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Retour sur les 11ièmes Rencontres Annuelles du Biocontrôle

Les 11es Rencontres Annuelles du Biocontrôle (RAB) ont eu lieu le mardi 14 janvier 2025 en marge du Sival à Angers, avec le parrainage du Ministère de l’Agriculture et des Forêts.

Considérées comme LE rendez-vous annuel pour échanger, débattre et informer sur toutes les avancées et l’efficacité du biocontrôle, elles avaient cette année pour thème : Accélérer l’intégration du biocontrôle dans le quotidien des producteurs : un défi à partager entre acteurs de la filière

En synthèse

Il est primordial de travailler sur le couple Nutrition et Santé pour appréhender l’immunité des plantes cultivées : cela suppose d’évaluer et positionner les produits de biocontrôle dans des approches intégrées.

Le principal défi est d’arriver à combiner plusieurs leviers agronomiques et technologiques, à diverses échelles, relevant chacun d’offres portées par différents acteurs, le tout pour répondre à l’enjeu de produire durablement ! Cette complexité est vécue comme une prise de risque supplémentaire par les agriculteurs qui ont besoin de sécuriser leurs pratiques.

Les producteurs ont donc besoin de partager le risque et cocréer de la valeur via des collaborations avec: l’amont via des offres intégrant des moyens et services maximisant les chances de réussite d’une stratégie biocontrôle, en allant jusqu’à garantir un résultat, l’aval qui cherche à sécuriser la chaîne d’approvisionnement, renforcer la résilience et rendre compte de sa durabilité les acteurs du territoire qui bénéficient directement et indirectement de la prise en charge par l’agriculture des enjeux environnementaux à laquelle contribuent les stratégies de biocontrôle.

Ce qu’il faut retenir

Introduction

En ouverture, Denis Longevialle, Directeur général d’Alliance Biocontrôle, a rappelé qu’Alliance Biocontrôle est l’association référente des entreprises du biocontrôle en France avec l’objectif de fédérer les acteurs du biocontrôle et leur écosystème. Cela passe par les adhésions à l’association (les adhérents d’Alliance Biocontrôle représentent aujourd’hui 80 % du marché du biocontrôle en France) ; cela passe aussi par des alliances extérieures : sur le plan européen, Alliance Biocontrôle est ainsi membre de Biocontrol Coalition. Alliance Biocontrôle vise en particulier à accélérer le déploiement du biocontrôle : via la massification de l’utilisation des solutions existantes, via l’accélération de l’accès à
l’innovation en matière de biocontrôle et via une meilleure valorisation des productions agricoles issues de ces techniques.

Benjamin Berthelot, agriculteur en Seine-et-Marne (250 hectares ; blé, orge, colza, maïs, betterave sucrière), privilégie les solutions innovantes comme le biocontrôle. Depuis son installation en 2019, il utilise notamment des trichogrammes sur maïs. Cependant, il constate des limites sur d’autres cultures, notamment le blé, où les produits de biocontrôle seuls se montrent parfois moins performants. Il souligne le manque d’accompagnement technique et de marchés dédiés, indispensables pour sécuriser l’utilisation du biocontrôle. Face à ces défis, il reste confiant en l’avenir et appelle à davantage de soutien et de collaboration entre les acteurs de la filière.

Table ronde : L’organisation et les offres de la distribution agricole

Nicolas Charpentier, directeur des établissements de négoce Charpentier, a souligné que le biocontrôle est au cœur des valeurs de l’entreprise familiale et un levier de différenciation sur le marché. Il a mis en avant la spécificité des établissements de négoce qui, selon lui, peuvent agir plus rapidement dans le référencement des solutions de biocontrôle. Il a déploré les difficultés rencontrées par les petites entreprises innovantes face à la lourdeur des démarches d’obtention des AMM et a également pointé le défi d’une adoption massive, citant les coûts et la perception de moindre sécurité par certains agriculteurs. Enfin, il a insisté sur l’importance de la formation pour convaincre et outiller ses équipes, tout en intégrant ces nouvelles solutions dans une logique préventive et responsable.

Matthieu Denier, directeur agrofourniture d’Océalia, a décrit le fonctionnement de la centrale régionale 3A et le rôle des coopératives dans le référencement des produits, y compris ceux de biocontrôle. Il a expliqué que ces solutions sont évaluées avec la même rigueur que les produits phytosanitaires conventionnels, à travers des essais en micro-parcelles et en plein champ. Il a souligné l’engagement d’Océalia à favoriser l’intégration du biocontrôle en accompagnant les agriculteurs dans l’amélioration de leurs pratiques, visant la réduction de l’impact environnemental des exploitations agricoles tout en maintenant leur productivité.

