En France, l’Institut de l’élevage anticipe une diminution de la production de viande bovine de 207 000 tonnes équivalent carcasse (207 ktéc) d’ici 2030 et même de 400 ktéc à l’horizon de 2035 si la tendance de décapitalisation observée depuis quelques années se poursuit.
Or ce mouvement de décapitalisation ne serait pas compensé par une baisse équivalente de la consommation de viande bovine.
La France et l’Union européenne (UE) importeraient davantage de viande bovine qu’aujourd’hui pour assurer leur sécurité alimentaire alors que l’ensemble des marchés des viandes sont déjà très tendus.
Mais en agriculture, les prévisions sont souvent démenties. Sans parler de reconquête, une stabilisation des effectifs français de vaches allaitantes ou le développement de l’engraissement de jeunes bovins sont deux scénarios tout à fait envisageables. Un tel scénario pourrait aussi être observé à l’échelle européenne. « Dans ces cas de figure, l’importation excessive de viande bovineengorgerait rapidement le marché européen », affirmeBaptiste Buczinski. Le 29 novembre dernier, il était un des intervenants du colloque « Grande Angle Viande bovine » organisé par l’Idele.
En 2019-2021, la production européenne d’aloyaux (1 150 ktéc) était déficitaire de 220 ktéc. Aussi, une partie de la viande bovine consommée dans l’UE était régulièrement importée de pays tiers.
Mais si l’ensemble des accords bilatéraux d’échanges commerciaux en vigueur et en cours de négociations, étaient appliqués à la lettre au cours des dix prochaines années, plus de 500 ktéc pourraient être alors importées à droits de douane nuls ou réduits. Ces achats équivaudraient à 1,3 fois la production européenne d’aloyaux issus d’animaux de race à viande.
La viande importée serait expédiée d’Océanie, d’Amérique du sud et centrale, du Canada et même d’Inde. Relativement bon marché, elle concurrencerait la viande bovine produite en UE dans des conditions très réglementées.
Mais cette concurrence accélèrerait le déclin de l’ensemble de la filière bovine des Vingt-sept. Et cela, en total contradiction avec la politique de décarbonation de l’économie européenne et de son agriculture.
L’accord du Ceta en vigueur depuis 2017 autorise le Canada d’expédier jusqu’à 67 950 tonnes chaque année depuis 2022. L’accord commercial UE-Nouvelle Zélande en cours de ratification prévoit l’allocation d’un contingent de viande bovine à taux de douane réduit (7,5 %) de 10 000 téc à l’horizon de 2023
L’Inde n’est pas pour le moment autorisée à exporter de la viande bovine vers l’UE mais les négociations en cours d’un futur accord de libre-échange entrevoient l’allocation d’un contingent de viande à droits de douane nuls ou réduits. Le pays exporte actuellement 1,5 million de téc.
Le marché européen a toujours été très convoité car il est un des plus rémunérateurs au monde avec celui de la Corée (jusqu’à 8€/kg d’aloyau contre 3 €/Kg en Malaisie).
Mais comme la demande mondiale de viande bovine est très forte, les pays exportateurs nets de viande n’ont pas les moyens de remplir leur contingent à l’export. Le Canada n’a jamais expédié plus de 2 500 téc par an. Les importations de viande bovine d’Amérique du sud ont augmenté depuis le début de l’année mais elles restent inférieures à leur niveau de 2018.
Toutefois, l’augmentation de la production mondiale de viande bovine peine à répondre à la demande. La Chine est de loin le premier pays importateur au monde de viande bovine.