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Nicolas Hulot, vous ne serez pas le ministre qui aura la peau des bergers !

A l’issue de 30 jours de dialogue avec les acteurs des filières d’élevage ovin, bovin, et équin ainsi qu’avec les associations de défense du patrimoine pyrénéen, nous sommes plusieurs centaines à avoir décidé d’engager la lutte.

Dans un collectif large et ouvert, dont la représentation s’est réunie pour la première fois en conférence de presse à Pau ce jeudi 26 avril, nous refusons le projet mortifère du ministre de la Transition écologique d’introduire, à l’automne, deux prédateurs femelles, avec portée, dans ce formidable espace de vie que sont les montagnes des Pyrénées Atlantiques. Nous serons nombreux ce lundi 30 avril à manifester face à la préfecture de Pau.

Twitter n’a jamais fait une concertation démocratique

Pour rappel, c’est par un simple tweet en date du 27 mars 2018 que Nicolas Hulot annonçait que ne pouvant « se résoudre à voir disparaître l’ours brun des Pyrénées », il demandait « @Préfet64 de mener à un bien un dialogue avec tous les acteurs du territoire pour réussir la réintroduction de deux ourses cet automne ».

Non, Nicolas Hulot, vous ne serez pas le ministre qui aura la peau des bergers ! En quelques mois à peine, le gouvernement auquel vous appartenez a décrété la fermeture de la maternité d’Oloron Sainte-Marie, d’un service de gendarmerie, d’un centre d’apprentissage, d’une dizaine de classes primaires. Nous ne pouvons plus nous résoudre à subir l’injonction permanente de la mise à mort de nos vallées, de notre art de vivre, et finalement de notre identité.

Non, il n’y aura pas d’introduction d’ourses à l’automne ! Les deux femelles avec portée que le ministre croit nous imposer ne sont pas d’adorables bêtes de foire, mais de dangereux prédateurs, non maîtrisables, même dans un parc naturel. En outre, il ne s’agit pas d’une réintroduction mais d’une introduction, l’espèce pyrénéenne ayant disparu, le ministre prétend imposer des ours en provenance d’Europe de l’est. Et tout cela pourquoi ? Le retour d’expérience de l’Ariège démontre les conséquences économiques et sociales : plus de 600 bêtes de cheptel décimées, des éleveurs au bord de la faillite et du désespoir, des communes qui interdisent les accès pour cause de dangerosité animale… En Roumanie d’où je rentre d’un voyage d’études, ce sont des dizaines d’agressions de l’ours sur l’homme, bergers attaqués la nuit, ou enfants de villageois pris au piège

Non, Twitter n’a jamais fait une concertation démocratique ! Le ministre annonce une concertation ? Mais quelle concertation dès lors que la décision est déjà prise ? Que le préfet des Pyrénées-Atlantiques est contraint de recevoir en catimini trois parlementaires pour assurer la mise en scène publique de ce nouvel autoritarisme qui finit par donner la nausée ? Avec qui et au nom de quoi prétend-il donc imposer un tel retour en arrière à toutes celles et ceux qui chaque jour depuis des générations font vivre, par la seule force de leurs bras et de leur courage, ces territoires de France ?

Les Pyrénées sont un patrimoine vivant, pas un musée

J’entends nos élus de tous bords prendre des positions bien nuancées. Pour les uns, il s’agit de trouver compensation environnementale au projet d’ouverture de lignes de trains à travers nos massifs. Pour les autres de ménager la chèvre et le chou alors que le Plan montagne du département est à la négociation avec l’Etat, soit une signature en bas d’une circulaire de plus, sans engagement financier. Mais qu’allez-vous donc laisser à vos enfants ?

Les Pyrénées sont un patrimoine vivant, pas un musée. En restant prudents, vous serez finalement jugés coupables de soutien à cette mafia de l’ensauvagement. En restant immobiles, vous participez déjà au massacre des derniers jardiniers de la nature, ces femmes et ces hommes qui se lèvent tous les matins, tous les jours de l’année, pour offrir le meilleur d’eux-mêmes à leur communauté.

