eta 25 semaine 37 bis couverture

PRENDRE LE VIRAGE DU BINAGE

L’ETA Ornaise Prestagri a cherché une machine différenciante, polyvalente et efficace pour préserver la rentabilité.

 
Les chantiers de binage sont de plus en plus demandés sur le terrain. De nou- velles technologies existent qui permettent aux ETA, entre autres, de se diffé- rencier. Cependant derrière l’apparente simplicité de ces chantiers se cache une prestation très exigeante et parfois stressante. Décryptage dans l’Orne avec l’ETA Prestagri qui lance cette année sa première saison.
La machine peut être configurée en 6 m et 8 rangs ou 4.5 m et 6 rangs maïs. D’autres combinaisons sont possibles pour des interrangs plus réduits jusqu’à 15 cm.

Désherbage des zones de non-traitement, solution pour réduire les indices de fréquence de traitement, gestion des adventices résistantes, désherbage en agriculture biologique, amélioration de l’infiltration de l’eau et oxygénation du sol… Le binage des cultures offre de nombreux avantages agronomiques reconnus et en phase avec les évolutions actuelles de l’agriculture. Parallèlement à cela, les constructeurs se sont emparés des demandes du terrain. Ils proposent des machines toujours plus polyvalentes et toujours plus précises. Les niveaux d’efficacité potentiels du binage atteignent ainsi des scores de 90 %, qui peuvent aujourd’hui largement dépasser ceux d’un herbicide de post-levée. Dans ce contexte, il est logique que les ETA s’intéressent de près à cette technique. L’ETA Prestagri basée à Pointel dans l’Orne a fait le choix de se lancer dès cette année. Elle vise notamment les chantiers d’ensilage de maïs avec une forte clientèle d’éleveurs bovins laitiers. Par l’intermédiaire de son concessionnaire, l’ETA a fait confiance au jeune constructeur français bourguignon Phenix, non sans avoir comparé les devis d’autres constructeurs. La machine choisie, dont nous avons pu assister aux tout premiers réglages, est une Onyx de huit rangs maïs avec une largeur de 6m.

« Cela faisait quelques années qu’on s’intéressait au binage au sein de l’ETA. Nous n’avions jusqu’ici pas sauté le pas. Pour 2020, nous avons senti que c’était le bon moment, au risque de laisser la place à d’autres, retrace Nicolas Delaunay, associé de l’ETA. Cela doit nous permettre ainsi de conforter nos  clients  dans  l’évolution  de  leurs pratiques dans la durée. Par ailleurs chaque année notre clientèle en agricul- ture biologique se développe ».

Le binage est une prestation pénalisée par des distorsions de concurrence liées aux aides à l’investissement. L’ETA cherche à se différencier en apportant un maximum de valeur ajoutée dans la prestation pour le client.

Chaque élément bineur peut être relevé de façon indépendante par une commande hydraulique. La commande hydraulique permet de suivre la coupure de sections du semis par relevage automatique des éléments bineurs.
 
Des distorsions de concurrence

S’agissant de matériels permettant de réduire les applications de produits phytosanitaires, l’achat des équipements peut être éligible à subventions. Les ETA sont aujourd’hui devenues éligibles, mais pour des montants encore faibles. L’ETA Prestagri a demandé une aide (toujours en attente) de 15 % de la valeur de la machine, en sollicitant les fonds FEADER via le conseil régional. « C’est beaucoup moins que ce que peut obtenir une Cuma dont les taux d’aides et les seuils sont beaucoup plus élevés. Cela crée une distorsion de concurrence très forte sur le terrain, constate l’entrepreneur. De grandes Cuma avec chauffeurs proposent aujourd’hui des prestations clé en main et se positionnent véritablement sur le marché des ETA. Pour nous il est donc très difficile de s’aligner en termes de prix. Cela implique de devoir chercher une valeur ajoutée maximale dans la prestation pour le client ».

Pour se démarquer, l’entreprise a ainsi bien compris qu’une simple bineuse ne suffirait pas et qu’il lui faudrait un matériel ultra précis, capable de travailler au plus près du rang avec une très bonne sélectivité pour les cultures. En même temps, l’ETA avait aussi besoin d’efficacité et de polyvalence pour pouvoir amortir le matériel et rester rentable dans différentes situations. L’addition de ces différentes exigences a poussé l’ETA à investir dans des équipements additionnels. L’ensemble de ces ajouts triple le prix de base de la machine pour un investissement total de 63 000 €.

La bineuse est équipée de deux caméras colorimétriques pour le guidage précis au plus près du rang.
 
L’ETA a également fait installer des peignes à l’arrière de la bineuse qui effectuent un travail pour ratisser les adventices et les laisser au sol.

La bineuse est ainsi équipée de deux caméras colori- métriques pour le guidage précis au plus près du rang. Des disques rotatifs protèges-plants sont installés pour pouvoir travailler aux plus jeunes stades des cultures. L’ETA a également choisi d’équiper la bineuse du relevage automatique des éléments bineurs par commande hydraulique pour respecter la coupure de tronçons. Cela permet de gérer efficacement le travail dans les pointes et les fourrières et de travailler 100 % de la parcelle. L’ETA a également fait installer des peignes à l’arrière de la bineuse. Leur action est très efficace pour sortir de terre les adventices, les ratisser et éviter qu’elles ne se repiquent. Cela peut aussi permettre de déchausser les adventices des petites mottes de terre. 