Sébastien Roumegous, fondateur de Biosphères, a présenté les démarches qu’il déploie pour accompagner agriculteurs et techniciens dans leur montée en compétences sur les pratiques agroécologiques et le biocontrôle. Il propose des formations basées sur trois piliers essentiels : un sol vivant, une plante en bonne santé, et un paysage fonctionnel. Tout commence par le sol, élément clé de la production agricole. Ces apprentissages s’accompagnent d’un travail sur la sobriété des intrants, incluant l’utilisation du biocontrôle et de la biostimulation, pour stimuler le système immunitaire des plantes et optimiser leur nutrition. Selon lui, sans une base agronomique solide et une approche intégrée, il reste difficile de déployer efficacement des solutions comme le biocontrôle en grandes cultures.

Table ronde : Le rôle moteur des filières agro-alimentaires

Selon Fanny Lange, associée chez Deloitte Sustainibility, le biocontrôle joue un rôle clé face aux restrictions réglementaires et aux exigences des cahiers des charges.
Cependant, la mise en œuvre de solutions intégrées combinant agronomie, biocontrôle et produits conventionnels reste complexe. Les objectifs de résultat, comme la réduction de l’empreinte carbone ou la biodiversité, nécessitent des indicateurs fiables et des approches systémiques. Les démarches pilotes, cofinancées par les industriels, permettent de tester et sécuriser de nouvelles pratiques avant un déploiement à grande échelle, avec l’enjeu de construire un modèle économique viable pour l’ensemble des acteurs.

Charlotte Neveux, animatrice technique du Collectif Nouveaux Champs, a indiqué que le collectif regroupe aujourd’hui une trentaine d’entreprises engagées dans une agriculture durable et innovante. Le label “Zéro résidus de pesticides” valorise des pratiques agroécologiques, comme le biocontrôle, adopté par 90 % des producteurs. Il vient d’être complété par un nouveau label mettant en exergue la préservation et la restauration de la biodiversité. Ces démarches répondent aux attentes des consommateurs en matière de sécurité alimentaire et de respect de l’environnement, tout en soutenant un modèle agricole basé sur la santé, le climat, et la juste rémunération des producteurs.

Table ronde : Pour un environnement institutionnel et règlementaire favorable

Quentin Mathieu, Responsable Entreprise et Consommation chez Agridées, a abordé les offres relevant de l’économie de la fonctionnalité et de la coopération, où l’on vend des garanties de résultat plutôt que des moyens. Il a souligné les freins réglementaires, notamment la loi de séparation vente-conseil, qui affectent l’efficacité de l’accompagnement des agriculteurs nécessaire au déploiement du biocontrôle et a insisté sur la nécessité de former les agriculteurs aux techniques de biocontrôle. «Aujourd’hui, c’est l’agriculteur qui endosse à 100 % le risque lié à la transformation de son système », a-t-il constaté en mettant en avant le rôle crucial que les assurances et coopératives devraient jouer pour partager les risques et sécuriser les agriculteurs face à des aléas climatiques et économiques croissants.

Odile Colnard, coordinatrice de la stratégie nationale de déploiement du Biocontrôle au Ministère de l’Agriculture et de la Forêt, a mis en avant les soutiens financiers significatifs de l’État, passés de 20 millions d’euros par an en début des années 2010 à 45 millions d’euros en 2023 (notamment grâce à France 2030). Parmi les initiatives phares, elle a cité le PARSADA, le Grand Défi Biocontrôle et Biostimulation pour l’Agroécologie et le futur appel à projets PRAAM. Odile Colnard a conclu en soulignant « l’importance d’un effort collectif, à l’échelle nationale et territoriale, pour accélérer l’adoption et le déploiement du biocontrôle ».

Céline Barthet, Présidente d’Alliance Biocontrôle, a mis en lumière l’importance d’une définition claire et homogène du biocontrôle au niveau européen – définition qui manque encore alors qu’en France, cette définition est inscrite au code rural depuis plus de dix ans. De fait, la réglementation européenne ne tient pas compte des spécificités du biocontrôle, les délais d’homologation en pâtissent et freinent l’innovation, poussant certaines entreprises à se tourner vers d’autres continents comme l’Amérique, pour lancer leurs innovations. « Les innovations s’éloignent progressivement de l’Europe, et c’est regrettable quand on voit les efforts publics déjà engagés. »

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