Bœuf gascon, agneau de Barèges, Ossau Iraty… mais aussi cirque de Lescun et de Gavarnie, La Pierre Saint-Martin… la Fête des Bergers, la Fête du fromage… qui a le droit de cautionner ce « génocide programmé » de nos origines et de notre culture ? Tous fils et filles de paysans, allons-nous couper de nous-mêmes le cordon de nos racines ? Non ! Non ! Non ! Quoiqu’il nous en coûte, aujourd’hui ici et maintenant, nous allons défendre notre travail, notre famille, notre territoire, et par là même la belle et grande République de France.

Je crois au bon sens des femmes et des hommes enracinés

Urbains ou ruraux, nous sommes tous sensibles à la préservation de notre environnement, à ce que nous mangeons dans notre assiette, à la faune et à la flore de nos montagnes, que nous y vivions au quotidien ou que nous en prenions seulement la direction pour les vacances en famille.

« Nous ne permettrons pas le sacrifice
de vies humaines et animales
sur l’autel de la bien-pensance,
de l’idéologie ou plus simplement
du faux-semblant ! 
»

Mais qui peut bien encore être assez naïf alors que toute l’information est accessible, en tous lieux, pour considérer que les grandes urgences de la sauvegarde de la planète résideraient dans la réintroduction de prédateurs, qui par ailleurs ne sont pas en voie d’extinction ? Où sont les décisions du gouvernement en matière de réduction des plastiques qui eux polluent nos océans, nos rivières et nos montagnes ? L’activisme tonitruant de notre Président de la République aura-t-il la moindre influence sur le retour des Etats-Unis dans les Accords de Paris pour la sauvegarde du climat ? Allons, allons… enfant de la Patrie… nous ne nous laisserons pas enfumer… nous ne permettrons pas le sacrifice de vies humaines et animales sur l’autel de la bien-pensance, de l’idéologie ou plus simplement du faux-semblant !

Je crois au bon sens des femmes et des hommes enracinés. Les Pyrénées-Atlantiques sont aujourd’hui le troisième département de France en termes d’installations de jeunes agriculteurs. Jamais la profession ne s’est autant féminisée. Jamais nos produits n’ont été aussi appréciés aussi bien en France qu’à l’étranger. Nous avons devant nous de grands chantiers pour toujours mieux valoriser nos savoir-faire, nos terroirs, et permettre aux nouvelles générations d’inventer les Pyrénées du 22e siècle. Oui, nous connaissons nos priorités. Et oui, nous irons jusqu’au bout car nous savons d’où nous venons.

Olivier Maurin
Berger, ferme du Payssas, Asasp-Arros
Co-président de l’Association de Développement Durable de l’Identité Pyrénéenne (l’ADDIP)
Porte-parole du collectif en manifestation le 30 avril 2018 à Pau
 


Précédent article de WikiAgri sur le sujet : https://wikiagri.fr/articles/bearn-larrivee-de-deux-ourses-consideree-comme-une-atteinte-a-la-ruralite/17810.

Autres liens sur le sujet : http://www.aqui.fr/environnements/lacher-d-ourses-en-bearn-les-anti-entrent-en-lutte,17044.html ; http://www.larepubliquedespyrenees.fr/2018/04/26/on-luttera-jusqu-au-bout-pour-qu-il-n-y-ait-pas-d-ours-en-bearn,2330872.phphttps://www.ladepeche.fr/article/2018/04/26/2787539-ours-la-colere-remonte-des-vallees.html ; https://www.francebleu.fr/infos/climat-environnement/pyrenees-les-opposants-a-l-ours-preparent-leur-riposte-1524762532 ; http://www.atlantico.fr/decryptage/arrivee-annoncee-deux-ourses-pleines-automne-emeut-bearn-antoine-jeandey-wikiagri-3370698.html.
 

Photos montrant Olivier Maurin, fournies par lui-même.

 

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