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Le transport fluvial en France, un atout de compétitivité pour les céréales

Lorsque les prix des céréales arrivent à des niveaux planchers, il n’y a pas de petits gains! Sur les frais d’acheminement du blé dans le grand bassin parisien, il est possible d’économiser jusqu’à 8 € par tonne de blé rendue à Rouen, selon l’origine du grain et son mode de transport. Autrement dit, d’augmenter de 8 euros le prix payé au producteur.

Au départ de l’Aube, les frais de transport d’une tonne de blé varient de 6 € à 15 €. Ramenés au kilomètre, les écarts de prix sont aussi très importants: 0,034 € par péniche de grand gabarit, 0,049 € par péniche de petit gabarit contre 0,062 € par voie ferroviaire ou par route.

Un des dossiers du Déméter 2016 est consacré au transport fluvial, dans le grand bassin parisien en particulier. Il montre que ce mode d’acheminement est non seulement le plus économique et le plus souple, mais aussi un des plus compétitifs au monde. Son coût est bien inférieur à ceux constatés à ceux en vigueur dans les autres grands pays producteurs. Et pourtant, le transport fluvial n’a pas la côte ! Il n’assure que 20 % à 25 % du transport maritime en Ile-de-France et dans le Nord contre 70 % pour la route, selon Antoine Beyer, auteur d’une des études du Déméter 2016 (et par ailleurs docteur en géographie et expert de l’Observatoire des politiques et des stratégies de transport en Europe, au commissariat général du développement durable).

A l’échelle nationale, le trafic fluvial des céréales représente environ 12 % des flux commerciaux alors qu’il est capable d’une mise à disposition des grains livrés en 2 ou 3 semaines contre plusieurs mois par le rail. 

Des disparités selon les régions

Toutefois, un déficit d’infrastructures conduit à devoir supporter des frais de transport incontournables et à générer des disparités d’une région à l’autre. Dans le grand bassin parisien, l’acheminement par péniche d’une tonne de blé chargée en Picardie vers le port de Rouen revient à 7 €, lorsque le silo est à quai, tandis qu’il s’élève à 15 € pour par train si les céréales proviennent d’un silo de collecte de la Beauce.

En attendant, ces différences de coût d’acheminement sont autant de gains qui échappent aux céréaliers ou autant d’économies qui n’ont pas été réalisées. Or ces dernières donneraient davantage de marges de négociation pour décrocher des contrats à l’exportation lors des séances d’adjudication dans les ports d’arrivée.

Un transport peu onéreux facilite la hiérarchisation des céréales en fonction de leur provenance et de se caler en matière de prix. Sur le marché allemand, la France est en concurrence directe avec la Pologne et les autres pays de l’Est dont les prix de vente intègrent des couts d’acheminement plus élevés aux dépens des producteurs moins rémunérés.

« Dans la conquête des marchés mondiaux, la qualité de la desserte fluviale européenne reste un atout potentiel pour les producteurs français en raison de la faiblesse de ses coûts », écrit Antoine Beyer. Leurs concurrents sur les marchés mondiaux doivent en revanche faire face à des goulots d’étranglement qui pèsent sur leur rentabilité et sur leur capacité d’acheminement.

Il poursuit : « Aux Etats-Unis, le réseau ferré est en concurrence avec le transport d’hydrocarbures et en Asie, les capacités d’acheminements vers les ports est entravé par le maque de wagons. Pour expédier les grains vers la mer noire, peu de voies fluviales sont navigables pour des raisons d’aménagement mais aussi de météo (gel) vers des ports encombrés. Résultat, au cout de transport, il faut ajouter les frais de chargement de 16 dollars par tonne en Ukraine ou encore de 25 € en Russie. »

Préconisations

Pour renforcer les avantages compétitifs que procure le transport fluvial, Antoine Beyer préconise, pour le grand bassin parisien, la réalisation du canal Seine-Nord afin de faire communiquer la Seine à l’Escaut et avoir accès à l’Europe du Nord jusqu’au Rhin. « Dans une stratégie d’amélioration de la chaine de valeur, le transport fluvial doit aussi être associé à l’amélioration et à l’accroissement des capacités de stockage afin de contribuer à l’efficacité globale du système. »

Enfin, Antoine Beyer suggère la rénovation de la flotte fluviale, le recrutement de bateliers et la poursuite du plan silo visant à accroître et à renouveler les capacités de stockage de grains. Sur les péniches, les céréales pourraient aussi être transportés en conteneurs et non pas seulement en vrac.  

Mais la compétitivité de la voie d’eau passe aussi par la performance des installations portuaires. « Les ports, interfaces entre hinterland d’approvisionnement local et marchés mondiaux, ont en effet un positionnement clé dans pour la bonne santé de cette filière export », selon Juliette Duszynski, citée par l’auteur de l’étude (elle est chef de projets économie, logistique, portuaire, projets européens à l’Agence d’urbanisme de la région du Havre et de l’estuaire de la Seine, AURH).

En savoir plus : http://www.clubdemeter.com/pdf/ledemeter/presentation/presentation_demeter_2016.pdf (présentation du Déméter 2016).

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