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Seule la fin de l'écotaxe arrêtera les Bonnets rouges

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Le mouvement né médiatiquement en Bretagne samedi dernier (mais remontant à bien plus loin en fait) pour la suppression de l'écotaxe (et qui a donné lieu à des scènes de violence inouies) est appelé à durer tant que le gouvernement n'aura pas arrêté le déclenchement de l'écotaxe au 1er janvier 2014. Un collectif pour l'emploi en Bretagne s'est formé, avec sa tête un agriculteur, représentant donc aussi des pêcheurs, des entrepreneurs, des salariés, des artisans, des commerçants...

C'est la grosse actualité du moment. La manifestation de samedi dernier a certes un bilan  désastreux : près de 80 blessés, dont plusieurs gravement. Parmi ces derniers, un agriculteur a visiblement été victime d'un tir tendu de flashball (pourtant la visée des forces de l'ordre est sensée passer au-dessus des têtes) en plein coeur, il a fait un infarctus, a été transporté d'urgence à l'hôpital pour finalement être sauvé (ouf !). Un autre agriculteur a perdu une main avec une grenade, officiellement lacrymogène (le site Rue89 émet des doutes à ce sujet), qu'il aurait voulu renvoyer.

Une violence rare, qui ne peut pas avoir été improvisée

Ce déchainement de violence a étonné les manifestants. Ils étaient là, transporteurs, agriculteurs, entrepreneurs, salariés, pour une action symbolique, "démonter gratuitement un portique", lequel portique n'a d'autre utilité que de vérifier les boitiers des camions. Les gendarmes, renforcés par les CRS, n'ont pas laissé faire. Selon toutes vraisemblances, la responsabilité de ces violences, l'ordre donné pour les tirs directs et l'utilisation d'"armes proportionnées" selon le jargon du maintien de l'ordre, incomberait au préfet du Finistère, dont on doute fortement qu'il ait agi de son propre chef, sans l'aval, au minimum, de Beauvau.

Au passage, la question de la responsabilité est donc posée, et j'ai lu sur une page Facebook que les parents du jeune agriculteur qui a perdu une main dans l'affaire allaient porter plainte : il faudra bien donner les noms des véritables responsables.

Les légumiers à l'origine du mouvement

Il a donc fallu ce déchainement de violence, constater la résistance quelque part héroïque des manifestants face à la réponse policière, pour mettre en lumière l'exaspération suscitée par la taxe de trop. Du coup, sur le mouvement, des satellites à vocation récupératrice se greffent de toutes parts, extrémistes de gauche ou de droite, autonomistes bretons, ou autres, satellites que le gouvernement utilise pour tenter de décrédibiliser le mouvement.

Mais pour bien comprendre le fond du problème, il faut remonter (au moins) à février 2009. Déjà à cette époque, les légumiers (chou-fleur, artichauts...) du nord de la Bretagne et du Finistère faisaient valoir leurs soucis, il y avait eu des manifestations parfois violentes (mais sans commune mesure avec ce qui a été constaté samedi dernier). C'est sans doute à cette époque qu'ils ont appris à se serrer les coudes. Aujourd'hui, l'écotaxe les pénalisent particulièrement, et la révolte est d'abord venue d'eux.

Un collectif pour l'emploi en Bretagne

Mais le mouvement est beaucoup plus large. Thierry Merret est justement producteur de légumes, et président de la FDSEA du Finistère. Mais il met un point d'honneur à nous répondre sous une autre étiquette : "Je suis le porte-parole du Collectif pour l'emploi en Bretagne. Ce collectif représente des agriculteurs, mais aussi des pêcheurs, des entrepreneurs, des salariés d'entreprises agroalimentaires mais pas seulement, des petits entrepreneurs, des artisans, des commerçants..."

