Une des mesures majeures de la réforme fiscale agricole du gouvernement est l’aménagement apporté à la déduction pour aléas (DPA) et la suppression de la déduction pour investissement (DPI), qui avait déjà perdu beaucoup de sa substance ces dernières années. Les agriculteurs auront en 2019 de nouveaux outils comptables pour les aider à se prémunir des aléas économiques et climatiques à venir.
La déduction pour aléas est une somme que l’on déduit du revenu fiscal à un moment pour favoriser la protection des exploitations agricoles face à des aléas. Cette mesure n’a jamais rencontré le succès escomptée car elle était trop contraignante. Cet automne, les changements apportés par le gouvernement pour rendre ce dispositif plus attractif sont les suivants.
Des modifications à la marge pourront être apportées lorsque le projet de loi de finances pour 2019 sera débattu au Parlement.
En attendant, pour apprécier les modifications proposées, comparons le nouveau dispositif avec les DPA et DPI jusqu’alors en vigueur :
– DPA réformée : les agriculteurs arbitreront eux-mêmes les sommes épargnées. Ils n’ont plus besoin de justifier la réintégration des sommes épargnées.
Dispositifs actuels : la DPA servait au règlement des primes ou cotisations d’assurances, au rachat de franchises d’assurances, à la survenance d’aléas non assurés d’origine climatique, naturelle ou sanitaire entraînant une baisse au moins supérieure à 10 % du chiffre d’affaires sur les 3 exercices d’avant.
La DPA permettait aussi de se constituer un stock pour faire face à des aléas.
La DPI pouvait être rapportée tout ou partie au résultat d’un exercice antérieur lorsque ce résultat est inférieur d’au moins 40 % à la moyenne des résultats des trois exercices précédents.
– DPA réformée : durée de réintégration passée à 10 ans
Dispositifs actuels (DPA et DPI) : durée de réintégration limitée à 7 ans (5 ans pour les stocks à rotation lente).
– DPA réformée : il sera désormais possible d’utiliser les sommes épargnées pour acquérir un matériel. Les sommes pourraient être réintroduites durant la période d’amortissement du matériel acquis pour lisser le revenu fiscal.
Dispositifs actuels : La DPI pour acquisitions d’immobilisations amortissables (matériel) est abrogée depuis 2012.
Initialement, les DPI étaient constituées en vue d’acquérir un matériel. Elle était alors réintégrée par tranche dans le compte de résultat pour calculer le bénéfice agricole. Mais les DPI étaient devenues une mesure fiscale visant à réduire d’abord les montants des prélèvements obligatoires. Avec comme contrepartie l’acquisition de matériels inappropriés qui conduisait parfois à des endettements excessifs.
– DPA rénovée : le gouvernement précise que « l’exploitant pourra satisfaire à la condition d’épargne au moyen des sommes qu’il met à la disposition d’une société coopérative agricole dans laquelle il est associé en exécution d’un contrat mettant en oeuvre un mécanisme de lissage des prix ». Sinon l’achat de part de Cuma reste possible
Dispositifs actuels : DPI réduite pour l’acquisition de parts sociales des coopératives agricoles. Les parts concernées en l’espèce, sont les parts représentatives d’une coopérative (par exemple, des parts de Cuma).
– DPA rénovée : inscription sur un compte bancaire d’une somme comprise entre 50 % et 100 % du montant de la déduction pratiquée.
Dispositifs actuels : dans une première mouture, l’agriculteur plaçait la totalité de la somme retirée sur un compte. Puis ce placement a été ramené à 50% du montant des sommes déduites (ratio à ce jour en vigueur).
– DPA rénovée : les sommes prélevées pourront financer des fourrages et de stocks à rotation lente. Cette disposition fiscale sera utilisée par les éleveurs en particulier. La période d’utilisation est passée à 10 ans. Mais cette épargne en stock ne pourra pas excéder le montant de l’épargne monétaire.
Dispositif actuel : les éleveurs utilisaient les DPI pour constater l’accroissement en valeur de leurs animaux en stocks. La période de réintégration était limitée à 5 ans.
– DPA rénovée : Le montant total de l’épargne de précaution 150 000 €. Chaque exercice, la part de bénéfice agricole qui est possible de déduire dépend de son montant :
De 0 à 27 000 € de bénéfice 100 % du bénéfice
De 27 000 € à 50 000 € de bénéfice 27 000 € + 30% du bénéfice excédant 27 000 €
De 50 000 € à 75 000 € de bénéfice 33 900 € + 20% du bénéfice excédant 50 000 €
De 75 000 € à 100 000 € de bénéfice 38 900 € + 10% du bénéfice excédant 75 000 €
Plus de 100 000 € de bénéfice 41 400 €
Application de la règle de transparence (modalités pas encore définies).
Dispositif actuel : DPI et DPA, dispositions cumulables dans la limite d’un plafond commun qui est de 27 000 euros par année. Ce plafond pour un Gaec ou une Earl, est multiplié par le nombre d’associés dans la limite de trois.
– DPA rénovée: régime d’exonérations des plus values moins avantageux pour éviter le cumul d’avantages fiscaux pour l’acquisition de matériels roulants agricoles.
Les cessions de matériel roulant agricole détenu depuis moins de deux ans et acquis avec des sommes prises sur la déduction pour aléas ne sont plus exonérées.
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