Différentes attentes des clients

Les éléments bineurs quant-à eux sont constitués de cinq rangées de dents qui se chevauchent. Le choix de l’ETA s’est porté sur une dent à soc plat pour travailler le milieu de l’in- ter-rang. Cette dent est encadrée de deux dents cœurs, elles mêmes encadrées de deux dents demi-cœurs. Pour travail- ler l’inter-rang, l’entreprise a finalement renoncé à s’équiper de moulinets à doigts de type Kress. « En effet, le réglage des moulinets à doigts est très fastidieux. Cela dépend notamment du semoir qui a été utilisé avant. Les peignes offrent dans notre cas un meilleur compromis », souligne Nicolas Delaunay.

La machine est conçue pour fonctionner en 8 rangs à 6 m de large ou 6 rangs et 4m50. Montés sur une poutre en H, les éléments bineurs peuvent être réorganisés pour s’adapter à différents inter-rangs. « On peut réaliser d’autres chantiers que le binage de maïs, souligne l’associé de Prestagri. En théorie on peut même travailler sur des céréales à 15 cm d’écartement. Cette polyvalence est un aspect important pour pouvoir espérer amortir la machine à différents moments de l’année ».

Outre les atouts liés au désherbage, l’ETA a déjà trouvé des clients intéressés pour s’adapter aux zones de non-trai- tement en bordures de pavillons ou de cours d’eau. Après une sortie d’hiver longue et froide, d’autres applications sont trouvées pour réoxygéner les sols, casser les croûtes de battances et permettre aux cultures un meilleur redé- marrage. Certains clients sont intéressés par le binage pour répondre à des problématiques de populations de ray-grass devenues résistantes aux herbicides.

S’inspirer des « Bio »

Pour Prestagri, l’achat de la bineuse est aussi une occasion de conforter une clientèle d’éleveurs en Bio de plus en plus importante ces dernières années. Par ailleurs l’ETA ne cache pas qu’elle s’inspire beaucoup des savoir-faire acquis par les agriculteurs Bio en matière de binage pour adapter ses pratiques et conseiller ses clients conventionnels. « Les agri- culteurs bio ont bien compris que le binage est une opération qui s’anticipe dès le semis, souligne l’associé. Ils font très attention à niveler le terrain et ils passent souvent un coup de herse étrille après le semis pour niveler encore mieux le sol et préparer ainsi le travail de la bineuse. Ils sèment également les maïs assez profonds pour permettre le passage de la herse étrille ».

Le nivellement du terrain est bel et bien l’un des premiers facteurs clé de succès qui permet déjà d’avoir des levées homogènes si le semis est bien réalisé. Mais surtout le fait de ne pas avoir de creux ni de bosses permet de faire travailler les dents de la bineuse de façon homogène. Un terrain bien nivelé évitera aussi de fastidieux réglages de profondeur des éléments bineurs.

Un chauffeur attitré

Un chantier de binage peut être une opération stressante avec le risque de dégrader la culture du client. La précision nécessaire doit être bien maîtrisée pour pouvoir obtenir une efficacité optimale au plus près de la plante. L’ETA Prestagri a ainsi choisi de confier la prestation de binage à un chauffeur attitré qui a une expérience de 20 ans dans les semis de maïs. Le chauffeur a par ailleurs déjà l’expérience dans la coupure de tronçons au semis et le réglage des délais de latence. C’est un aspect important car le relevage automa- tique des éléments bineurs fonctionne sur le même principe. 

Les adventices sont efficacement exposées au vent et au soleil.
 
L’ensemble des équipements additionnels triplent le prix de base de la machine.

« On bine comme on sème », est un adage aujourd’hui bien connu sur le terrain chez ceux qui pratiquent. Hors de question de biner en 8 rangs un champ semé en 4 rangs, même si le client le réclame. Le risque est trop grand d’avoir des décalages et de dévaster la culture. Lors des premiers mètres de travail, il est toujours bon de vérifier et de rectifier l’alignement des éléments bineurs à la clé le cas échéant. En effet, selon le semoir utilisé, de petits décalages peuvent nécessiter des corrections. Dans la mesure du possible, il est conseillé également de biner dans le même sens que le semis. Après un semis de qualité, l’entrepreneur peut espérer accroître la vitesse de binage, se rapprocher au plus près du rang avec une efficacité accrue pour le client et des débits de chantiers améliorés. Il y a donc bien une synergie naturelle très forte qui peut être trouvée entre les chantiers de semis et le binage. Il est logique pour les entrepreneurs de pouvoir espérer gagner des clients pour le semis grâce au binage en proposant des packs de prestations. 

Lors des premiers mètres de travail, il est toujours bon de vérifier et de rectifier l’alignement à la clé le cas échéant. Dans la mesure du possible, il est conseillé également de biner dans le même sens que le semis.
 
Pour un travail encore plus efficace, certains agriculteurs confient aux ETA les chantiers de semis et ceux de binage.
 
Texte et photos: Alexis Dufumier

 

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