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Gilets jaunes, en quoi l’échec des états généraux de l’alimentation augure-t-il un destin funeste pour le grand débat national ?

Le grand débat national qui doit s’ouvrir cette semaine pour répondre aux revendications des Gilets jaunes n’est pas la première consultation nationale décentralisée du gouvernement actuel. Les états généraux de l’alimentation, comprenant tant de promesses, n’a donné que des réponses pour le moins partielles, et prêtant à interprétations multiples…

Les états généraux de l’alimentation étaient censés redonner une forme de revenu minimum aux agriculteurs, dont la part du partage de la valeur s’est effilochée au fil du temps. Dans le même temps, les associations écologistes avaient compris qu’ils devaient donner des lignes à suivre pour une alimentation toujours plus saine et respectant dans ses productions toujours plus l’environnement. Le tout devant donner une image de la production française rafraichie auprès des consommateurs…

Quels résultats après les consultations des états généraux de l’alimentation ?

Dans le modus operandi, il y eut des réunions décentralisées, un peu partout sur le territoire français. Il a alors semblé que la consultation était totale, et qu’elle justifiait qu’il faille attendre un an et demi avant d’entrevoir ses résultats.

Seulement ce n’était que façade. Dans les faits, plusieurs (au moins, pour autant que je sache avec ce qui m’a été personnellement rapporté, je ne peux pas témoigner sur la généralisation du phénomène) compte-rendus furent rédigés si rapidement qu’ils étaient distribués aux participants avant la fin des réunions… Comme s’ils avaient été écrits avant, et donc sans tenir compte du contenu du dialogue institué. En d’autres termes, on n’est pas parti d’une page blanche, mais dans un débat dirigé, avec des a priori bien définis, pour ne pas dire davantage.

C’est ainsi qu’est venue l’idée de calculer le prix d’achat des denrées agricoles aux producteurs selon leur coût de revient. Une fausse bonne idée évidemment, puisque celui-ci dépend aussi des charges de l’exploitation, de ses emprunts, etc. Bref, de bien des critères qui changent d’une ferme à l’autre, et même d’une année à l’autre dans une même ferme. Mais reconnaissons que jusque dans la loi qui a suivi ces états généraux de l’alimentation, la loi « pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable », l’idée a fait son chemin, et il a donc été conclu qu’un prix allait désormais être fixé d’après un coût de revient moyen par exploitation…

Las ! Aux premières discussions entre acheteurs et producteurs pour le domaine de la viande bovine, aucun accord n’a été trouvé ! Et on est donc repartis pour des discussions au cas par cas, comme à l’accoutumée. Rien n’a changé. Et il est vraisemblable que dans les autres secteurs que la viande bovine, les conclusions soient les mêmes. Presque deux ans, pour rien, en ce qui concerne les producteurs agricoles.

Et pour les associations écologistes, elles ont toutes réagi pour exprimer leur déception devant le texte de loi, estimant notamment qu’il y manquait des contraintes par rapport aux objectifs fixés.

En définitive, à qui a profité le crime ? A la seule loi du marché, pas forcément mauvaise en soi, mais toujours insuffisamment encadrée. Les interprétations de la loi restent multiples, et ouvrent donc à relativement peu de recours en cas de non respect de son « esprit initiial »…

Et pour le grand débat national des Gilets jaunes ?

Le grand débat national des Gilets jaunes s’annonce ressemblant aux états généraux de l’alimentation. Des idées préconçues dans le discours des différents membres du gouvernement s’exprimant sur le sujet. Des amalgames entre les différentes catégories de Gilets jaunes : les « originels » ne voyant aucunes perspectives dans leurs vies en étant dans le rouge dès le 15 du mois (les plus légitimes et ceux pour lesquels il faut à tout prix trouver des solutions) et les récupérateurs de tous les bords (policiens, extrémistes, casseurs…)… Tout cela n’augure rien d’extraordinaire. D’autant que, contrairement aux états généraux de l’alimentation qui étaient souhaités par le Président de la République puisque figurants sur son programme de campagne, ce grand débat lui est quasiment imposé par les événements.

Dès lors, ce n’est pas si étonnant qu’il puisse exister un calcul, disons politicien, pour savoir comment tirer profit de ce grand débat. En d’autres termes, davantage que des réponses pour les retraités ou autres ménages en proie aux difficultés financières, il semble que l’on cherche à gagner du temps et à apaiser les esprits.

Ce qui était aussi le cas par rapport aux agriculteurs à l’été 2017. Rappelons que Emmanuel Macron, alors qu’il n’était que candidat à l’Elysée, avait reçu un oeuf sur la tête lors du salon de l’agriculture qui avait précédé en février. Il savait pertinemment que le monde agricole pouvait lui jouer des surprises, et même si lui-même n’est pas plus sensible aux paysans que ses prédécesseurs, il avait donc bien réfléchi à juguler leurs éventuelles colères.

En clair, ce grand débat national se pose, dans l’esprit des organisateurs, comme une solution pour arrêter les manifestations, pas forcément pour s’intéresser à leurs causes… Tout comme se déroulèrent les états généraux de l’alimentation…


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