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Présidentielle 2017, la Pac de l’après Brexit en questions

Deuxième volet de notre série d’articles sur les programmes agricoles de la présidentielle 2017, cette fois sur l’implication des politiques européennes souhaitées par les uns ou les autres sur notre agriculture nationale.

Election présidentielle,
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les programmes
sur l’agriculture.
Volet 2, l’Europe et la Pac

La Politique agricole commune (Pac) adoptée en 2014 et appliquée depuis 2015 pourrait être prolongée en l’état au-delà de 2020. Le Brexit change la donne. La prochaine Pac est d’ores et déjà réfléchie à 27. Les candidats à la présidentielle ne manquent pas de faire quelques propositions.

Chaque candidat à la présidentielle lui consacre une partie du volet agricole de son programme électoral, qui reste à l’heure actuelle la seule politique mutualisée de l’Union européenne. Ils y sont attachés, hormis Marine Le Pen, candidate Front national, qui s’inscrit en totale rupture avec la politique européenne actuelle. Elle promeut de nouveau la Politique agricole française (Paf) qui figurait dans son programme de l’élection de 2012.

La situation de crise des filières agricoles, d’une ampleur exceptionnelle, influence la teneur des  propositions de tous les candidats à la présidentielle, conscients qu’il faille agir vite. La lutte contre la volatilité des prix et la remise en cause des règles du droit de la concurrence sont les principaux piliers de la prochaine politique agricole en France et dans l’Union européenne.

Quelles aides pour quelle Pac ?

François Fillon, candidat Les Républicains, souhaite que le premier conseil européen des chefs d’Etat des Vingt-sept en juillet 2017 porte exclusivement sur les questions agricoles. Les débats de la prochaine Pac doivent commencer dès cette année, selon lui. Et pour défendre les positions françaises « le ministre de l’Agriculture alors nommé devra être à la manœuvre à Bruxelles tous les mois, explique Michel Dantin, député européen et référent « agriculture » de François Fillon. Et il aura en main une feuille de route négociée avec les organisations professionnelles pour défendre les mêmes positions et pour être écouté  par ses partenaires européens. »

« Dès que possible, nous mettrons en place des outils de régulation adaptés à chaque filière », mentionne également dans son programme Emmanuel Macron, candidat d’En Marche, sans autre précision. « Les aides découplées ne remplissent pas leur rôle », défend-il. Selon lui, il faudra instaurer après 2020 des aides « contracycliques » et rendre pour cela le budget agricole pluriannuel.

Jean Lassalle veut lui « changer le mode de rémunération des agriculteurs pour rémunérer moins les volumes et plus les personnes, y compris les conjoints d’exploitants ».

Benoît Hamon, candidat socialiste officiel, veut « généraliser les outils de maîtrise des volumes de production au niveau européen » et étendre les aides couplées. Dans son programme, il mentionne vouloir « restaurer les mécanismes de régulation des marchés par la combinaison d’outils et de dispositifs qui vont de l’échelon national (lissage fiscal, baisse des charges) jusqu’à des aides contracycliques et des mécanismes assuranciels ciblés. » Benoit Hamon défend ainsi une agriculture créatrice d’emplois. Et pour financer la Pac, il revendique un budget plus important que l’actuel avec une répartition des aides davantage centrée sur le nombre d’actifs dans les exploitations. Mais elles seront dégressives au-delà de 50 000 € par actif.

Pour François Fillon, « la Pac de 2023 devra davantage sécuriser les agriculteurs en vulgarisant l’assurance climatique ». Mais il n’est pas question de généraliser l’assurance revenus, beaucoup trop onéreuse. Son coût la rendrait inopérationnelle. Quant à Nicolas Dupont-Aignan, il propose de revenir aux fondamentaux de la Pac (prix garantis et quotas).

L’Union européenne, gardienne du temple de l’Omc ?

