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Stéphane Le Foll reconduit jusqu’au remaniement des élections européennes

Le gouvernement du Premier ministre Manuel Valls vient d’être révélé. Stéphane Le Foll a été reconduit à l’Agriculture, et dans l’autre ministère influent pour le secteur, Ségolène Royal arrive à l’Ecologie. Pas vraiment de bonnes nouvelles pour les agriculteurs…

Faut-il choisir un ministre de l’Agriculture selon des calculs politiciens, ou parce qu’il est capable d’aider à gérer le monde agricole français selon les intérêts de ce dernier ? Promu de fraiche date, Manuel Valls n’a visiblement pas eu le temps de se poser la question, il a paré au plus pressé. Car s’il avait pris le temps de s’attarder sur ce qui fonctionne ou non dans notre monde agricole, et en particulier sur ce qui tient du ressort du ministre, il aurait compris. On ne gouverne pas pour faire plaisir à Pierre, Paul, Jacques, François ou Stéphane, mais avec l’ambition d’améliorer les conditions de ceux qui ont apporté leur confiance.

Le plan méthanisation seule action positive

Après 22 mois au gouvernement, on ne peut pas échapper à un bilan, même en étant reconduit au même poste. Alors allons-y. Stéphane Le Foll présente une ligne à son actif, le plan méthanisation. Son unique action en faveur de la compétitivité en agriculture (encore qu’il y ait encore pas mal de détails à revoir dans l’efficacité de la mise en place et dans la législation à revoir sur les épandages…).

Passons au passif. Prenez votre respiration, les paragraphes seront un peu plus long.

Bilan, le fiasco durable de l’agroécologie

L’agroécologie était un concept qui, à l’origine, tel qu’il avait été présenté médiatiquement, plaisait à la majorité des agriculteurs, puisqu’il s’agissait pour eux de s’accaparer, enfin, tous les efforts environnementaux qu’ils fournissent, et d’être récompensés pour cela. Malheureusement, rapidement, cette ‘agroécologie’ à la Le Foll a mis violemment à la poubelle la croissance verte, donc la rémunération environnementale, pour un retour aux vieux démons d’avant le grenelle, à savoir l’environnement sanction. Plusieurs petites phrases fortement déplaisantes prononcées par Stéphane Le Foll ont montré qu’il tendait à imposer des règles environnementales, mais en aucun cas à montrer en retour la moindre reconnaissance envers ceux qui les respectent. Jaurès, dont il se prétend, aurait décrit son attitude comme celle d’un petit patron façon XIXe siècle. Il ne faut pas occulter, dans ce fiasco de l’agroécologie, le rôle de l’ombre tenu par Bertrand Hervieu, un administratif dont les pouvoirs vont pourtant s’élargir très bientôt, comme nous le verrons plus loin.

Le fiasco en question est durable : là où il était sensé d’aller vers une agriculture comprenant davantage l’observation de l’agronomie pour tendre en direction d’une utilisation moindre des phytos, on s’est retrouvé avec un discours pitoyable, donneur de leçons, oubliant tout le respect que doit chacun d’entre nous aux agriculteurs français. De fait, en réaction, cette agroécologie est rejetée. Le risque, c’est de voir non seulement son application telle que l’a souhaitée Le Foll mise au rencart, mais également ses intentions de départ, dont nous répétons qu’elles avaient pourtant du sens.

L’échec de la communication

Autre échec, celui de la communication. De tous temps, le ministre de l’Agriculture en France a été en quelques sortes le porte-parole de la profession. Or, que s’est-il passé ? Stéphane Le Foll espérait depuis si longtemps devenir porte-parole du gouvernement qu’il s’est improvisé, en accord avec lui-même et au grand dam de Najat Vallaud-Belkacem (même si cette dernière a préféré ne pas réagir, sans doute pour prolonger son séjour au gouvernement), porte-parole de l’Elysée. 60 à 70 % de ses propos dans les médias grand public ont concerné autre chose que l’agriculture. Et comme ces médias avaient déjà donné la parole au ministre de l’agriculture, ils n’avaient plus, par ailleurs, à parler de ce secteur (sauf peut-être au moment du Sia…). Stéphane Le Foll est sans doute le premier ministre de l’agriculture qui ne représente pas la population agricole, mais qui cherche à la mettre à sa botte ! Et qui contribue à ce que les médias l’oublient.

La loi d’avenir, une sémantique ambigüe

L’action essentielle de Stéphane Le Foll a tenu dans sa « loi d’avenir’, dont rien que l’intitulé démontre son incapacité notoire à formuler dans un titre ce qu’il souhaite pour le secteur : avez-vous déjà vu une « loi du passé » ? Or cette loi s’est révélée tellement creuse, y compris dans son contenu, qu’il a fallu que le syndicat majoritaire monte au créneau pour créer, en parallèle, des états généraux de l’agriculture traitant des « vrais » problèmes : compétitivité, économie, emploi, ruralité, perspectives du présent et de l’avenir… Notons d’ailleurs que cette loi d’avenir est si controversée qu’elle n’est toujours pas votée, on a attend la lecture du Sénat puis le retour à l’Assemblée, à des dates plusieurs fois reportées.

