Entre agriculteurs, distributeurs et transformateurs, les marges ne se partagent pas. Le 5e rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires dresse un tableau catastrophique de la situation économique des filières agricoles passées en revue.
L’inélasticité grandissante des marges des transformateurs, des distributeurs, et surtout des prix à la consommation accentuent la détresse des agriculteurs livrés à la volatilité des marchés mondiaux. L’agriculture est au bord du dépôt de bilan !
Cette année, Philippe Chalmin avait carte blanche pour présenter le cinquième rapport de 250 pages de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Créé par la loi de modernisation de l’agriculture en 2010, il en est le président depuis 6 ans.
Ce document de référence confirme les différentes clés de répartition des marges des principaux produits agricoles transformés entre les industriels et les distributeurs et, leurs variations annuelles, face à l’inélasticité intangible des prix à la consommation. Les agriculteurs sont les seuls à être livrés à la volatilité des marchés mondiaux.
L’inertie est telle qu’il est possible d’entrevoir, par produit, dans quel sens ces clés de répartition évolueront cette année (même si les chiffres disponibles pour l’industrie agroalimentaire sont publiés avec une année de retard). Pour les produits agricoles encore baisse, leur achat meilleur marché renforcera les marges des transformateurs et des distributeurs. Pour les autres, moins bon marchés (il en existe encore, le blé dur par exemple), ces marges se contracteront. Mais les prix des produits alimentaires achetés par les consommateurs resteront eux, quasiment inchangés.
« Personne ne s’en met « plein les poches » dans un régime de concurrence, si ce n’est paradoxalement le consommateur », affirme Philippe Chalmin. Mais les grands perdants de cette grande « foire » aux prix et aux marges sont les agriculteurs !
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les consommateurs soutiennent les agriculteurs, la plupart d’entre eux seraient prêts à payer plus chers leurs produits alimentaires pour soutenir leurs revenus et pourtant, jamais ils n’ont si peu dépensé pour acheter leurs produits alimentaires! Et plus ces derniers sont élaborés, plus ils sont déconnectés des cours des matières premières agricoles.
Sur 100 euros payés, ces produits alimentaires ne représentent que 8,2 € (chiffres 2012 – les seuls disponibles à ce jour mais toujours autant d’actualité). Aussi, toute hausse de ces matières premières agricoles serait pratiquement sans conséquence sur le pouvoir d’achat des consommateurs. Ce déphasage entretient même l’image d’Epinal qu’ils ont de l’agriculture en leur faisant oublier que les agriculteurs ont aussi le droit à avoir un revenu.
Résultat, le rapport de l’observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires dépeint une agriculture en faillite ! L’an passé toutes les filières auraient dû être en dépôt de bilan si les agriculteurs étaient des employés en CDI puisqu’aucun salaire n’aurait pu leur être versé (estimé à 1,5 smic par mois dans les simulations de l’Observatoires des prix et des marges). Quasiment toutes les filières (céréales, lait, viandes bovines étudiées) ont des couts de revient, rémunérations des agriculteurs comprises, supérieurs aux produits de vente et aux subventions versées. Autrement dit, les chiffres d’affaires sont trop faibles pour couvrir les charges.
L’an passé, les chiffres :
– les éleveurs de bovins viande naisseurs ont perdu 47 € par 100 Kg de d’animaux vifs, les naisseurs-engraisseurs 19 € et les engraisseurs 46 € ;
– les producteurs de blé tendre ont perdu jusqu’à 15 € par tonne ;
– en production laitière, le manque à gagner oscille entre 60 €/1 000 litres en zone de montagne, 35 € en polyculture lait + céréales, et 40 € pour les spécialisés.
Sans aides, les pertes seraient, par exemple, de 90 € par 100 kg d’animaux vifs pour les éleveurs de bovins naisseurs-engraisseurs, de 140 €/1 000 l de lait, et de 130 € par tonne de blé pour les céréaliers !
Pour s’en sortir, les agriculteurs réduisent toujours plus leurs charges avec le risque de compromettre le potentiel de production de leur exploitation. Ils retardent aussi le renouvellement de leur matériel et se rémunèrent peu (statistiques établies ci-dessus avec un revenu d’1,5 smic par mois). Et si ils le peuvent, ils comptent sur des revenus tiers (salaires du conjoint, poly-activité, diversification, etc.) pour vivre. Il serait du reste intéressant d’étudier quelle est aujourd’hui, réellement, la part du revenu agricole dans les foyers d’agriculteurs.
La volatilité des marchés agricoles, les prix et les marges ne se partagent pas entre agriculteurs, transformateurs, distributeurs et consommateurs (deux études du ministère de l’Agriculture ont même montré que les prix faibles avantagent les transformateurs en mal de compétitivité). Et au centre de cet imbroglio, les aides Pac sont impuissantes pour faire office d’amortisseurs, tant les pertes de chiffres d’affaires sont importantes.
Qu’elles soient redéployées ou couplées, les aides Pac ne sont pas adaptées à la nouvelle conjoncture des marchés dérégulés.
Dans ces conditions, on n’imagine la difficulté de généraliser la contractualisation entre les acteurs d’une même filière. Car cela suppose d’accepter une nouvelle clé de partage de la valeur ajoutée.
Evidemment, les agriculteurs et les éleveurs en seraient les premiers gagnants. Mais les transformateurs aussi, car sans production agricole de masse, comment rentabiliseraient-ils leurs outils industriels. En Allemagne, des collecteurs de lait n’incitent-ils pas les éleveurs à produire plus de lait pour amortir leurs nouveaux équipements flambants neufs ! En Bretagne, ne craint-on pas de nouvelles fermetures d’abattoirs ?
A la veille d’une réflexion entre ministres européens de l’Agriculture des Vingt-huit sur la nouvelle Pac après 2020, Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, souhaiterait promouvoir des systèmes de soutiens plus efficaces pour les agriculteurs. Mais généraliser l’assurance chiffres d’affaires conduirait à une augmentation du budget européen de l’agriculture tant les risques à couvrir sont importants. Ce qui n’est pas dans l’air du temps !
En savoir plus : https://observatoire-prixmarges.franceagrimer.fr/Lists/Liste%20Rapports%20au%20Parlement%20et%20Lettres/Attachments/19/rapport-obs-vdef.pdf (le rapport annuel in extenso de l’observatoire des prix et des marges).
L’illustration ci-dessous est issue du site Fotolia. Lien direct : https://fr.fotolia.com/id/6336784.
Toutes les organisations impliquées, ont elles eut les démarches de gestion d’entreprises saines. Les contrats, les actions commerciales équilibrées, et mis en places les actions de gestion des risques, la diversification, les plans d’economie, l’automatisation, l’investissement avec vue à long terme.,.certains produits agricoles, à coûts élevé et qualité irréprochable deviendrons des produits de luxe, il faudra s’adapter avec des plans long termes
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