Sinon, les candidats attachés à la Pac plaident pour le retour à la préférence communautaire « en rétablissant des droits de douanes agricoles », précise Benoît Hamon. Mais surtout, ils se demandent si l’Union européenne doit rester la gardienne du temple de l’Organisation mondiale du commerce.

« De grandes puissances agricoles n’hésitent pas à avoir recours à des mécanismes de soutiens publics pas très vertueux pour protéger leurs agriculteurs et favoriser les échanges commerciaux, rapporte Michel Dantin, référent du projet agricole de François Fillon. Aux Etats-Unis, les aides s’élèvent à environ 486 dollars par hectare contre 198 dollars dans l’Union européenne. »

Pour Nicolas Dupont-Aignan, « l’agriculture ne peut se réduire à une seule bataille sur les prix. Elle doit remplir d’autres exigences que l’OMC ne lui reconnait pas: assurer la sécurité alimentaire et sanitaire des populations, valoriser les territoires, etc. » Pour des raisons différentes, Benoit Hamon propose de créer une exception agri-culturelle dans le commerce mondial et sortir l’agriculture de l’Omc. Il défend la mise en place d’un système de gouvernance alimentaire mondial sous l’égide de l’organisation mondiale de l’agriculture garantissant la souveraineté alimentaire de la planète et une meilleure représentation des agriculteurs et des consommateurs dans les instances internationales.

A ce jour, François Fillon veut « fonder les relations commerciales et négocier les accords d’échanges bilatéraux sur la base d’échanges équitables et sur l’équivalence des soutiens internes, tant des prix que des coûts (exemple : distorsions des charges salariales) ». Tandis que Benoit Hamon  et Nicolas Dupont-Aignan dénoncent et refusent les traités transatlantiques (Tafta, Ceta).

Selon le candidat socialiste officiel, « ils déstabiliseront notre agriculture, généraliseront des mauvaises pratiques, (comme le poulet au chlore ou le bœuf aux hormones), et détruiront nos terroirs ».

En fait, « l’Europe doit protéger son marché et n’autoriser que les importations ne faisant pas obstacle à la réalisation de sa politique d’indépendance alimentaire, en instaurant un mécanisme de droits de douane variables, écrit pour sa part le candidat de Debout la France. Si nous ne sommes pas entendus, nous rétablirons une politique agricole nationale. »

La Paf, un scénario de rupture

C’est ce que suggère justement Marine Le Pen qui étend la liste des traités bannis à ceux conclus avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Selon elle, la Politique agricole commune (Pac) devra être remplacée par une Politique agricole française (Paf). « On maintiendra le niveau des aides, le temps nécessaire imparti à la sortie de l’Union (environ deux ans), pour ensuite instaurer un système de prix minimum garantis. » Ceci dit, celles-ci seront versées en francs alors que personne n’est en mesure d’estimer quelle sera sa valeur sur les marchés monétaires par rapport à l’euro…
A l’international, la Russie serait le nouvel eldorado commercial de la France, selon la candidate du Front national. Celle-ci compte sur la réouverture du marché russe pour compenser la baisse des exportations vers les partenaires commerciaux européens habituels de la France puisqu’ils auront entre temps instauré des barrières douanières consécutivement à la sortie de notre pays de la zone Euro et de l’Union européenne. Mais aucun expert n’est en fait en mesure d’apprécier réellement quels seraient les impacts de cette réorientation des échanges de produits agricoles et agroalimentaires sur la balance commerciale française tant les paramètres en jeu sont importants.
 

Retrouvez l’ensemble de nos articles de synthèse sur les programmes agricoles pour l’élection présidentielle 2017 sur ce lien : https://wikiagri.fr/tags/programmes_2017

. Note. Cet article a passé en revue les principaux candidats ayant une part agricole au moins correcte dans leurs programmes, soit, par ordre alphabétique : Nicolas Dupont-Aignan, François Fillon, Benoit Hamon, Jean Lassalle, Marine Le Pen, Emmanuel Macron.
 

Notre illustration ci-dessous est issue du site Fotolia, lien direct : https://fr.fotolia.com/id/114325783.

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