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La contractualisation pluriannuelle entre deux Etats pour contrer la volatilité des prix du blé

De part et d’autre des rives de la Méditerranée, les défis agricoles et alimentaires à relever sont complémentaires. Opter pour la contractualisation pluriannuelle entre la France et les pays maghrébins structurerait les échanges commerciaux dans la durée.

Le graal des céréaliers français et des importateurs maghrébins : s’affranchir du fonctionnement imprévisible des marchés !

Pour y parvenir, la contractualisation pluriannuelle entre des exportateurs et des importateurs de deux pays différents, privés ou publics, serait une solution prometteuse. Elle est suggérée par Sébastien Abis, chercheur à l’Iris et Mohammed Sadiki, secrétaire général du ministère de l’Agriculture et de la Pêche du Maroc, dans un essai rédigé en commun, intitulé « Agriculture et climat, du blé par tous les temps ».

De part et d’autre des rives de la Méditerranée, les défis agricoles et alimentaires à relever sont complémentaires. Les pays maghrébins sont confrontés à une forte variabilité de la production de céréales tandis que la consommation croît continuellement. La population reste en effet très portée sur le pain. Or les années de pénurie, son prix qui flambe est à l’origine de crises sociales.

En Europe, et en France particulier, le problème récurrent de ces dernières années est le prix des céréales payé aux agriculteurs. Il ne couvre pas les coûts de production. En revanche, la régularité de la production française de céréales fait la renommée de notre pays sur les marchés mondiaux ; la campagne 2016 étant, d’avis d’expert, une année exceptionnelle.

Mais le marché ne rémunérant pas ses producteurs, il pourrait dissuader ces derniers à prendre part au défi planétaire à relever : produire 270 millions de tonnes de blé en plus par an d’ici 2050 pour subvenir aux besoins croissants et réguliers en blé de la population mondiale.

Dans ce contexte, les pays maghrébins comptent sur la France pour approvisionner leur marché intérieur. « Et une contractualisation pluriannuelle offrirait alors la garantie d’un débouché à celui qui exporte et une origine à celui qui importe, sur une base tarifaire mutuellement prévisible favorisant la régularité respective des revenus ou des dépenses en dépit d’éventuels accidents climatiques », écrivent les deux auteurs de l’essai cité plus haut.

L’idée serait de fixer, sur une durée de trois à cinq ans, une quantité fixe de blé à exporter, à un tarif unique quelle que soit la volatilité des cours sur la période.

Les contrats passés pourraient même comprendre des clauses pour prévoir davantage d’achats auprès de l’exportateur  à des conditions avantageuses par rapport au prix en vigueur, sur le marché, les années de moins bonnes récoltes.

« La France aurait intérêt à explorer l’utilité d’un tel outil diplomatico-commercial. Et le Maroc serait bien avisé de se pencher également sur la question  pour éviter de sérieux coups de chaud au thermomètre de sa facture alimentaire ou des inquiétudes répétées face à l’exposition aux approvisionnements extérieurs», défendent Sébastien Abis, chercheur à l’Iris et Mohammed Sadiki.

Cette contractualisation constituerait un rempart contre les accidents climatiques face auxquels aucun pays n’est à l’abri, même s’il engage les politiques efficaces pour renforcer sa sécurité alimentaire. Et elle serait un facteur de stabilité sociale et de paix.

« La difficulté technique des contrats pluriannuels semble moins contraignante que le manque de volonté politique », assurent Sébastien Abis et Mohammed Sadiki. Dans un tel cas de figure, l’agriculture aurait alors un rôle majeur, comme l’a été la Pac dans la construction de l’Union européenne, pour relancer la construction euro-méditerranéenne en manque de souffle.
 

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