Au passage, le seul ministre qui avait semblé aller (ne serait-ce qu’en partie) dans le sens de la FNSEA lors de la première journée de ces états généraux, Philippe Martin, a été débarqué au profit de la dogmatique Ségolène Royal, exit donc les espoirs d’une discussion constructive entre les secteurs environnementaux et agricoles.

La redistribution nationale des aides Pac : tout (le discours), et n’importe quoi (l’application)

Autre sujet qui a fait couler beaucoup d’encre depuis septembre, la redistribution des aides Pac, au niveau national. Le peu de présence de Stéphane Le Foll à son ministère n’excuse en l’occurrence en rien les arbitrages choisis par ses services, puisqu’il les a officiellement assumés. Le discours pouvait éventuellement se tenir (même s’il y avait des contestations), à savoir que l’élevage français est en tel danger qu’il doit bénéficier d’aides supérieures, qu’il faut bien prendre quelque part. Mais l’application n’a pas été celle-là. Le fait que François Hollande n’ait pas défendu le budget alloué à la France dans le cadre de la Politique agricole commune, en baisse de plus de 15 % entre l’exercice 2007-2013 et le suivant 2014-2020, a certes rendu compliquée la possibilité de donner plus à qui que ce soit. En revanche, il restait la possibilité (et même l’obligation pour respecter le budget en baisse) d’enlever. Les laitiers ont trinqué, ainsi que les cultures végétales. Les « riches » céréaliers n’avaient ainsi qu’à payer l’inefficacité européenne chronique de leur gouvernement. De fait, ils se retrouvent encore plus qu’avant (malgré les promesses) tributaires des marchés. Le Foll peut dire merci à Poutine d’avoir remis en cause, cette année au moins, le marché du blé ukrainien, les prix céréaliers hauts sont ainsi maintenus et la colère contenue. Au-delà, toutes les cultures de diversité ont trinqué : le riz de Camargue, le houblon en Alsace, le lin en Picardie… La définition des zones intermédiaires fait débat dans toutes les régions tellement tout le monde craint de perdre encore plus. La baisse ou disparition des aides à la production rend de fait plus importantes les aides compensatrices au handicap naturel : tout le monde se découvre une jambe de bois pour accéder à ces ICHN, ce qui aura pour effet de rendre celles-ci inefficaces partout…

Voilà pour le bilan, et encore on passe sur des sujets pourtant importants, comme le fait de donner un rôle politique à l’Anses, pour qu’il oublie de rendre des avis réellement scientifiques, ce pour quoi il est sensé être conçu…

Et maintenant, le pouvoir aux administratifs

Le fait que, officiellement cette fois, Stéphane Le Foll soit porte-parole du gouvernement va l’éloigner encore plus de « son » ministère. Ne parlons pas des réalités du terrain. Et ce que les élus ne font pas, les administratifs le prennent en charge. Parfois bien, parfois avec excès de zèle par rapport à ce qu’ils croient qu’on aimeraient qu’ils fassent, parfois aussi sans avoir le discernement de personnes allant vérifier sur place le cas échéant. Cette gestion administrative, les agriculteurs l’ont déjà subie, les années passées, avec Bruxelles, avant que le Parlement européen ne rende la parole aux élus. Ils savent combien les risques sont énormes. Aujourd’hui, l’histoire de l’escabeau interdit aux mineurs pour les cueillettes de fruits fait le tour des réseaux sociaux pour évoquer l’idiotie des règlements décidés derrière les bureaux. Demain, ça sera la même chose, puissance dix. Aux grands fonctionnaires les pleins pouvoirs. Bien sûr, il en existe des bons. Les autres doivent remercier leur hiérarchie pour leur nomination.

Ecologie, l’autre danger

La désignation du ministre de l’Ecologie, tout comme celui de l’Agriculture, a échappé à toute logique de compétence. Les agriculteurs se souviennent que les décisions favorables à l’ours et au loup, même si elles n’ont été appliquées qu’en 1996 et 1997, ont été prises en 1992 alors que Ségolène Royal était déjà ministre de l’Ecologie.

Les agriculteurs se souviennent aussi du soutien qu’elle a apporté aux faucheurs volontaires en témoignant en leur faveur dans un procès de février de 2012.

Enfin, en terme de reconnaissance rurale, la présidente de la région Poitou-Charentes vient de voir cinq villes passer de gauche à droite : Niort, Angoulême, Rochefort, Jarnac, et Saintes. Preuve qu’y compris sur « son » territoire, elle manque de légitimité.

En définitive, tout ce qu’il reste à espérer, c’est un nouveau remaniement, allant dans le sens des compétences cette fois. Un peu de patience…

 

Ci-dessous, les vieilles pancartes peuvent resservir, le ministre n’a pas changé…

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