-il.

 
La moisson d’orge ayant été précoce cette année, il a tenté de réimplanter en juin 30 ha de tournesol sur les parcelles récoltées. « L’été a été trop sec, le résultat n’est pas bon, convient-il, C’est une technique opportuniste que j’avais réalisée avec succès il y a 10 ans, car le printemps avait été sec et l’été plutôt humide ». Sur ces parcelles encore en place, il va tenter de récolter suffisamment de grain pour compenser le coût d’installation. « Je peux le faire parce que je suis équipé pour la récolte, mais celui qui passe par un entrepreneur, il aurait plutôt intérêt à détruire ce type de parcelle » reconnaît le vendéen. 

 
 

Une implantation précoce

S’il peut être un inconvénient pour ses faibles précipitations estivales, le climat sud-vendéen offre à Ludovic Robin l’opportunité d’implanter ses tournesols dès le 25 mars, voire le 20 mars. « Nous nous concertons entre nous sur la zone pour démarrer en même temps et partager les dégâts de pigeon. C’est le nuisible le plus important ici. Si un producteur se lance en décalé, il n’aura rien à récolter … » affirme-t-il. En semant dès le mois de mars, le producteur reconnaît que la culture met 15 jours, voir trois semaines à lever, contre 5 jours pour un semis plus tardif. « Mais c’est une période pendant laquelle il fait encore trop froid pour les pigeons. Ils ne sont pas encore présents sur les parcelles » justifie le vendéen. Les semis s’étalent ensuite jusqu’au 25 avril. S’ensuit une période d’affrontement intense contre les oiseaux. « Le moyen de lutte le plus efficace, c’est de se rendre sur place. Dès que j’ai fini quelque chose, j’y vais. Si ce n’est pas moi, c’est mon père. Nous pouvons nous déplacer sur les parcelles jusqu’à 15 à 20 fois par jour » décompte-t-il. Il a tenté tous les dispositifs d’effarouchements, mais avec des succès très limités dans le temps. Les pigeons s’adaptent vite aux différents systèmes. Pour limiter le phénomène, l’effaroucheur à canon est réglé sur un coup uniquement toutes les 45 minutes. « Cette année, nous avons essayé de le mettre en route sur la parcelle 15 jours avant les semis. Le résultat était plutôt positif » juge-t-il.
Au-delà des pigeons, il recense également des dégâts de lièvre sur ses parcelles de tournesol. « Je n’ai pas eu d’attaque de pigeon sur les 30 ha réimplantés en juin, car il faisait trop chaud. Par contre, j’ai des zones complètement nettoyées par les lièvres » indique-t-il.
 

Des parcelles en préparation simplifiée

Pour l’implantation de son tournesol, Ludovic Robin privilégie le sans-labour dans la majorité des cas. Les parcelles sont travaillées cinq à six fois dans l’hiver avec des déchaumeurs à dents et à disques, puis affinées avec une herse rotative si besoin. « Finalement, nous pratiquons l’hiver les faux-semis que nous n’arrivons pas à faire l’été » ironise l’agriculteur. La fertilisation est généralement réalisée par un apport de fumier de canard ou de digestat de méthanisation. « C’est une culture assez simple concernant l’apport d’azote. Par contre, il faut être très vigilant sur le phosphore et la potasse » précise-t-il.
Avant un tournesol, la parcelle est généralement semée avec un couvert végétal vers le 20 août qui est détruit à partir de mi-décembre. « Nous les détruisons dès que possible pour avoir le temps de préparer les terres et d’être prêt à semer dès la fin mars. L’idée est vraiment d’avoir un sol sans résidus pour que la graine démarre vite » explique le vendéen.

Pour la récolte, Ludovic Robin utilise son plateau à céréales. © TL



 
Le semis du tournesol est réalisé avec un semoir monograine Monosem en 60 cm d’écartement. « 60 cm, c’est un bon compromis. 75 cm c’est trop et 45 cm c’est optimal, mais il faut du matériel spécifique, notamment la bineuse ou même un empattement de tracteur adapté. Alors qu’en 60 cm, c’est du matériel courant qu’il est possible de trouver partout » juge Ludovic Robin. Travailler avec du matériel simple est une vraie philosophie pour lui. Il l’adapte également à la récolte. « Je ne vois pas l’intérêt d’avoir des outils spéciaux pour récolter 40 ha de tournesol. Avec un plateau à céréales, cela fonctionne très bien. C’est un peu plus sale, mais comme la récolte est souvent bien sèche chez nous, le tri est assez facile à réaliser » souligne-t-il.
Côté densité, il implante sa culture entre 65 000 et 70 000 graines/ha pour assurer une levée à 50 000 pieds/ha. « J’augmente un peu la dose pour compenser les dégâts de pigeon et de lièvre. Mais finalement, je ne suis pas sûr que ce soit très efficace. Quand ils attaquent une zone, ils nettoient tout, il ne peut donc pas y avoir de compensation sur les ronds détruits » relève-t-il
 

 

Du tournesol Express Sun avec parcimonie

Pour les semences, Ludovic Robin utilise des variétés demi-précoces, demi-tardives bien adaptées au contexte climatique. Il lui arrive également d’utiliser la variété tolérante aux herbicides (VTH) Express Sun pour une partie de son assolement. « Même sur ce type de variété, je n’aime pas désherber, car le tournesol prend quand même un coup et met un peu de temps à repartir. Mais ça reste un levier intéressant pour des problématiques particulières » constate-t-il. Cette année, il a utilisé Express Sun sur une rotation tournesol sur tournesol pour maîtriser notamment le développement des tournesols sauvages. « J’ai traité uniquement sur les zones salies et je n’ai pas eu de baisse de rendement. Cela m’a également permis de nettoyer complètement la parcelle de l’ambroisie qui avait colonisé la bordure » se souvient-il. 
 

A noter : 

Une rotation sans irrigation

Les cultures de Ludovic Robin sont toutes adaptées à une production sans irrigation. L’assolement se répartie sur 200 ha de céréales à paille, 70 à 80 ha de tournesol, 40 ha de colza, 30 ha de pois et quelques hectares de luzerne. Au-delà de l’adaptation de la ressource en eau, l’absence de maïs est aussi adaptée à la main d’œuvre disponible. « Je suis seul avec un salarié à temps partiel. Le tournesol représente quand même une charge de travail moins importante que le maïs pour lequel il faut gérer les tours d’eau tout l’été » estime-t-il.



Timothée Legrand

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