Les volets écologiques et environnementaux des programmes électoraux des candidats à la présidentielle définissent aussi les modèles d’agriculture défendus par chacun. Faut-il inféoder l’agriculture à l’écologie, ou la libérer d’un surnombre de normes ou de contraintes ?
Parmi les candidats à la présidentielle, qui rendra la politique environnementale moins contraignante ? Elu président de la République, François Fillon, candidat Les Républicains, « abrogera par ordonnance toutes les normes françaises ajoutées à la réglementation européenne ». Marine Le Pen, candidate du Front National, « stoppera l’explosion des normes administratives » tandis que Nicolas Dupont-Aignan (Debout La France) « mettra fin à l’accumulation des réglementations écologiques toujours plus absurdes ». Selon le candidat à la fonction présidentielle de Debout la France, « l’Etat demande aux agriculteurs de concilier deux impératifs inconciliables : faire face à la concurrence de pays ne respectant aucune norme environnementale et produire avec toujours plus de contraintes ».
Concrètement, François Fillon « supprimera les mesures fiscales les plus défavorables à l’environnement. Le verdissement de la fiscalité est un sujet essentiel et devra être intégré à une réforme plus large de la fiscalité avec un objectif de baisse des charges pour les Français ».
« Dans le cadre du Grenelle de l’alimentation que nous créerons (Ndlr : sous réserve que cette partie du programme soit financé, ce qui n’est pas le cas de 65 % du programme d’Emmanuel Macron selon la Fondation Concorde), nous définirons un calendrier prévoyant l’élimination progressive des pesticides, en commençant par ceux qui présentent un risque pour la biodiversité ou la santé et, le développement d’alternatives, explique pour sa part Emmanuel Macron, candidat d’En Marche. Nous soutiendrons l’adoption d’exigences similaires au niveau européen, dans le but d’accélérer la mutation de la filière agroalimentaire. »
Jean Lassalle veut lui « subventionner l’investissement quand il réduit la pression sur l’environnement ».
L’interdiction des OGM est au programme de Benoit Hamon, l’autre candidat socialiste à la présidentielle, mais aussi de Marine Le Pen et de Nicolas Dupont-Aignan, mais « sans s’opposer aux avancées de la science », précise ce dernier. Jean Lassalle estime quant à lui que la décision d’interdiction des OGM « au nom de la protection des terroirs » doit se situer non pas au niveau de l’Etat mais à celui des collectivités. Le candidat socialiste « officiel » veut aussi supprimer les perturbateurs endocriniens et les néonicotinoïdes en Europe, prohiber la brevetabilité du vivant et renforcer la veille sur les pesticides. Enfin, Benoît Hamon toujours autorisera les paysans à produire leurs propres semences et à avoir les moyens de préserver et de développer des races locales.
Ces mesures donnent une tonalité très particulière au programme du candidat socialiste officiel. Il veut « faire de l’agriculture agro-écologique, l’agriculture de demain » en se fixant comme priorité le développement des filière bio.
Mais les autres candidats ne sont pas en reste. François Filllon souhaite « lutter contre la pollution liée aux perturbateurs endocriniens qui affectent particulièrement les publics fragiles. » Et Nicolas Dupont-Aignan « encouragera le recours à une agriculture raisonnable en favorisant la diversification des productions, afin de créer des cycles de rupture contre les parasites et les mauvaises herbes et, en favorisant la sélection des plantes les plus rustiques (résistantes). » Emmanuel Macron, de son côté, opte plutôt pour la séparation des activités de conseil aux agriculteurs et de vente des pesticides qui susciteraient des conflits d’intérêt. Par ailleurs, il créerait aussi « un droit à l’erreur pour tous. Les contrôles opérés par les pouvoirs publics se feront non plus pour sanctionner mais pour orienter ». Mais ils seront toujours autant contrôlés, sans la moindre réaffectation d’une partie des contrôles sur d’autres maillons de la chaine…
L’essor des circuits courts contribue à la protection de l’environnement rapportent certains candidats à l’élection présidentielle. « La véritable écologie consiste à produire et consommer au plus près et, à retraiter sur place », explique Marine Le Pen, qui veut « rompre avec le modèle économique fondé sur la mondialisation sauvage des échanges et le dumping social, sanitaire et environnemental ».
Concilier environnement et agriculture requiert une politique d’investissement dans la recherche. François Fillon la lancera en abrogeant le principe de précaution « véritable frein au progrès », explique Michel Dantin, député européen et référent agricole du candidat LR. Un point de vue diamétralement opposé à celui de Benoît Hamon qui revendique la « sanctuarisation du principe de précaution ».
