La hausse des prix des ovins et du lait permet de compenser les coûts intrants si ces derniers reviennent très vite à leur niveau du début de l’année. Mais s’ils restent à leurs niveaux atteint au début du mois de mars, lorsque les hostilités entre l’Ukraine et la Russie ont débuté, les éleveurs d’ovins subiront de très lourdes pertes.
En 2021, les prix des agneaux, le prix du lait et les aides Pac ne permettaient pas d’assurer un revenu par unité de main d’œuvre (Umo) équivalent à 2 smic aux producteurs d’ovins. Au sein du réseau des exploitations agricoles Inosys-Réseaux d’élevage de l’Institut de l’élevage (Idele), le revenu des producteurs d’ovins viande n’a pas excédé 1,6 Smic/Umo et celui des éleveurs de brebis laitières, 1,4 Smic/UMO. Or il s’agit pourtant de fermes pilotes !
L’ensemble de ces résultats a été publié le 12 mai dernier par Emmanuel Bellet et Vincent Morin de l’Idele lors de la troisième édition « Grand angle ovin » organisée par l’institut.
En produisant l’équivalent de 12 700 Kg équivalent carcasse par UMO (kgéc/UMO), les producteurs d’ovins viande en systèmes « Fourragers » dégageaient un revenu d’1,6 Smic/UMO alors que leurs collèges en système « herbagers zones de montagne » (8 400 Kgéc/UMO) doivent se contenter d’un revenu équivalent à 1,2 Smic/UMO.
En fait, les différences de revenu entre les systèmes d’élevage s’expliquent essentiellement par la dimension des troupeaux des exploitations. Plus elle est importante, plus les charges de structure et du travail sont faibles puisqu’elles sont réparties entre un nombre important d’animaux.
Mais les systèmes pastoraux constituent une catégorie à part. Ils perçoivent des aides (12,9 €/Kgéc) dont le montant est déconnecté de leur activité d’élevage (5 600 Kgéc/UMO).
Pour percevoir un revenu équivalent à 2 Smic/UMO, le produit par kilo de carcasse produite (vente + aides Pac) des systèmes « Herbagers en zone de montagne » aurait dû atteindre 16,5 €/kgéc. Or dernier n’a pas excédé 13,5 €/kg en moyenne.
Tout au long de l’année 2021, la hausse de 20 % des prix des intrants a été compensée par celle cotations des carcasses. Mais la guerre en Ukraine a ravivé les tensions sur les marchés des matières premières. S’en est alors suivie une nouvelle flambée des prix. Si ces derniers demeurent à leur niveau actuel jusqu’à la fin de l’année, les éleveurs d’ovins viande en systèmes «Fourragers » pourraient perdre jusqu’à 19 700 €/UMO (9 400 €/UMO en systèmes pastoraux). Selon les systèmes de production, toute augmentation de 100 € du prix de la tonne d’aliments renchérit de 0,45 € à 0,91 €, le coût de production du kilo de carcasse produit.
Si les prix des intrants reviennent dans les semaines à venir à leur niveau du début de l’année, les pertes seraient alors limitées à 2 900 €/UMO dans les systèmes « Pastoraux » et à 5 600 €/UMO dans les systèmes « Fourragers », par exemple.
Des études similaires ont été faites dans des exploitations de brebis laitières. En Occitanie, le revenu des producteurs n’excède pas 1,4 Smic/UMO et 0,9 Smic/UMO dans les Pyrénées Atlantique. Là encore, ce revenu est très lié à la dimension des troupeaux. Or celle-ci est bien plus faible dans les Pyrénées Atlantique où la production de lait par UMO est de 49 500 l en moyenne qu’en Occitanie (65 500 l/UMO). Aussi, pour espérer gagner un revenu équivalent à 2 Smic/UMO, les éleveurs de Pyrénées Atlantique devraient pouvoir dégager un produit de 2 230 €/1000 l, aides Pac comprises. Or ce dernier n’excédait pas 1 836 €/ 1 000l l’an passé.
Là encore, si les prix des intrants restent à leur niveau actuel tout au long de l’année 2022, le manque à gagner des éleveurs serait de 10 100 €/UMO en Occitanie (8 900 €/UMO dans les Pyrénées Atlantique). Mais si les prix des intrants reviennent à leur niveau d’avant le conflit russe, les pertes seraient limitées 3 000 €/UMO et à 2 300 €/UMO. A condition qu’une nouvelle sécheresse ne survienne pas cet été.
Légende photo: Troupeaux de moutons (@Stephaniecointe)