Il enchaîne pour décrire le mouvement : "Les portiques représentent un symbole, celui de la taxe de trop pour les Bretons. Le fait que cette taxe soit finalement supprimée ne peut plus suffire aujourd'hui, car c'est toute l'économie bretonne qui souffre. Que ce soit Marine Havest pour le saumon, Doux pour les volailles, Gad... Les exemples se multiplient chez nous d'entreprises en grande difficulté. Il devient urgentissime d'intervenir en faveur de l'économie bretonne. Et quand j'entends parler de demi-mesures, de possibilités de réduire de 50 % une partie de quelque chose... Je préviens, ça ne suffira pas ! Avec une taxe réduite de 50 %, nous paierons toujours plus que des régions plus proches du centre de l'Europe comme la Bourgogne ou Rhône-Alpes, c'est simplement géographique. Quand des langoustines pêchées au Guilvinec doivent être livrées à Rungis, elles empruntent la route. Moi, mes légumes, même chose, et c'est pire encore pour ceux que je livre plus loin. Pour autant, il ne faut pas croire que nous n'avons pas essayé de nous organiser en prévision de cette taxe, mais le lobby de la SNCF et des réseaux ferrés de France n'a pas permis que nous puissions trouver des solutions de transport de substitution. Ce qui signifie bel et bien que cette écotaxe ne résout rien dans ce sens, qu'il y aura toujours des camions sur les routes, même si c'est désagréable. Simplement, cette taxe s'ajoute aux autres charges et pénalise encore davantage l'activité économique en Bretagne."

Concernant les revendications, elles sont claires : "Nous demandons l'arrêt pur et simple de l'écotaxe en Bretagne", reprend Thierry Merret. A la question, serait-il gêné d'obtenir cet arrêt seulement en Bretagne si le reste de la France continuait à devoir la payer, il répond : "Ce qui m'irait très bien, ce serait un arrêt en Bretagne, et un moratoire pour le reste du territoire français, le temps de réfléchir à une application qui tienne compte des territoires. En plus, dès que nos transporteurs quitteront la Bretagne, ils paieront l'écotaxe ailleurs, donc nous ne sommes pas favorables non plus à ce qu'elle existe en l'état ailleurs. Même si nos revendications aujourd'hui concernent avant tout la Bretagne."

Samedi 2 novembre à Quimper, en référence à De Gaulle

La prochaine manifestation des Bonnets rouges est programmée pour ce samedi 2 novembre à 15 heures à Quimper, place de la Résistance, tout près de la Préfecture. "Ce lieu n'a pas été choisi au hasard, explique Thierry Merret. C'est à Quimper, en février 1969, que Charles De Gaulle a prononcé son discours où il a annoncé le plan routier breton. Depuis ce jour, les routes sont gratuites en Bretagne. On est limités à 110 peut-être, mais n'avons pas de péage. Cela pour aider au désenclavement de la Bretagne. C'est cet esprit que nous voulons rénover aujourd'hui. A ce rassemblement, s'exprimeront des agriculteurs, pêcheurs, chefs d'entreprise ou salariés. Mais pas un seul extrémiste ou autonomiste. Nous ne voulons pas de la récupération du mouvement. De notre part, nous n'avons pas d'esprit d'insurrection." Et il espère aussi que les forces de l'ordre sauront faire preuve de davantage de discernement dans leur action...

 

Notre illustration est une copie d'écran du reportage de TF1 que l'on retrouve sur ce lien : http://lci.tf1.fr/france/faits-divers/ecotaxe-fin-des-affrontements-dans-le-finistere-3-blesses-dont-8299618.html

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Auteur : Jeandey Antoine
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Journaliste professionnel depuis 1987. Rédacteur en chef de WikiAgri depuis sa création, en janvier 2012. Par ailleurs élu, adjoint au maire de Chaudon (comm...

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  • 1Commentaire
  • #1

    Pour info, cet article est sorti à quelques minutes près en même temps que l'annonce de Jean-Marc Ayrault de retirer "temporairement" l'écotaxe sur l'ensemble du territoire français. J'ai pensé que ça ne changeait rien au contenu de l'article, que je n'ai donc pas modifié.

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