karenserres

Karen Serres place son militantisme au-dessus de sa propre destinée

Lors du dernier congrès de la FNSEA, un événement est passé (presque) inaperçu. Karen Serres, militante s’il en est de la cause des femmes en agriculture, a préféré passer la main en cédant la présidence de la commission des agricultrices. Motif : que la cause perdure. Ses explications.

La commission nationale des agricultrices a été créée dans les années 1950 au sein de la FNSEA. Dans un monde très masculin, il est ainsi apparu qu’il fallait défendre spécifiquement la cause des femmes en agriculture. Un véritable combat, resté sans cesse d’actualité.

Karen Serres figure parmi les personnalités qui auront marqué leur passage. Après six années en tant que vice-présidente, elle sort de neuf autres en tant que présidente de cette commission. Quinze ans, ça vous marque une femme… Mais pas au point de lui faire oublier l’essence de ses idées : « Il faut savoir ne pas rester si on veut renouveler le combat. En restant trop longtemps, on crée le vide autour de soi et après soi. Et c’est très important pour moi de voir que tout ce qui a été entrepris se poursuive, y compris autrement que je ne l’aurais pensé. Il reste tant à faire. L’important pour moi est que les agricultrices soient défendues, et bien. »

Un choix délibéré, réfléchi depuis trois ans, quand elle a demandé à Jacqueline Cottier de prendre la vice-présidente de la commission des agricultrices, tout en se préparant à devenir présidente (ce qui est donc désormais le cas). Un renouvellement préparé, orchestré. Et finalement peu commun dans les sphères syndicales ou même politiques, où les honneurs des fonctions font parfois (souvent ?) oublier que les missions pour la collectivité peuvent être plus importantes que celles ou ceux qui les portent.

Karen Serres conserve la présidence de Trame, et se ressource désormais dans son département du Lot et sa région de Midi-Pyrénées. Elle reste au conseil d’administration de la commission des agricultrices « parce qu’il y aura des dossiers à transmettre, des historiques à rappeler sur certains sujets, mais je ferai en sorte d’être absente au début pour ne pas gêner l’action de la nouvelle présidente« .

Il est donc temps pour elle de tracer un bilan de son action, des avancées obtenues ou en cours : « Je dirais qu’elles se situent à deux niveaux : sociologiques d’une part, et juridiques ou statutaires d’autre part. Sociologiques, car j’ai joué un rôle dans l’acceptation du rôle des agricultrices, y compris au sein de la FNSEA, avec une représentativité à part entière. Juridiques ou statutaires sur différents sujets tels le statut de conjoint collaborateur, la durée du congé maternité, le Gaec entre époux…« 

« Une des petites fourmis qui a permis de… »

Elle détaille, d’abord, le chapitre sociologique : « Les agricultrices ont longtemps été considérées comme un mal nécessaire, mais dont on ne parle pas. Tout se réfléchissait au masculin. Aujourd’hui, nous n’avons plus du tout le même regard, la même attitude. On ne regarde plus l’épouse de l’agriculteur qui lui donne un coup de main, mais l’agricultrice. On ne cantonne plus l’agricultrice à des responsabilités uniquement à la MSA et surtout pas ailleurs. Tout cela a changé, évolué avec le temps. » Précision, dans sa façon de dire les choses, Karen Serres ne se met pas en avant, elle répète souvent l’expression : « J’ai été l’une des petites fourmis qui a permis de…« 

Toujours avec la même humilité, elle avance sur le juridique : « J’ai participé à l’élaboration, en 2000, au statut de conjoint collaborateur. Nous avons eu des avancées sur les retraites aussi, même si tout est loin d’être parfait aujourd’hui encore. La durée du congé maternité a été alignée sur celle des salariées. En 2010, le Gaec entre époux est très important. Il y a aussi la règle pour les chambres consulaires d’avoir un minimum de 30 % de représentativité féminine… Mais en même temps, il reste beaucoup à faire. Pour les congés maternité, seules 51 % des femmes qui accouchent le prennent, car les formulaires sont très compliqués. Et puis le Gaec entre époux doit avoir une suite, la reconnaissance que les deux conjoints sont de vrais exploitants…« 

Des avancées, par petits pas, mais qui nécessitent une présence de tous les instants. Elle pense qu’il faut aller plus loin dans la transformation des Earl en Gaec, mais tout le monde ne la suit pas sur ce point, y compris au sein de la FNSEA. Ce sera donc un dossier pour Jacqueline Cottier, dont la première sortie officielle (médiatique en tout cas) devrait avoir lieu le 18 avril 2014 à l’occasion d’une journée d’action… Comme un passage de relais.

 

Les photos qui illustrent cet article sont issues du compte Facebook de Karen Serres. Ci-dessous, une partie de la commission des agricultrices sortante en visite ministérielle en 2012, avec Karen Serres en troisième position, et Jacqueline Cottier en sixième.

Article Précédent
Article Suivant