La préservation de la biodiversité est aussi un des thèmes traités par tous les candidats. Jean Lassalle estime que « la sauvegarde de la biodiversité repose en premier lieu sur les communes, les communautés locales. Plus généralement, la gestion des biens communs doit être confiée à ceux qui peuvent en porter la responsabilité, et leurs décisions doivent être mûries avec toutes les parties concernées. » François Fillon fera lui « évoluer notre conception de la biodiversité » en ajoutant à la protection de ce que l’on peut appeler la « biodiversité extraordinaire » (sites exceptionnels et espèces menacées), la préservation de la « biodiversité ordinaire », celle que l’on détruit sans y prendre garde. Le candidat des Républicains « protégera aussi les zones humides et les paysages, luttera contre le mitage de nos campagnes et préservera les espaces naturels, essentiels à la vie sauvage ».
Autre sujet au programme de certains candidats, l’accord sur le climat de la Cop21. C’est pourquoi il faut « amplifier la transition agro-écologique de l’agriculture et faire du programme 4 pour 1000 une priorité pour réorienter les flux financiers disponibles pour le changement climatique au bénéfice des sols », affirme Benoît Hamon.
François Fillon affirme vouloir « accélérer la recherche et le développement des techniques de capture et de stockage du carbone… et la France est bien placée en ce domaine ».
Enfin, pour rémunérer les services environnementaux rendus par les agriculteurs, chaque candidat prodigue un certain nombre de mesures sans toutefois revenir sur le verdissement de la Pac (exception faite de Marine Le Pen qui remplacerait la Pac par la Paf, politique agricole française). Par exemple, Nicolas Dupont-Aignan valoriserait ces services dans les zones à handicap naturel mais aussi les pratiques traditionnelles de production ou d’élevage qui contribuent à l’entretien des milieux naturels. Pour sa part, Emmanuel Macron souhaite porter à 200 millions d’euros par an l’enveloppe consacrée aux Maec (mesures agro-environnementales et climatiques).
Par ailleurs, les candidats à la présidentielle promeuvent les énergies renouvelables pour rendre les exploitations plus autonomes. « Il faut utiliser les nouvelles technologies pour développer la production décentralisée d’énergie, encourager l’autoconsommation d’électricité et aider la valorisation énergétique des sous-produits agricoles », explique François Fillon. Mais Benoit Hamon étend cette valorisation non alimentaire de la production agricole à la fabrication d’agro-matériaux.
Enfin, pour encourager les projets de méthanisation, la solution est là encore la simplification des procédures administratives, défend Emmanuel Macron. Mais aussi « l’utilisation plus aisée des produits hors déjections pour alimenter les digesteurs et recourir plus facilement à l’épandage pour les résidus de production de biogaz (digestat) », ajoute Nicolas Dupont-Aignan.
Marine Le Pen consacre évidemment une partie de son programme à la production d’énergie renouvelable. La candidate du Front national entend « développer massivement les filières françaises des énergies renouvelables (solaire, biogaz, bois…) grâce à un protectionnisme intelligent, au patriotisme économique, à l’investissement public et privé et étant aux commandes d’EDF ». En revanche elle souhaite décréter un moratoire immédiat sur l’éolien.
Portée par l’actualité, la défense de la cause animale s’invite dans tous les programmes. Les candidats sont conscients que l’avenir des filières viande dépend du traitement réservé aux animaux tout au long du chaine de l’élevage.
Par exemple, Marine Le Pen, élue présidente de la République, « fera de la protection animale une priorité nationale ». Elle interdira l’abattage sans étourdissement préalable et refusera le modèle des fermes-usines, du type « ferme des 1000 vaches ». Alors que Benoit Hamon développera la recherche pour promouvoir des méthodes d’élevage alternatif et privilégiera les pratiques agricoles pour stocker davantage de carbone dans les sols.
Retrouvez l’ensemble de nos articles de synthèse sur les programmes agricoles pour l’élection présidentielle 2017 sur ce lien : https://wikiagri.fr/tags/programmes_2017
. Note. Cet article a passé en revue les principaux candidats ayant une part agricole au moins correcte dans leurs programmes, soit, par ordre alphabétique : Nicolas Dupont-Aignan, François Fillon, Benoit Hamon, Jean Lassalle, Marine Le Pen, Emmanuel Macron.